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Le ras-le-bol des enseignants japonais, victimes de surmenage
#japon #enseignants #karoshi
Article mis en ligne le 19 décembre 2022
dernière modification le 18 décembre 2022

Dans l’une des dernières notes de son journal intime, Yoshio Kudo, professeur de collège japonais, se plaignait de journées de travail se terminant parfois à minuit. Deux mois plus tard, il a été victime de "karoshi", la mort due au surmenage.

Ses horaires étaient loin d’être une exception au Japon, où les enseignants sont accablés d’autres tâches allant de la supervision du nettoyage ou des trajets scolaires aux activités après l’école.

Une étude de l’OCDE publiée en 2018 a révélé que les enseignants des collèges japonais travaillaient 56 heures par semaine, contre une moyenne de 38 heures ailleurs.

Mais ce chiffre ne tient pas compte des heures supplémentaires. Une enquête d’un groupe de réflexion lié à un syndicat a montré que les enseignants effectuaient en moyenne 123 heures supplémentaires par mois, un chiffre qui dépasse largement le "seuil karoshi" de 80 heures.

Des enseignants approchant le point de rupture ont attaqué en justice des collectivités locales. Le parti au pouvoir au Japon a lancé cette année un groupe de travail sur la question.

Trop tard pour Yoshio Kudo, décédé d’une hémorragie cérébrale à 40 ans en 2007. (...)

Pour s’attaquer au problème, les autorités ont ordonné des mesures, notamment l’externalisation et la numérisation de certaines tâches.

"Nos mesures visant à réformer les conditions de travail des enseignants progressent régulièrement", a assuré la ministre de l’Education Keiko Nagaoka en octobre au Parlement.

Mais elle a reconnu que nombre d’entre eux "continuent à travailler de longues heures" et que "les efforts doivent s’accélérer".

Si une enquête du ministère de l’Education montre une diminution progressive des heures supplémentaires, des experts ne voient guère de changement fondamental.

Des tâches administratives à la distribution de repas, en passant par la surveillance des enfants sur le chemin de l’école, les enseignants japonais "sont en quelque sorte devenus des hommes à tout faire", affirme Masatoshi Senoo, conseiller en gestion scolaire. (...)

En juin, M. Nishimoto, 34 ans, a gagné son procès pour obtenir compensation du stress dû au surmenage. Il avait frôlé la dépression nerveuse en 2017 quand, superviseur du club de rugby, il avait effectué 144 heures supplémentaires en un mois. (...)

Selon des experts, les enseignants sont particulièrement vulnérables au surmenage en raison d’une loi ancienne les empêchant d’être compensés pour leurs heures supplémentaires.

La loi ajoute huit heures de rémunération supplémentaire à leur salaire mensuel, un cadre qui, selon M. Nishimoto, a pour conséquence de "faire travailler les enseignants sans limite pour un salaire fixe". (...)