
Créée fin 2018, la Scic Virgocoop a relancé localement la filière textile par la culture du chanvre. Une initiative enthousiasmante mais qui doit améliorer les conditions de paiement des agriculteurs et l’accessibilité des produits finaux.
– Clémence Urvoy, Mathieu Thiberville, Mathieu Ebbesen-Goudin et Johann Vacandare – arrivent à la conclusion que cette culture présente deux avantages. D’abord, elle permet de proposer une alternative locale et écologique à l’industrie du textile. (...)
Ensuite, elle peut, pour des agriculteurs cherchant à diversifier leurs productions, devenir une activité complémentaire.
Un projet coûteux
À la fin de l’année 2018, la coopérative est créée. (...)
À côté de la filière chanvre, elle s’est aussi lancée dans la laine, matière première qu’elle commande à des éleveurs en Lozère depuis 2023. Pour nourrir son développement, elle a multiplié les sources de financement (augmentation du capital social avec l’arrivée de nouveaux sociétaires, titres participatifs, emprunts…). (...)
Deux ans après, la coopérative achète des machines à défibrer le chanvre, installées dans l’usine de Caylus. En comptant les bureaux à Cahors, la Scic fournit du travail à quinze personnes. (...)
Aujourd’hui, « on a redonné vie à une filière », assure Julien Bonnet, schéma à l’appui. Cet ancien chercheur généticien virologue dans la biologie des plantes a fondé un cabinet de conseils sur la culture du chanvre, avant de devenir responsable du site de Caylus et de la filière chanvre pour Virgocoop. « Les agriculteurs se trouvent dans un rayon de 80 km, présente-t-il. La fibre est ensuite envoyée à Dreuilhe, en Ariège, où se trouve une filature. Puis, le fil arrive à notre atelier Tissage d’Autan. » Le chanvre produit également de la chènevotte. « Cela correspond à 50 % ou 60 % de la plante », précise Julien Bonnet. Cette matière est exploitée par la Scic. « Elle est destinée au bâtiment et au paillage. » (...)
Pour que le prix de l’article baisse, il faudrait « optimiser la production », explique le directeur général. Par exemple, si les outils d’exploitation étaient utilisés à leur maximum, le coût de revient du tissu au mètre baisserait. Ainsi, l’atelier de tissage pourrait produire 6 à 8 fois plus de métrage si la demande l’exigeait. « Pour aller plus vite, il faudrait que la puissance publique nous soutienne davantage », ajoute Johann Vacandare. Jusqu’à présent, la Région a fourni 195 000 euros de subventions directes et l’État a accordé un crédit d’impôt de 93 000 euros, « mais il n’était pas spécifique au textile », souligne le directeur général.
Ce dernier a exploré des pistes, comme les appels à projet France 2030, mais cela demande des budgets importants. « Nous n’avions pas les capacités des entreprises qui ont déposé des dossiers. » Par ailleurs, les dirigeants ont eu l’impression que, pour l’emporter, il valait mieux présenter un projet d’activité unique plutôt que sur toute une chaîne de production, comme c’est le cas de Virgocoop.
La démocratisation de ces produits peut, cependant, emprunter un autre chemin. Depuis le 13 mars, la coopérative a lancé un site en ligne de vente de tissus. La relocalisation de cette filière dépendrait alors de la réappropriation d’un autre savoir en partie oublié : la couture.