
Mediapart renforce sa couverture de la culture et lance une newsletter dédiée aux batailles culturelles, aux enquêtes sur les institutions, aux débats sur la création et aux rencontres avec des lieux et des personnes qui continuent de faire vivre un champ sinistré et attaqué.
Le camp réactionnaire se vante d’avoir gagné la « bataille culturelle » et d’en tirer aujourd’hui les dividendes électoraux et politiques. Le ridicule de ce gramscisme pour les nuls, qui consiste surtout à déclencher des conflits sur des mots (wokisme, cancel culture, déconstruction…) ne doit pas oblitérer une dure réalité : à savoir que les milliardaires investissent comme jamais le champ culturel pour fabriquer l’opinion. Dans un double processus de concentration et de verticalisation, qui leur permet de maîtriser la chaîne de production, depuis le synopsis jusqu’à la critique.
Derrière les projets ouvertement d’extrême-droite de Vincent Bolloré, qui veut aujourd’hui étendre son empire culturel et médiatique (Hachette, Europe 1, CNews, Canal +…) à UGC ; des ultra-réactionnaires promouvant des parcs de loisir comme le Puy du Fou ou le Rocher Mistral, ou d’un Pierre-Edouard Stérin qui s’était porté candidat au rachat d’Editis, on trouve des milliardaires pour lesquels l’argent n’a pas d’odeur mais la culture un intérêt croissant.
Ainsi de Xavier Niel, co-propriétaire du Monde, cofondateur de Mediawan, devenue l’une des principales sociétés de production de l’Hexagone, candidat à l’attribution d’un canal de la TNT censée « mieux valoriser la musique et les artistes » et même ex-actionnaire de feu le plus confidentiel Nouveau Magazine Littéraire.
Ainsi de Daniel Krétinsky qui pioche dans sa fortune bâtie sur l’extractivisme pour s’acheter une influence dans les médias (Elle, Télé 7 Jours, Marianne, Usbek & Rica, Franc-Tireur, Libération…) et l’édition en rachetant le numéro 2 français du secteur.
Ainsi de Bernard Arnault qui, en sus de son appétit médiatique, s’est bâti avec LVMH un empire du luxe bien décidé à neutraliser et digérer la vitalité de l’art contemporain en pesant de tout son poids sur sa production et sa diffusion.
Face à ces bouleversements majeurs de l’industrie culturelle, le service public de la culture est à la peine. (...)
Pour saisir comment la culture et les idées ne planent pas au-dessus de nous, tel un supplément d’âme, mais catalysent les métamorphoses politiques de l’époque et s’incarnent dans des lieux, des trajectoires, des conflits, des institutions traversées d’enjeux de pouvoir, de réseaux et d’une certaine tendance à cultiver l’entre-soi, retrouvez tous les 15 jours nos enquêtes, reportages, analyses, entretiens, podcasts et documentaires en vous inscrivant à la Newsletter « Contrechamp ». (...)