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Entre les lignes entre les mots
Qu’est ce qu’un-e individu-e sinon une production de part en part sociale
Bernard Lahire : Dans les plis singuliers du social ; Individus, institutions, socialisations La Découverte – Laboratoire des sciences sociales, Paris 2013, 174 pages, 16,50 euros
Article mis en ligne le 6 décembre 2016

Si certain-e-s inventent des individu-e-s comme êtres préexistant-e-s aux relations sociales, d’autres négligent les processus de socialisation permanents, les rapports sociaux, les dominations ; sans oublier celles et ceux qui dissolvent les individu-e-s dans le collectif.

Bernard Lahire présente de manière approfondie et plus polémique, des analyses qui parcourent ces précédents ouvrages. Contre les présentations de l’être humain comme un être isolé, autonome, responsable, authentique, etc., il souligne la nécessité pour les sciences sociales de travailler sur « la fabrication sociale des individus ». Il ajoute « Car le social ne se réduit pas au collectif ou au général, mais gît dans les plis les plus singuliers de chaque individu ». (...)

L’auteur précise ses positions sur la « légitimité scientifique de la question de la variation individuelle des comportements » au delà de la psychologie pour aborder le « social à l’état incorporé » ou le « social individualisé ». Ce qui lui permet de formuler une question : « Par quelles opérations l’extérieur se plie à l’intérieur et comment s’organisent, au sein de chaque individu, et dans ses rapports avec les différents contextes structurants de son action, les produits de ces plissements ? ». Il précise que les expressions « social à l’état replié » ou « déplié » ne sont qu’une manière suggestive de parler, que le monde social n’est pas qu’extérieur aux individu-e-s, « Chaque individu porte en lui des compétences et des dispositions à penser, à sentir et à agir, qui sont les produits de ses expériences socialisatrices multiples »
(...)

Chapitre 1 : De l’individu libre et autonome : retour sur un mythe contemporain. Outre la critique de l’individualisme et l’oubli des hiérarchies, des dominations, des inégalités, des institutions, l’auteur souligne que certains auteurs « prennent leurs désirs intellectuels et politiques pour des réalités sociales ». Il souligne aussi la nécessité d’expliquer les phénomènes présentés comme des postulats (par exemple : l’individualisation).
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« les individus des sociétés qui promeuvent certaines formes d’individualisme sont collectivement déterminés à se prendre pour les individus libres et autonomes qu’en réalité ils ne sont pas ».
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Il préconise « une sociologie à l’échelle individuelle qui analyse la réalité sociale en tenant compte de sa forme individualisée, incorporée, intériorisée ; une sociologie qui se demande comment la diversité extérieure est faite corps, comment des expériences socialisatrices différentes, et parfois contradictoires, peuvent (co)habiter (dans) le même corps, comment de telles expériences s’installent plus ou moins durablement en chaque corps et comment elles interviennent aux différents moments de la vie sociale ou de la biographie d’un individu ». (...)

En conclusion « Considérations pratiques sur les théories scientifiques », Bernard Lahire revient sur le lien entre questionnements scientifiques et transformation sociale. Il critique l’absence de différence, pour certain-e-s, entre représentation et réalité des faits. Il propose de traquer « le monde social jusque dans ses plis les plus singuliers ». il dénonce les réductions individualistes des constructions libérales et autres. « les sociologues montrent que rien n’échappe aux logiques sociales : l’émancipation radicale, comme la reproduction sans surprise de situations attendues, a des fondements sociaux » (...)