
Au bord du gouffre, le personnel soignant poursuit sa grève dans toute la France. Les urgentistes ont appelé, mardi, à un débrayage symbolique de cinq minutes devant tous les hôpitaux.
Débutée à Paris à la mi-mars, la grève des professionnels paramédicaux (infirmiers, brancardiers, aide-soignants…) ne cesse de s’étendre. De Strasbourg à Marseille, en passant par Lyon, elle concerne désormais 65 services dans toute la France, selon le collectif Inter-Urgences. Mardi 28 mai, les urgentistes ont appelé à un débrayage symbolique de cinq minutes devant tous les hôpitaux. Pour le personnel, le constat est le même : le manque d’effectifs contraint les soignants à aller toujours plus vite, quitte à expédier les patients. En parallèle, l’attente toujours plus longue dans les services entraîne parfois une colère chez ces derniers.
Une exaspération qui tourne parfois à l’agression, comme le rapporte Abdel Dougha, aide-soignant de nuit à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, interrogé par France 24. "Avec l’attente, certains patients deviennent agressifs. Parfois cela vire à l’agression physique, sans compter les crachats et les insultes. (...)
Dans la foulée, le collectif Inter-Urgences s’est créé, rassemblant l’ensemble des soignants en grève de l’AP-HP (Assistance publique - Hôpitaux de Paris). Leurs revendications ? L’arrêt des fermetures de lits, une hausse des rémunérations de 300 euros net et une augmentation des effectifs.
"On ne peut pas soigner si les soignants eux-mêmes ne vont pas bien. L’un ne va pas sans l’autre", résume pour France 24 Aura, aide-soignante depuis plus d’un an à l’hôpital Bichat, à Paris. "On manque de moyens humains, de moyens matériels, et de reconnaissance. Allez voir un peu ce qui se passe dans les hôpitaux ! Dans tous les services, la prise en charge des patients s’est abîmée", explique-t-elle.
21 millions de passages aux urgences (...)
Voulant apaiser les tensions, le directeur général de l’AP-HP, Martin Hirsch, avait annoncé le 18 avril un renforcement de "10 % des effectifs" ainsi qu’une prime dangerosité multipliée par dix. Celle-ci passerait ainsi de 5,76 euros à "environ 60 euros". Des mesures jugées insuffisantes par le personnel soignant.
Si la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a assuré lundi "entendre la fatigue et l’agacement" des urgentistes, elle admet toutefois qu’il n’y a "pas de solution miracle" tant qu’il "n’y a pas plus" de personnel formé. Mais un cercle vicieux semble s’être insidieusement installé : puisque le manque de moyens entraîne à la fois frustration et colère des patients comme des soignants, la profession pourrait avoir du mal à susciter des vocations.
"Donnez-nous les moyens d’être humains"
Cependant la ministre l’assure : "Il y aura dans les années qui viennent 400 urgentistes formés par an qui vont se déployer sur le territoire, donc cette période de tension devrait s’apaiser dans les années qui viennent". Une déclaration qui peine à convaincre les principaux intéressés.
Quelque 200 soignants des urgences hospitalières se sont rassemblés, samedi 25 mai, pour la première fois depuis le début de la grève. Pour chacun, l’enjeu consiste à structurer le mouvement pour faire front commun face au ministère de la Santé.