
Ecrivant depuis cette région [le Moyen-Orient] qui produit plus de clichés au centimètre carré que n’importe quelle autre, je devrais peut-être y réfléchir à deux fois avant de déclarer que je n’ai jamais lu autant de foutaises, autant de débilités absolues que ce que j’ai pu voir au sujet de la crise financière mondiale.
Et puis non, je ne m’abstiendrai pas. J’ai le sentiment que le journalisme censé traiter de l’effondrement du capitalisme a atteint de nouveaux tréfonds que même le Moyen-Orient ne peut surpasser en termes de soumission sans frein à ces institutions et à ces "spécialistes" de Harvard qui ont justement contribué à déclencher tout ce désastre criminel.
(...) Ce qui a poussé les Arabes à descendre par dizaines de milliers, puis par millions dans les rues des capitales du Moyen-Orient, c’est une dignité revendiquée, ainsi que le refus d’admettre que les dictateurs locaux et leurs familles étaient de fait les propriétaires de leurs pays. (...)
Les martyrs arabes contre la dictature sont morts pour prouver que ces pays appartenaient à leurs peuples. (...)
Et c’est là que réside le vrai parallèle avec l’Occident. Les mouvements de protestation visent effectivement le monde des affaires – une cause tout à fait juste – et les "gouvernements". En revanche, ce qu’ils ont découvert, un peu tard, certes, c’est que depuis des décennies, ils ont foi dans une démocratie frauduleuse (...)
Les banques et les agences de notation sont devenues les dictateurs de l’Ouest. Comme les Moubarak et les Ben Ali, elles croyaient – et continuent de croire – qu’elles étaient les propriétaires de leurs pays. Les élections qui leur donnent le pouvoir sont aujourd’hui aussi factices – à cause de la couardise et de la collusion des gouvernements – que celles auxquelles les Arabes ont été obligés de participer décennie après décennie afin de sacrer leurs propres propriétaires nationaux(...)