
À Bobigny, ils sont des centaines à faire la queue toutes les nuits pour espérer accéder au guichet de la préfecture. Pour les étrangers vivant en France, pour ceux qui ont recours aux services de l’immigration, retirer un permis de séjour ou faire part d’un changement d’adresse tourne au calvaire. Des heures perdues, dehors, avec les rats, simplement pour obtenir un dossier ou un formulaire.
Dans plusieurs départements, c’est par le mépris et l’humiliation que la République répond à ceux qui sollicitent ses services. (...)
Une file prioritaire aurait été récemment mise en place pour les femmes enceintes et les personnes handicapées. Ce jour-là, on les retrouve pourtant à poireauter avec les autres. Idem pour les mères accompagnées d’enfants et les personnes âgées qui n’ont droit à aucun traitement de faveur.
Un homme s’est dévoué pour épargner ce calvaire à ses parents de 70 ans. « Ils sont déjà venus plusieurs fois, à patienter des heures sans pouvoir accéder au guichet. Ça me rend dingue, il faudrait qu’ils attendent là toute la nuit !, explique-t-il. Je refuse de voir mes parents traités comme des chiens ! Moi, je suis en bonne santé, je peux endurer. » Il a pris place à 3 heures du matin, ses parents viendront le relayer à 8 heures. « Faut que j’aille bosser... » (...)
Sans aucune discrétion, des vendeurs alpaguent ceux qui arrivent aux abords de la préfecture. Leur prix ? 15, 20, voire 50 euros pour une place aux premières loges. Des complices ont pris position dans les files, la veille, pour réserver à leur clientèle les meilleures places. (...)
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« Vous êtes journaliste ? Il faut un article, que les gens sachent ce qu’il se passe}} ici. Vous auriez dû venir avec des caméras de télé ! » Autour de lui, les gens s’animent. Ils veulent raconter leurs déboires. Être écoutés. Ils mettent beaucoup d’espoir dans ce qui sera un article parmi d’autres. Pour alerter l’opinion et faire pression sur les pouvoirs publics, tous veulent témoigner. Ça fuse de tous les côtés. Impossible de recueillir simultanément leurs déclarations. Conscients de la cacophonie, ils improvisent un porte-parole. « Chef ! Viens ici, il faut que tu parles à la journaliste ! » Un homme est désigné d’office, à cause de son sens de l’organisation. (...)
{{Un embouteillage volontaire pour limiter ce que l’on ne peut interdire}}(...)
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