L’affrontement était annoncé. Nous y sommes et nul ne sait comment la situation va évoluer. Les violences ont toutes les chances d’éclater devant tant d’obstination, si Blaise Compaoré ne se retire pas. A l’heure où nous écrivons il nous revient que des affrontements ont eu lieu ce matin du 28 octobre à l’issue de l’immense manifestation qui a parcouru les rues de Ouagadougou.
Bien qu’au pouvoir depuis 27 ans, Blaise Compaoré pense être le seul à pouvoir diriger le pays. Il est pourtant en train de nous démontrer en direct qu’il le mène au chaos, à la violence.
Et pour cause. Depuis plusieurs années, Blaise Compaoré nous a été présenté comme le seul capable de maintenir la paix dans la région. Fort de réseaux de soutiens divers, ce qui va de pair avec un portefeuille bien garni, il n’a cessé ces derniers temps de recevoir des prix, la liste est longue, d’ « homme de paix ». Une carrière qui s’est finalement interrompue, il y a peu, récusé par la partie malienne dans les négociations pour mettre fin au conflit qui déchire le nord du Mali. En effet Blaise Compaoré a fini par apparaître trop proche de MNLA, dont les dirigeants tiennent leur réunion à Ouagadougou. Il était déjà, par le passé, apparu proche aussi d’Ansar Dine, ce qui n’avait pourtant pas empêché que sa médiation soit imposée par les dirigeants de la CEDEAO et de la France.
Il a fini par croire à toutes les chimères qu’on disait de lui. Il était même invité régulièrement pour raconter son expérience devant des parterres de diplomates. Sans doute a-t-il fini par se croire indispensable pour maintenir la paix dans la région… et dans son pays.
Un petit rappel de la sinistre carrière de déstabilisateur de Blaise Compaoré
Alors il convient encore une fois ici de rappeler sa sinistre carrière de déstabilisateur de la région, trafiquant de diamant, et champion du contournement des embargos décidés par l’ONU. Et alors que les dirigeants de l’ONU louaient ses qualités d’homme de paix, les experts de l’ONU publiaient régulièrement des rapports qui prouvaient le contraire.
Nous ne donnerons ici que quelques exemples de son passé. (...)
Ce très lourd passé aurait dû lui valoir un procès devant la cour pénale ou une autre juridiction internationale. Mais il a pourtant bénéficié de soutiens importants et particulièrement en France. Nous avions souligné dans un article publié en juin 2012, sous le titre « Métamorphoses du président Blaise Compaoré, Le Burkina Faso, pilier de la Françafrique » dans le Monde Diplomatique (...)
Alors qui peut mettre fin au délire actuel de Blaise Compaoré ?
Une bien timide diplomatie internationale, qui sait ailleurs se montrer plus guerrière
Le peuple burkinabè prend ses responsabilités, un peuple qui retrouve sa fierté et sa dignité en se retrouvant massivement dans les rues, une fierté et une dignité qu’il avait quelque peu perdues depuis l’assassinat de Thomas Sankara. Et c’est à ce peuple que reviendra la victoire, mais il faut éviter que le prix soit trop lourd. C’est ce peuple qui contraint les diplomaties occidentales à publier des déclarations encore bien tièdes.
Du côté français, les déclarations publiées jusqu’ici restent ambigües (...)
Plus grave du côté de l’Union européenne, la déclaration ci-dessous semble renvoyer dos à dos, le pouvoir et l’opposition : Soucieuse de la stabilité et de l’approfondissement de la démocratie au Burkina Faso comme en Afrique de l’ouest plus généralement, l’Union européenne en appelle au sens de la responsabilité de tous les acteurs, compte tenu des initiatives annoncées pour les prochains jours par les autorités du Burkina Faso, les partis politiques et la société civile. Elle invite chacun à contribuer à la libre expression des opinions dans un climat apaisé, ouvert et respectueux des différences, renforçant ainsi l’unité nationale et le consensus politico-social." (...)
La communauté internationale a su être plus vindicative lorsqu’il s’est agi de se débarrasser de dictateurs. Blaise Compaoré confirme qu’il en est un. Il a su soigner les apparences pour ceux qui ont feint de ne rien voir. La réalité éclate en plein jour pour ceux qui ont joué les aveugles (...)
Le peuple du Burkina a largement exprimé ses choix, mais il a maintenant besoin de soutien à l’extérieur. Inutile d’attendre les premiers morts pour signifier à Blaise Compaoré qu’il doit partir.