
François Bayrou a livré des orientations budgétaires pour 2026 et s’est livré à un exercice d’instrumentalisation de la dette publique pour tenter de justifier ses propositions. Celles-ci s’appuient sur un dogme, le refus de procéder à une réforme fiscale, et poursuivent un autre objectif : affaiblir davantage les services publics et la protection sociale, quitte à augmenter encore la pauvreté et les inégalités. Un autre budget est vital !
Une dette creusée par l’injustice fiscale
François Bayrou a pris la parole devant le slogan « Le moment de vérité », mais il a dramatisé à outrance la situation (« notre pronostic vital comme État est engagé ») et son constat de départ ne correspond pas à la vérité.
Depuis 2017 la dette publique a été creusée par les baisses d’impôts dont ont bénéficié les plus riches et les grandes entreprises. Attac a montré dans son rapport sur « La dette de l’injustice fiscale » que depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, les baisses d’impôts et de prélèvements représentent au moins 308 milliards d’euros de manque à gagner pour les finances publiques, dont 207 milliards d’euros de cadeaux fiscaux aux plus riches et aux grandes entreprises.
Contrairement à une idée fausse très répandue, et répétée cet après-midi par François Bayrou (« nous sommes devenus accros à la dépense publique ») la hausse de la dette ne procède pas d’une hausse des dépenses publiques qui sont en réalité très stables : entre 2017 et 2024, elles sont en effet passées de 57,7% du PIB à 57,2% du PIB. La hausse de la dette publique vient essentiellement d’une baisse des recettes : entre 2017 et 2024, les recettes publiques sont passées de 54,3 % du PIB à 51,4% selon l’INSEE.
C’est aussi ce que montre une note de l’Observatoire français des conjonctures économiques publiée le 11 juillet 2025 (...)
Haro sur les services publics et la protection sociale
S’il a prétendu « agir avec justesse et justice » et que son plan prévoit un « effort supportable par tous », il va en réalité réduire le pouvoir d’achat des plus pauvres, des fonctionnaires, des retraité·es... tout en épargnant ceux qui peuvent le plus contribuer à l’effort et qui se sont considérablement enrichis ces dernières années sur le dos de la population.
Conscient de devoir donner des gages aux partisan·es de la justice fiscale, le Premier ministre a lourdement insisté sur le fait que « tout le monde devra participer à l’effort ». François Bayrou a annoncé une très vague et non chiffrée lutte contre « l’optimisation abusive des patrimoines non productifs ». Ne nous y trompons pas : il s’agira d’une contribution purement symbolique des ultra-riches, bien loin de ce que rapporterait la taxe Zucman et qui ne règlera pas le problème qu’elle prétend combattre, puisque les ultra-riches continueront de payer moins d’impôts que le reste de la population. Quant aux propos imprécis sur la fraude et les niches fiscales, deux chantiers majeurs, ils relèvent principalement de la stratégie de communication.
En refusant de réformer le système de prélèvements obligatoires, le gouvernement s’apprête à instaurer une austérité qui s’annonce d’ores et déjà économiquement contre-productive et socialement injuste. Il s’agit en somme de maintenir les acquis fiscaux des plus riches. (...)
Et c’est via ce système injuste que le gouvernement s’apprête à financer le « réarmement » annoncé par Emmanuel Macron le 13 juillet à hauteur de 6,5 milliards d’euros en deux ans. C’est d’ailleurs cette hausse des dépenses militaires qui justifie selon le Premier ministre un plan d’économies de 43,8 milliards au lieu des 40 milliards évoqués jusqu’ici.
Le budget proposé par François Bayrou se traduirait par un nouvel affaiblissement des services publics (suppression de 3000 postes de fonctionnaires via le non remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite, suppressions d’agences) ainsi qu’une nouvelle étape de privatisations (cessions de parts dans les entreprises publiques).
Cela provoquerait également un affaiblissement de la protection sociale : sous couvert de « responsabilisation des patients », il a ainsi annoncé un « effort de l’ordre de 5 milliards d’euros » sur les dépenses de santé, via de nouveaux déremboursements de médicaments, des économies sur les malades souffrant d’affections de longue durée et les arrêts-maladie... Ainsi, certains médicaments des personnes atteintes d’affection de longue durée ne seront plus remboursés à 100 % par la Sécurité sociale, ce qui signifie qu’il faudra prendre une complémentaire santé : mieux vaudra être riche pour avoir une couverture sociale digne de ce nom.
François Bayrou a confirmé que 2026 serait une « année blanche ». Concrètement, le gel des prestations sociales se traduira par une baisse du revenu des bénéficiaires des prestations concernées. Au surplus, le gel du barème de l’impôt sur le revenu rendra mécaniquement imposables des foyers fiscaux qui, actuellement, ne le sont pas en raison de revenus trop faibles. 500 000 à 600 000 foyers fiscaux pourraient être concernés. Cette mesure ajouterait à l’injustice fiscale d’un système déjà régressif.
Par ailleurs, en annonçant la suppression de deux jours fériés (il propose le lundi de Pâques et le 8 mai qui, rappelons-le, est devenu un jour férié en France suite à la capitulation de l’Allemagne nazie en 1945) François Bayrou revisite la formule de Nicolas Sarkozy : « il faut travailler plus »... pour les riches ! Car il s’agirait de rembourser la dette creusée par les cadeaux fiscaux faits aux riches et aux grandes entreprises.
Il semble tenir les chômeur·ses pour responsables du chômage, et annonce une énième réforme de l’assurance-chômage, alors que les précédentes ont précarisé les chômeur·ses et n’ont eu aucun effet sur l’emploi.
Le premier ministre a également annoncé son intention de « moins faire peser sur le travail le financement de la protection sociale » : sans le dire, cela ouvre la voie à une mesure de « TVA sociale », c’est-à-dire une hausse de la TVA en contrepartie d’une réduction des cotisations sociales. Or la TVA est déjà l’impôt le plus injuste puisqu’elle représente une part plus importante du revenu des ménages pauvres que de celui des ménages aisés.
Le gouvernement fait donc sciemment le choix de prélever, via l’austérité, une partie du pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes.
Un autre budget est vital
François Bayrou a conclu en affirmant que « toutes les idées d’améliorations seront bienvenues » . Chiche ! Attac a de nombreuses propositions pour rendre ce budget juste. (...)
Et c’est via ce système injuste que le gouvernement s’apprête à financer le « réarmement » annoncé par Emmanuel Macron le 13 juillet à hauteur de 6,5 milliards d’euros en deux ans. C’est d’ailleurs cette hausse des dépenses militaires qui justifie selon le Premier ministre un plan d’économies de 43,8 milliards au lieu des 40 milliards évoqués jusqu’ici.
Le budget proposé par François Bayrou se traduirait par un nouvel affaiblissement des services publics (suppression de 3000 postes de fonctionnaires via le non remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite, suppressions d’agences) ainsi qu’une nouvelle étape de privatisations (cessions de parts dans les entreprises publiques).
Cela provoquerait également un affaiblissement de la protection sociale : sous couvert de « responsabilisation des patients », il a ainsi annoncé un « effort de l’ordre de 5 milliards d’euros » sur les dépenses de santé, via de nouveaux déremboursements de médicaments, des économies sur les malades souffrant d’affections de longue durée et les arrêts-maladie... Ainsi, certains médicaments des personnes atteintes d’affection de longue durée ne seront plus remboursés à 100 % par la Sécurité sociale, ce qui signifie qu’il faudra prendre une complémentaire santé : mieux vaudra être riche pour avoir une couverture sociale digne de ce nom.
François Bayrou a confirmé que 2026 serait une « année blanche ». Concrètement, le gel des prestations sociales se traduira par une baisse du revenu des bénéficiaires des prestations concernées. Au surplus, le gel du barème de l’impôt sur le revenu rendra mécaniquement imposables des foyers fiscaux qui, actuellement, ne le sont pas en raison de revenus trop faibles. 500 000 à 600 000 foyers fiscaux pourraient être concernés. Cette mesure ajouterait à l’injustice fiscale d’un système déjà régressif.
Par ailleurs, en annonçant la suppression de deux jours fériés (il propose le lundi de Pâques et le 8 mai qui, rappelons-le, est devenu un jour férié en France suite à la capitulation de l’Allemagne nazie en 1945) François Bayrou revisite la formule de Nicolas Sarkozy : « il faut travailler plus »... pour les riches ! Car il s’agirait de rembourser la dette creusée par les cadeaux fiscaux faits aux riches et aux grandes entreprises.
Il semble tenir les chômeur·ses pour responsables du chômage, et annonce une énième réforme de l’assurance-chômage, alors que les précédentes ont précarisé les chômeur·ses et n’ont eu aucun effet sur l’emploi.
Le premier ministre a également annoncé son intention de « moins faire peser sur le travail le financement de la protection sociale » : sans le dire, cela ouvre la voie à une mesure de « TVA sociale », c’est-à-dire une hausse de la TVA en contrepartie d’une réduction des cotisations sociales. Or la TVA est déjà l’impôt le plus injuste puisqu’elle représente une part plus importante du revenu des ménages pauvres que de celui des ménages aisés.
Le gouvernement fait donc sciemment le choix de prélever, via l’austérité, une partie du pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes.
Un autre budget est vital
François Bayrou a conclu en affirmant que « toutes les idées d’améliorations seront bienvenues » . Chiche ! Attac a de nombreuses propositions pour rendre ce budget juste. (...)
récupérer 40 milliards dès 2026 sans impacter les classes populaires et moyennes et sans mettre les PME à contribution :
– la taxe Zucman, que le Sénat a rejeté en juin, rapporterait entre 15 et 25 milliards et viendrait corriger une anomalie : les 0,1% les plus riches payent proportionnellement moins d’impôts que le reste de la population. (...)
- dans sa note « Qui veut gagner des milliards ? En finir avec les niches fiscales injustes », Attac montre qu’il est possible de récupérer de 17 à 19 milliards à court terme en remettant en cause les « niches climaticides » et en procédant à une revue des niches les plus coûteuses et injustes. A elles-seules, ces deux mesures rapportent déjà 40 milliards.
Il faut cependant aller plus loin en réorientant profondément la politique fiscale à l’œuvre depuis 2017. Les 4 rapports du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital, nommé par Emmanuel Macron pour évaluer les effets de la transformation de l’ISF en IFI et de la création de la flat tax, ont montré que ces mesures n’ont eu aucun effet sur les investissements ou l’emploi, mais ont creusé les inégalités en faveur des plus riches. Au lieu de demander des sacrifices à l’ensemble de la population, il est temps de revenir sur ces cadeaux fiscaux injustes et inefficaces et de réhabiliter les objectifs historiques de la politique fiscale : financer l’action publique et réduire les inégalités.
A moyen et long termes, bien d’autres mesures pourraient donc permettre de financer les urgences sociales et la bifurcation écologique :
– un ISF rénové rapporterait 10 à 15 milliards d’euros ;
– la suppression de la flat tax, pour rétablir la progressivité de l’imposition des revenus financiers, rapporterait 9 milliards selon l’Institut des politiques publiques ;
– la taxation unitaire, pour mettre fin à l’évasion fiscale des multinationales, rapporterait 18 milliards ;
– et si le gouvernement veut vraiment réduire les dépenses publiques, il pourrait s’attaquer au 1er Budget de l’État (...)
L’austérité n’est pas une fatalité, un autre budget est possible et nécessaire !
Lire aussi :
– (Mediapart, abonnés)
Taper encore sur les plus précaires, une absurdité politique et économique
Le retour d’une idée fixe. Pour trouver des milliards d’économies et tenter de relancer une production économique en berne, François Bayrou a repris mardi 15 juillet deux des grands principes guidant le macronisme depuis ses origines : réduire les droits des chômeurs et des chômeuses et réformer le Code du travail.
Au-delà de la spectaculaire proposition de supprimer deux jours fériés ou de l’idée plus discrètement avancée de payer les salarié·es acceptant de renoncer à une semaine de congés payés, ce sont les deux invariants de la « politique de l’offre » défendue contre vents et marées par Emmanuel Macron qui sont réintroduits dans le débat.
Le premier ministre a annoncé qu’il souhaite lancer « un nouveau chantier sur l’assurance-chômage », en assurant, sans plus de précisions, que « beaucoup d’analyses indiquent qu’elle porte une responsabilité » dans la situation économique. Second chantier : remettre sur l’ouvrage la réforme du droit du travail actée dès l’automne 2017 par les « ordonnances Macron », qui avaient mis à bas des pans entiers du Code du travail, afin d’« améliorer les conditions de travail pour tous, faciliter les recrutements » et « augmenter les offres de travail ». (...)
Durcir les règles n’est pas efficace
Rien n’entravera la volonté politique d’économiser des milliards sur le dos des plus précaires. Tant pis si le taux de chômage est orienté à la hausse, atteignant 7,4 % de la population active au premier trimestre 2025, et si l’Observatoire française des conjonctures économiques (OFCE) prévoit une hausse à 7,7 % à la fin de l’année et à 8,3 % fin 2026. Tant pis s’il y a dix-huit mois, deux services du ministère du travail mettaient en doute la pertinence de ce nouveau durcissement des règles sur les plans économique, juridique et politique.
Et tant pis si l’entêtement gouvernemental vient torpiller ce qui était l’argument principal de la réforme de 2023, basée sur l’idée d’une modulation des allocations-chômage selon la conjoncture économique, appelée « contracyclicité » dans le jargon technocratique.
« Quand ça va bien, on durcit les règles, et quand ça va mal, on les assouplit », promettait en juillet 2022 Emmanuel Macron. Mais après avoir baissé les droits quand la conjoncture s’améliorait, on va continuer à les dégrader alors que les temps se font plus durs.
Une absurdité politique et économique. On ne trouve plus de spécialiste de l’emploi pour affirmer que durcir les règles de l’assurance-chômage a un quelconque effet sur la création d’emplois. (...)
l’Unedic indique qu’en moyenne, les chômeurs et chômeuses ne consomment que 60 % de leurs droits avant de retrouver un emploi.
Au vu de ces chiffres, comment croire qu’un nouveau tour de vis va changer la donne et précipiter des centaines de milliers de chômeurs et chômeuses vers l’emploi, alors même qu’on comptabilise moins de 485 000 postes vacants, loin d’ailleurs d’être tous à temps complet ?
« Pour jouer son rôle d’amortisseur économique en cas de crise, l’assurance-chômage a besoin de stabilité », plaidait encore le 11 juillet Christophe Valentie, directeur général de l’Unédic, demandant implicitement de renoncer à une nouvelle réforme. Il n’a pas été entendu.
Ruptures conventionnelles et Code du travail dans le viseur
Le gouvernement entend aller encore plus loin, en s’attaquant cette fois aux ruptures conventionnelles. Cette alternative aux démissions et aux licenciements, créée à la fin de 2008 par Nicolas Sarkozy, ne cesse de se développer, atteignant le nombre de 128 000 au 1er trimestre 2025. Plébiscitée par les cadres et par nombre d’entreprises ne voulant pas se lancer dans une procédure de licenciement, cette procédure coûte de plus en plus cher à l’Unédic.
En 2024, elle a représenté un quart des dépenses du régime, soit 9,4 milliards d’euros. S’il est probable que l’exécutif souhaite offrir des conditions d’indemnisation moins bonnes que pour un licenciement, ni François Bayrou ni ses ministres n’ont précisé ce mardi la dimension de la brèche qu’ils entendent creuser dans le dispositif. (...)
La réactionnaire « allocation sociale unifiée »
Désormais, le gouvernement vise notamment un nouvel affaiblissement des protections liées aux contrats de travail. L’idée de réduire la durée pendant laquelle les salarié·es peuvent contester leur licenciement aux prud’hommes est par exemple sur la table. En 2008, c’était possible pendant cinq ans, aujourd’hui, ce délai a été ramené à un an. Et fin 2023, l’ancien ministre de l’économie Bruno Le Maire avait rêvé à voix haute de le réduire à… deux mois.
Mais au-delà de ces réformes correspondant à l’esprit du macronisme originel, François Bayrou a aussi présenté une idée directement empruntée à l’aile la plus réactionnaire de la droite : la mise en place d’une « allocation sociale unifiée », qui pourrait être présentée au Parlement « avant la fin de l’année ».
Sous couvert d’instaurer « une solidarité plus lisible et qui donne toujours la priorité au travail », cette mesure, largement inspirée par le chef de file des députés Les Républicains (LR) Laurent Wauquiez, entend surtout plafonner la totalité des aides sociales à 70 % du Smic maximum. Il s’agirait de fusionner le revenu de solidarité active (RSA), les allocations-chômage et toutes les autres aides versées par les caisses d’allocations familiales – pour mieux limiter.
On retrouve là les obsessions d’un camp politique entonnant désormais sans complexe le refrain populiste et raciste de « C’est Nicolas qui paye ». Sans lien avec la réalité. (...)
Taper sur les plus pauvres reste une des meilleures recettes de responsables politiques à la dérive