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Le Monde
Le climat trop peu enseigné, de l’école à l’université
Article mis en ligne le 24 mars 2019
dernière modification le 23 mars 2019

De plus en plus d’enseignants et de chercheurs s’élèvent contre la place insuffisante accordée au changement climatique dans les programmes scolaires.

A aucun moment les programmes ne permettent de comprendre qu’un ensemble de crises est en train de converger, encore moins d’en saisir la gravité et les conséquences pour nos sociétés. » Justine Renard, 28 ans, fait partie du collectif des « enseignants pour la planète », créé fin janvier pour préparer la journée de grève scolaire mondiale pour le climat qui s’est tenue le 15 mars et a mobilisé 1,4 million de jeunes dans le monde. (...)

Depuis plusieurs mois, l’inquiétude des professeurs, en particulier ceux du secondaire, s’amplifie, relayée par des scientifiques et des chercheurs. « Le temps consacré à l’enseignement en relation avec les deux enjeux vitaux à l’échelle planétaire, l’effondrement de la biodiversité et le changement climatique, apparaît très insuffisant au collège comme au lycée », alertent 350 experts, parmi lesquels la climatologue Valérie Masson-Delmotte, dans une lettre publiée par Mediapart en décembre 2018. (...)

un apprentissage « approfondi et régulier » depuis le plus jeune âge est essentiel pour être « armé face aux “fake news” ou au climatoscepticisme ».

Portion congrue
De fait, le sujet est abordé de façon très inégale dans les programmes scolaires. Depuis la réforme du collège de 2016, les professeurs délivrent quelques cours sur la variabilité naturelle du climat, les grandes glaciations ou la différence entre météo et climat.

« On évoque la cause anthropique du changement climatique à l’œuvre mais très vaguement les gaz à effet de serre », reconnaît Serge Lacassie, le président de l’Association des professeurs de biologie et de géologie (...)

Avec la réforme du baccalauréat, les enseignants s’inquiètent que le climat reste limité à la portion congrue dans les nouveaux programmes de lycées, qui doivent entrer en vigueur en 2019 et 2020. Rien n’apparaît sur le sujet en seconde. En première, « seul le bilan d’énergie de la Terre est abordé de façon théorique, comme on aurait pu le faire dans les années 1970 », note Valérie Masson-Delmotte. (...)

C’est en terminale, au cours de l’enseignement commun scientifique, que l’enjeu du changement climatique doit normalement être développé. Le programme, en cours d’élaboration par un groupe d’experts, devrait être examiné et voté en mai et juin par les membres du Conseil supérieur des programmes. Selon les participants à une réunion de travail qui s’est tenue le 19 mars, un tiers de cet enseignement, soit deux heures par semaine, pourrait être consacré à la thématique « climat et société ».

« Décloisonner les disciplines »
« On a sauvé les meubles in extremis, mais il manque une vision d’ensemble. C’est loin d’être satisfaisant. Quant au collège, c’est le parent pauvre en matière de climat », déplore David Wilgenbus, directeur de l’Office for Climate Education, une organisation chargée de promouvoir et développer l’éducation au changement climatique. Finalement, « c’est à l’école primaire que les projets de sensibilisation sont les plus intéressants », juge-t-il. (...)

Ces critiques se font entendre dans de nombreuses disciplines. La question du réchauffement climatique relève en effet tant des SVT que de la physique, de l’économie, de l’histoire-géo, voire de la philosophie…

« Le climat est un sujet complexe, qu’il faut penser de façon systémique en décloisonnant les disciplines », explique Pierre Lena, astrophysicien et membre de l’Académie des sciences qui participe à l’élaboration du programme scientifique de Terminale. (...)

« Pour les élèves de seconde c’est carrément un retour en arrière. Il y a un chapitre intitulé “la forêt amazonienne : un environnement fragile soumis aux pressions et aux risques”, dans lequel on oublie de dire que les pressions viennent de l’activité humaine », s’indigne l’enseignante. Autre exemple : le chapitre consacré aux mobilités. « Pourquoi les migrations liées au climat n’apparaissent pas, alors qu’elles sont de plus en plus nombreuses et vont augmenter dans les années à venir ? », s’interroge-t-elle.

Mieux informer les jeunes sans les désespérer (...)

« A ceux qui se montrent angoissés de la fin du monde, je leur réponds que c’est seulement la fin d’un monde. »