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le Monde Diplomatique
Immigrés dans les rets de la mafia calabraise
Article mis en ligne le 23 décembre 2010
dernière modification le 21 décembre 2010

La petite ville italienne de Rosarno se prépare au retour des travailleurs saisonniers, chassés au cours des émeutes de janvier 2010. Les médias avaient alors dénoncé le « racisme » de la population : un retour sur les lieux permet de découvrir d’autres raisons aux violences.

(...) Pourquoi les événements de Rosarno ont-ils éclaté en 2010 alors que la situation économique et les conditions de vie des ressortissants extracommunautaires posent problème depuis la fin des années 1990 ? La presse italienne et internationale n’a perçu dans cette fureur collective qu’une réaction xénophobe. « Emeutes racistes » ; « chasse aux immigrés ». L’Italie, « un pays uni par le racisme », a pu écrire The Guardian (10 janvier 2010). Ce seul motif suffit-il à rendre compte d’un tel déchaînement ?

A partir de 2008-2009, tandis que se concentrait dans la plaine de Gioia Tauro une main-d’œuvre toujours plus nombreuse, exploitée notamment par la ’Ndrangheta (la mafia calabraise), la filière des agrumes entrait dans une crise majeure. « La chute, constante, du prix des oranges d’industrie utilisées pour la transformation en jus — l’essentiel de la production de la plaine — est devenue vertigineuse, descendant jusqu’à 5 centimes d’euros le kilo, explique M. Antonino Inuso, président de la Confédération italienne des agriculteurs (CIA) de la province de Reggio di Calabria. Rien qu’au second semestre 2009, le revenu moyen des agriculteurs de la plaine a diminué de 25 %. »

(...) Toute la filière est corrompue par le monopole mafieux : « Un kilo d’oranges de table, explique M. Bagnato, est vendu 50 centimes par le cultivateur au commerçant. Ce tarif est imposé par la mafia. Aucun agriculteur ne trouvera à vendre sa production plus cher. Dans ce prix, 8 centimes représentent le coût du travail — 4 centimes, lorsque ce dernier s’effectue au noir… En bout de chaîne, ce kilo peut être revendu entre 2 et 2,50 euros au supermarché. » (...)

Ce n’est pas tout. Vétéran de la lutte antimafia et procureur de la République du tribunal de Palmi — dont la juridiction s’étend sur le territoire de la plaine de Gioia Tauro —, M. Giuseppe Creazzo égrène les méthodes qui permettent à la ’Ndrangheta de détourner des fonds publics — régionaux, nationaux et… européens. (...)

Ces divers éléments — et pas seulement le racisme — ont porté à l’incandescence les tensions entre les différents groupes sociaux, notamment les petits agriculteurs et les travailleurs migrants. Mais la ’Ndrangheta continue d’exercer son contrôle sur le territoire. Et d’engranger ses profits sur le dos de tous.

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