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l’Humanité
Palestine. La justice internationale va enquêter sur les crimes de guerre d’Israël
Article mis en ligne le 9 février 2021

Fatou Bensouda, la procureure de la Cour pénale internationale (CPI), créée en 2002 pour juger les crimes les plus terribles commis sur la planète, avait prévenu : elle voulait se pencher sur ceux commis lors de la guerre de l’été 2014 menée par Israël contre Gaza. Une offensive terrible contre des populations prisonnières d’un territoire minuscule et fermé, comme nous avions alors pu le constater sur place comme envoyé spécial de l’Humanité en pleine période de ramadan.

Un mois de bombardements incessants, de destructions de quartiers habités par des civils. Des familles entières forcées de fuir leurs maisons comme Madjid Djindiya, sa femme et leurs cinq enfants, dont nous avions publié le témoignage le 24 juillet 2014 : « Nous habitions près de la frontière, racontait-il. Nous avons vu les chars se positionner mais ils n’avançaient pas. Soudain, ça a été pire qu’en 2008-2009. Les missiles ont commencé à tomber, sans arrêt, et s’écrasaient sur les maisons. Nous ne pouvions plus rester. Nous sommes partis pieds nus. Pour sortir de Chudjaiya, nous avons dû marcher sur les corps des morts. J’ai même vu le cadavre d’un enfant sans tête. » (...)

jusqu’à présent, Israël n’a jamais été inquiété malgré les suspicions de crimes de guerre. Aucune enquête indépendante n’avait jamais réellement été diligentée, ni à Gaza ni en Cisjordanie. L’Autorité palestinienne (AP) avait bien saisi la Cour pénale internationale en 2009 après la guerre menée déjà contre la bande de Gaza. Mais elle avait été déboutée. Il lui aura fallu attendre 2012 sa reconnaissance en tant qu’État observateur de l’ONU pour adhérer, en 2015, à la CPI, malgré les menaces israéliennes et états-uniennes. L’AP saisit alors, en 2018, la Cour internationale pour « crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité » commis sur son territoire.
La colère de Netanyahou

En dépit des pressions exercées par le gouvernement de Donald Trump notamment contre Fatou Bensouda, les juges de la chambre préliminaire ont enfin décidé vendredi que la compétence de la CPI « s’étend aux territoires occupés par Israël depuis 1967, à savoir Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est ». Tout en prenant bien soin de préciser que cette cour « n’était pas constitutionnellement compétente pour statuer sur les questions de statut d’État qui lieraient la communauté internationale » et que « la chambre ne se prononce pas sur un différend frontalier en vertu du droit international ni ne préjuge de la question d’éventuelles futures frontières ».

Benyamin Netanyahou, le premier ministre israélien, a bien compris la portée d’une telle décision de la Cour pénale internationale. Celle-ci peut enquêter sur les crimes de guerre mais également sur la colonisation elle-même, le cœur du projet sioniste. (...)

il place de nombreux dirigeants européens dans une contradiction entre leur adhésion à la CPI (ce qui n’est pas cas d’Israël ni des États-Unis) et leur acceptation de l’idée que derrière la critique de la politique israélienne se cacherait en réalité un antisémitisme débridé. L’Union européenne est d’ailleurs bien silencieuse depuis l’annonce de la CPI. Ce qui n’est pas le cas de Washington, qui s’est dit « sérieusement préoccupé par les tentatives de la CPI d’exercer une juridiction sur les militaires israéliens », a expliqué le porte-parole du département d’État américain, Ned Price, de la nouvelle administration Biden. (...)

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(...) En se déclarant compétente, vendredi 5 février, pour enquêter sur d’éventuels crimes de guerre commis dans la bande de Gaza à l’été 2014, la Cour pénale internationale (CPI) a offert indirectement une victoire diplomatique de premier plan à l’Autorité palestinienne.

Notamment en précisant textuellement que "la juridiction territoriale de la Cour concernant la situation en Palestine (...) s’étend aux territoires occupés par Israël depuis 1967, à savoir Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est".

Alors même que la CPI a eu beau ajouter qu’avec sa décision, elle "ne statuait pas sur un différend frontalier en droit international ni ne préjugeait de la question de quelconques futures frontières", le Premier ministre palestinien, Mohammad Shtayyeh, a immédiatement salué, dans un entretien exclusif accordé à France 24, une décision qui équivaut à "une victoire et à une reconnaissance de l’État palestinien avec les frontières de 1967". (...)