
Un rapport sénatorial publié ce mercredi confirme une fraude massive, en 2022, des concurrents d’EDF. À la clé, plus d’1,6 milliard d’euros d’amende. Pour mettre fin à ce scandale, les parlementaires proposent 25 mesures législatives.
En plein emballement des marchés de l’énergie à l’automne 2022, de premiers indices laissaient entendre que certains fournisseurs alternatifs de courant étaient en train d’empocher un sacré pactole en surfant sur les suites de l’invasion russe en Ukraine et en tirant parti des règles françaises alambiquées de l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité.
Avec, au centre de ces présomptions, l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Ce dispositif mis en place par l’État fournit de l’électricité nucléaire produite par EDF à moindre prix à ses concurrents afin que ces derniers se fassent une place au soleil de la concurrence.
Pour créer artificiellement la concurrence
Quelle est l’ampleur de ces superprofits ? Y a-t-il eu fraude ? La sénatrice LR Dominique Estrosi Sassone et son homologue PCF Fabien Gay ont mené l’enquête au sein d’une mission parlementaire sur « les conditions d’utilisation de l’Arenh ». Six mois plus tard, leurs travaux, rendus publics ce mercredi, assortis de recommandations votées à l’unanimité, dressent un constat affligeant.
Soixante-douze fournisseurs sur 100 ont abusé de l’Arenh, selon les contrôles effectués par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Une fraude pour laquelle ils se sont vus infliger une amende globale de plus de 1,6 milliard d’euros. De quoi faire mentir la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, qui ne voyait dans l’Arenh qu’ un instrument au service des consommateurs.
Pour mieux comprendre ce scandale, il faut se pencher sur ce mécanisme dont la France a le secret. Pour créer artificiellement la concurrence sur le secteur de l’électricité et permettre aux nouveaux fournisseurs d’être rentables, l’Arenh plume EDF en octroyant une partie de l’électricité nucléaire produite par le groupe public, à prix canon, à ces fournisseurs dits alternatifs.
Récupérer l’électricité à bas prix et la revendre sur les marchés
Créé en 2011, le prix fixé au départ à 32 euros le mégawattheure (MWH) a progressé pour atteindre 42 euros en 2012, sans bouger ensuite. Charge à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) de répartir les térawattheures (TWh) mis à disposition par EDF entre les différents acteurs du marché.
Seulement, à la suite de la guerre en Ukraine, le mécanisme a été modifié par le gouvernement pour lutter contre l’envolée des prix, entre avril et décembre 2022. L’exécutif espérait alors qu’en octroyant aux concurrents d’EDF 19,5 TWh supplémentaires, au prix de 46,20 euros/MWh, cette énergie bon marché permettrait d’atténuer la pression sur les prix qui avaient atteint sur le marché de gros jusqu’à 700 euros/MWh. Si ce relèvement a permis de contenir, en partie, la hausse des tarifs, notent les sénateurs, ses effets pervers et l’avidité des bénéficiaires ont noirci le tableau. (...)
En très peu de temps, la décision du gouvernement a transformé l’Arenh en mine d’or pour certains fournisseurs, n’hésitant pas à frauder pour mieux spéculer sur les marchés. Pour EDF, ce fut un gouffre financier. (...)
Cette pratique illégale ne se limite pas à une simple fraude commerciale, puisqu’elle a également pour effet d’augmenter les tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE). Schématiquement, plus les volumes demandés par les concurrents d’EDF sont conséquents, plus le TRVE est élevé.
Ce qui a nécessairement un impact sur les factures d’électricité des ménages. (...)
Les mêmes fraudes en 2023 (...)
Parmi les 100 fournisseurs ayant bénéficié de l’Arenh en 2022 (…) 58 sont redevables d’un CP1. » Ceux-ci se sont vus infliger une pénalité de 1,6 milliard d’euros.
« Quatorze fournisseurs sont redevables du terme CP2 », avec une pénalité de 21,9 millions d’euros, note la CRE dans une délibération datée du 29 juin. Quatre d’entre eux font l’objet d’une enquête.
Ces fraudes seraient cependant encore sous-estimées, estime le sénateur communiste Fabien Gay, tant les paramètres de contrôle sont « limités », précise-t-il. Parmi les 100 fournisseurs ayant bénéficié de l’Arenh en 2022 (…) 58 sont redevables d’un CP1. » Ceux-ci se sont vus infliger une pénalité de 1,6 milliard d’euros.
« Quatorze fournisseurs sont redevables du terme CP2 », avec une pénalité de 21,9 millions d’euros, note la CRE dans une délibération datée du 29 juin. Quatre d’entre eux font l’objet d’une enquête.
Ces fraudes seraient cependant encore sous-estimées, estime le sénateur communiste Fabien Gay, tant les paramètres de contrôle sont « limités », précise-t-il. (...)