
D’un côté, le formel Place to B, pensé pour l’émulation des journalistes, blogueurs et membres d’ONG. De l’autre, le Jardin d’Alice, convivial et un peu foutraque. Les militants du monde entier de passage à Paris pendant la COP s’adaptent à leurs qualités et à leurs défauts, entre activités intellectuelles et manuelles.
Devant un grand immeuble aux larges baies vitrées, deux imposants vigiles fouillent les sacs. Juste derrière eux, une jeune femme souriante accueille les visiteurs : « Bienvenue à Place to B ! » Après vérification sur sa longue liste d’inscription, elle ouvre une lourde porte avec son badge et laisse entrer les curieux dans le hall fourmillant de ce « lieu où il faut être ».
Pendant les deux semaines de la Conférence climat, l’auberge de jeunesse Saint Christopher Inn et le bar Belushi accueillent journalistes indépendants, blogueurs ou membres d’ONG venus des quatre coins du monde. Le lieu se pense comme un hub, une plate-forme d’échanges et de rencontres online et in live. « Nous avons besoin d’endroits pour nous retrouver, faire du réseau, partager des expériences », assure Boris, de l’association Etika Mondo. De passage pour un rendez-vous, il apprécie l’atmosphère « propice au hasard créatif ».
Complet depuis plusieurs semaines (...)
« C’est plus qu’un centre de presse, explique Sami, membre de la « Team » de Place to B. Nous voulons profiter d’avoir au même endroit toutes ces personnes différentes pour trouver des manières de parler différemment du climat. » Un « récit alternatif » qui se construit notamment au sein de la Creative Factory. (...)
« Zone de gratuité »
Le Jardin d’Alice, un immeuble associatif situé à Montreuil, est un autre point de rassemblement pendant la conférence climat. Le 1er octobre, le collectif d’artistes qui loue cet immeuble de 2.600 mètres carrés a ouvert tout le rez-de-chaussée aux militants.
Ici, pas besoin d’être inscrit sur une liste. La porte du bâtiment est grande ouverte. Dans l’entrée, des piles de tracts et brochures sur le climat ou les ZAD. Puis, une « zone de gratuité » où chacun peut prendre ou déposer livres et objets divers. Un peu plus loin, posées sur des grandes tables en bois, d’énormes marmites. (...)
« Ce n’est pas très organisé, mais le lieu fonctionne bien »
Un peu à l’écart, un groupe d’une dizaine d’Étatsuniens s’affairent. Il s’agit des militants de l’organisation 350.org, qui a choisi le Jardin d’Alice comme atelier. L’ONG Avaaz a aussi utilisé les locaux pour préparer le matériel de la marche pour le climat. Mais l’événement a été interdit, et remplacé par une chaîne humaine.
Du coup, les centaines de pancartes et de décorations en tout genre qui avaient été confectionnées pour l’occasion ont à peine servi. Elles sont maintenant empilées un peu partout. « Ça fait mal au cœur de voir tout le monde se donner autant de mal, alors que beaucoup de mobilisations n’auront pas lieu », se désole Leila, qui travaille à l’accueil des militants non parisiens. (...)
Assis à une table, cinq habitants de Notre-Dame-des-Landes discutent. Ils ont une idée d’action. Des séances de rire collectif devant les sièges sociaux des « sponsors » de la COP 21. Ils sont arrivés de la ZAD le samedi précédent avec le convoi de vélos et de tracteurs. N’ayant nulle part où aller, ils ont frappé à la porte du Jardin d’Alice. Même si des lieux comparables, comme l’Annexe, au Pré-Saint-Gervais, ont été perquisitionnés quelques jours avant. « Je n’ai pas vraiment peur de ça, confie Estelle, arrivée elle aussi de Notre-Dame-des-Landes. Je ne fais que fabriquer des vélos en carton. Et puis, on se sent en sécurité tous ensemble. » (...)