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Les invisibles
paru dans CQFD n°86 (février 2011), rubrique Je vous écris de l’usine, par Jean-Pierre Levaray, illustré par Efix
Article mis en ligne le 14 mars 2011
dernière modification le 11 mars 2011

Pas toujours facile de parler de la sous-traitance dans une usine. Les salariés de ce secteur sont pourtant légion dans la chimie comme dans le nucléaire pour effectuer les tâches les plus complexes et les plus dangereuses dans des conditions de sécurité minimales.

Les salariés sous-traitants sont majoritairement précaires, mal payés et ils disparaissent de l’usine sans qu’on sache très bien ce qu’ils deviennent. De plus, il est souvent difficile de rentrer en contact avec eux parce qu’il y a plusieurs niveaux de sous-traitance dans une même boîte.(...)

EDF affecte, chaque année, de 25 000 à 30 000 de ces travailleurs précaires aux tâches sous rayonnements. C’est un véritable scandale sanitaire : ils reçoivent 80 % de la dose collective annuelle d’irradiation et ils ne sont pas comptabilisés dans les études épidémiologiques (...)

Philippe, avec sa longue chevelure d’indien, n’est pas du genre à se laisser faire. « Les sous-traitants sont devenus les garants de la sécurité des centrales. Si nous souffrons, les agents EDF, mais aussi les consommateurs souffriront. » Il milite donc, à la CGT, et se fait élire délégué du personnel, puis au CHS-CT. Là, il lance des alertes sur des fuites d’uranium et exerce son droit de retrait. Il envoie des courriers à l’inspection du travail ou à la CPAM, lorsqu’il a connaissance de faits graves, pour que tout soit archivé, connu et utilisable en cas de préjudice. Il a même fait arrêter un chantier sur une tranche de la centrale pour cause de contamination grave à la légionellose.(...)

« Les conditions de travail se sont terriblement dégradées depuis une bonne dizaine d’années. Les contrats de sous-traitance sont renégociés tous les trois, quatre ans, et la sécurité des travailleurs et leur santé sont souvent trop considérées comme une perte de temps, donc d’argent. Nous voulons obtenir des dispositifs de soins, de surveillance et d’indemnisation des victimes salariées de la sous-traitance, un suivi médical à vie, ainsi que pour nos enfants qui sont les enfants de l’atome. Dès que tu sors de l’entreprise, ajoute-t-il, on t’oublie, t’as plus de suivi. »(...)

L’inspection du travail a dressé un procès verbal pour non-déclaration et le patron d’Endel vient de se faire convoquer par le tribunal de grande instance. Un premier cap dans la reconnaissance de la dangerosité de ce travail vient peut-être d’être franchi. (...)

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