(...) A la différence de toutes les autres comédiennes de son niveau de notoriété, elle arrive seule sur le plateau, sans assistante maquillage, sans agent virevoltant l’oeil rivé sur le chrono. Son agente l’a lâchée sans préavis au début de l’année, au dernier festival de Berlin, après que l’humoriste a annoncé son intention d’y porter un pin’s exigeant un cessez-le-feu à Gaza. En apparence tout est normal, mais une proposition de rôle que lui avait faite la réalisatrice Valérie Donzelli a été retirée après "l’affaire" du sketch avec Aymeric Lompret sur l’antisémitisme. Résumons pour ceux qui ont manqué des épisodes. Elle qui, jusqu’alors, pratiquait essentiellement l’autodérision, s’est alors engagée frontalement, contre l’abus manipulatoire des accusations d’antisémitisme à l’encontre de toutes les expressions de soutien à la Palestine. Grand coup de gong libérateur. Interprété dans le cadre d’une soirée de soutien à la Palestine en juillet 2024, ce sketch a marqué un virage dans la carrière de l’humoriste.
En apparence tout continue depuis, mais... aucune autre proposition de rôle n’est arrivée depuis. Tout est normal, mais...elle dit aujourd’hui renoncer au stand up, cette ""forme américaine"". Tout est normal, mais faute de matelas financier pour amortir ce trou d’air, Blanche Gardin est en train de vendre son appartement parisien. Peu importe, assure-t-elle. Elle se proclame glorieusement frugale, et se déclare prête à souffrir. Davantage même : la voici aujourd’hui qui fait l’éloge de la souffrance, comme mode de survie de l’humanité contre la barbarie. On adhérera ou non...
Tout est normal, mais quand je demande à Blanche Gardin si elle se considère personnellement en état de mort sociale, elle ne dément pas. Tout est normal, mais depuis ce sketch qui lui a valu de nombreuses attaques de soutiens d’Israël, on dirait qu’elle a franchi une limite électrifiée. On ne plaisante pas avec les accusations d’antisémitisme qui ont volé bas, contre tous les soutiens de la cause palestinienne, depuis le 7 Octobre.
N’exagérons rien. Son public est solide. Grâce à la multiplication des micro-espaces en ligne de réflexion et d’expression comme la chaîne décoloniale "Paroles d’honneur", qui l’a reçue, elle ne s’est pas laissé entrainer dans la dérive de la dieudonnisation.
En apparence tout est normal, mais on aimerait bien que la normalisation de la situation de Blanche Gardin s’accentue encore. Des dizaines de milliers de déboussolé (e) s seraient prêts à recommencer à rire avec elle, comme avant. C’est elle qui désormais refuse. ""On a trop ri, et peut-être mal ri. Il est temps d’apprendre à pleurer"," dit-elle. Elle s’y emploie. Suivons-la sur ces chemins inattendus. On ne va pas rire beaucoup. Quoique... DS