
Pfizer et BioNTech, Moderna, AstraZeneca…Quels sont les avantages et les inconvénients de trois vaccins disponibles en France ? Avant l’ouverture de vaccinodromes, les professeurs Mathieu Molimard, pneumologue chef du service de pharmacologie du CHU de Bordeaux, et Antoine Pariente, responsable du Centre régional de pharmacovigilance de Bordeaux (CRPV Bordeaux), se penchent sur l’efficacité et les effets secondaires de ces vaccins, en fonction de la tranche d’âge et des variants.
Alors que nous « fêtons » le début de la pandémie en France, il n’y a pas d’embellie à l’horizon pour l’heure : la circulation virale (notamment du variant anglais, devenu dominant, et qui serait 64 % plus mortel que les autres variants selon une étude publiée dans le British Medical Journal) s’intensifie (notamment en Gironde, où tous les signaux sont au rouge cette semaine), la pression en réanimation continue de grimper, un variant breton échappe aux tests PCR, 19 départements « reconfinent » et l’Union européenne fait face à une pénurie de vaccins. (...)
« la vaccination est notre seule porte de sortie de la crise », souligne le Pr Mathieu Molimard, pneumologue, chef du service de pharmacologie du CHU de Bordeaux et membre de la Société française de pharmacologie et de thérapeutique (SFPT). « Même si nous ne connaissons pas la durée maximale d’immunité que confèrent les vaccins, reconnaît l’expert. A priori, elle est d’au minimum 8 mois et nous gagnons chaque mois un mois supplémentaire. Pour l’heure, nous ne savons pas s’il faudra ou non des injections de rappel et si oui, à quelle fréquence. »
Par ailleurs, « aucun traitement ne fonctionne pour l’heure contre la Covid, hormis l’oxygénothérapie et les corticoïdes en réanimation, rappelle le Pr Molimard, fraîchement vacciné. Nous attendons encore à ce jour des publications scientifiques sur les deux bithérapies à base d’anticorps monclonaux (voir encadré) aux doses de l’autorisation temporaire d’utilisation (ATU) montrant un effet clinique en terme de réduction des hospitalisations et de la mortalité. »
Mais que penser des trois vaccins actuellement disponibles en France ?
« Nous avons confiance dans l’efficacité de ces trois vaccins sinon nous ne leur aurions pas accordé l’Autorisation de mise sur le marché, répond le Pr Molimard. Certes, ils ne protègent pas à 100 % mais sont efficaces au minimum à 60 % (pour l’AstraZeneca), y compris pour les formes asymptomatiques. Les vaccins permettent de rompre la chaîne de transmission et nous épargnent bon nombre de formes graves, Covid longs et décès ! En effet, nous avons des arguments de plus en plus forts, via les données animales, d’essais cliniques et celles, israéliennes, écossaises et américaines, en « vie réelle », montrant que la vaccination réduit le nombre de cas asymptomatiques chez les vaccinés et donc la capacité de transmission. Celle-ci est diminuée d’environ 80 % avec le vaccin Pfizer. » Des réflexions sont actuellement menées pour évaluer l’intérêt de vacciner les enfants, qui peuvent transmettre le virus. (...)
Qu’en est-il des risques ?
« Les trois vaccins sont dans la fourchette haute au niveau des allergies qu’ils provoquent : en moyenne 1 cas sur 100 000 personnes vaccinées contre 1 sur un million avec les vaccins “classiques”, indique le Pr Antoine Pariente, responsable du Centre régionale de pharmacovigilance de Bordeaux (CRPV Bordeaux). Avoir des antécédents d’allergies à un composant du vaccin représente donc une contre-indication à l’administration des trois vaccins. Pour l’instant, nous ne savons pas quel ingrédient pose problème. Il s’agit peut-être des composés à base de polyéthylène glycol (PEG), qui sont présents dans les 3 vaccins. » (...)
Pfizer-BioNTech revendique une performance de 95 %. Selon une étude en conditions réelles réalisée en Israël et publiée le 11 mars, le vaccin est efficace à 97 % contre les cas symptomatiques et les formes graves de Covid-19. « Sur le variant anglais, sur le variant sud-africain, notre vaccin maintient son efficacité » a assuré David Lepoittevin, directeur de l’activité vaccins au sein de la filiale française du laboratoire américain Pfizer.
Un délai de 7 jours après la seconde dose du vaccin peut être nécessaire avant que les personnes vaccinées soient protégées de façon optimale.
Quels sont ses effets indésirables ? Depuis le début de la vaccination, « 8487 cas d’effets indésirables ont été analysés par les CRPV rapporteurs (Bordeaux et Marseille). La majorité sont attendus et non graves », mentionne l’ANSM dans son rapport. (...)
Le vaccin de Moderna
Comment fonctionne-t-il ? Ce vaccin repose aussi sur la technologie de l’ARN messager. Il peut se conserver un mois entre 2 et 8 °C, ou pendant six mois à -20 °C. Il nécessite deux injections espacées de 28 jours.
Quelle est son efficacité ? Moderna garantit une efficacité de 94,1 %.
Quels sont ses effets indésirables ? Ce vaccin est surveillé en France par les CRPV de Lille et de Besançon. Depuis le début de la vaccination avec le vaccin Moderna, 302 cas d’effets indésirables ont été analysés par les CRPV rapporteurs (Lille et Besançon). Un grand nombre de cas concerne des réactions locales non graves au site d’injection, de la fièvre, des céphalées, des diarrhées, nausées et vomissements, des douleurs articulaires, une fatigue, des frissons… Quelques cas d’hypertension artérielle, d’arythmie et de zona ont été rapportés. (...)
Le vaccin d’AstraZeneca
Comment fonctionne-t-il ? Conçu par le laboratoire suédo-britannique AstraZeneca associé à l’université d’Oxford, ce vaccin est basé sur un « vecteur viral », dérivé d’un adénovirus de chimpanzé, recombiné pour exprimer la protéine « Spike » du Sars-CoV-2. Il est plus facile à stocker : il peut être conservé, transporté et manipulé dans des conditions réfrigérées classiques (entre 2 et 8 °C) pendant au moins six mois. Il nécessite deux doses espacées de 4 à 12 semaines. (...)
Quelle est son efficacité ? Ce vaccin serait efficace à 76 % contre les cas symptomatiques selon la dernière annonce du laboratoire après une mise à jour de ses données cliniques. Et préviendrait 100 % des formes graves. Les sujets vaccinés sont protégés de façon optimale 15 jours après l’administration de la seconde dose. L’efficacité vaccinale chez les sujets de plus de 55 ans n’a pas été définie dans les essais cliniques.
Néanmoins, une étude écossaise « preprint » (pas encore publiée) qui compare les données d’hospitalisation de 5,4 millions de personnes (dont 1,4 million ayant reçu une première injection d’AstraZeneca) a montré que le vaccin protège aussi les populations les plus âgées à risques contre les formes graves de la Covid-19.
Quels sont ses effets indésirables ?
Entre le 6 février et le 04 mars 2021, 3013 cas d’effets indésirables ont été déclarés et analysés par les deux CRPV rapporteurs (Amiens et Rouen). Là aussi, il s’agit principalement de syndromes pseudo-grippaux qui surviennent en majorité dans les 24 heures. Toutefois, plusieurs cas de thromboses ont été signalés dans plusieurs pays européens (...)
Quoi qu’il en soit, « même vaccinés, les Français devront maintenir les gestes barrières (port du masque, gel hydroalcoolique, distanciation physique…) car les vaccins ne protègent pas à 100 %, ni contre tous les variants et qu’on peut malgré tout transmettre le virus via les mains », souligne le Pr Molimard. Les deux experts bordelais craignent également que le Sars-CoV-2 ne deviennent un virus saisonnier comme la grippe et que la pandémie se transforme en virus à épisodes récurrents.
Covid-19 : bientôt un vaccin supplémentaire
La Commission européenne a donné son autorisation, jeudi 11 mars, à l’utilisation du vaccin Janssen de Johnson & Johnson contre la Covid-19. Ses avantages ? Il ne nécessite qu’une seule injection et peut être stocké à des températures de réfrigérateur.
Testé lors d’essais cliniques sur 40 000 personnes âgés de 18 ans ou plus dans plusieurs pays et réparties en 2 groupes (une moitié a reçu le vaccin, l’autre moitié un placebo), il est efficace à 85 % pour éviter des formes sévères de la maladie, et par là les hospitalisations et décès, et à 66 % pour prévenir les formes modérées à sévères.
Côté effets secondaires, les plus fréquemment observés étaient une douleur à l’endroit de l’injection, des maux de tête, de la fatigue et des douleurs musculaires.
L’Organisation mondiale de la santé a déclaré qu’il était efficace contre les variants de la Covid-19. Il est recommandé dès 18 ans et sans limite d’âge. (...)