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En Turquie, le sort incertain des migrants syriens dans le collimateur du pouvoir
Article mis en ligne le 23 août 2019

À Istanbul, les migrants syriens qui ne disposent pas d’un permis de séjour validé par la ville sont désormais persona non grata. Le gouvernement turc leur a laissé jusqu’au 30 octobre pour quitter la ville, sous peine d’être expulsés vers d’autres régions, voire hors du pays. Une menace qui semble aussi peser sur les réfugiés en situation régulière.

C’est ce qu’a annoncé, mardi 20 août, le ministre de l’Intérieur turc, Suleyman Soylu, indiquant qu’un délai de deux mois avait été accordé à cette population, alors que la date limite avait initialement été fixée au 20 août. "Les étrangers de nationalité syrienne qui ne sont pas enregistrés sous le régime de protection temporaire ou ne disposant pas d’un permis de résidence seront expulsés vers les provinces désignées par le ministère de l’Intérieur. L’inscription au régime de protection temporaire à Istanbul est close", a indiqué le gouvernorat.

Autrement dit : les Syriens ayant un permis de résidence enregistrés dans un autre gouvernorat de Turquie doivent impérativement quitter d’eux-mêmes Istanbul. Au-delà du 30 octobre, ils seront renvoyés de force dans la bonne région.

Dans une annonce télévisée, Suleyman Soylu a par ailleurs précisé que la province d’Antalya, dans le sud de la Turquie, n’acceptait plus de nouveaux migrants syriens. Les étudiants, les familles ainsi que les personnes ayant un emploi officiel à Istanbul ne sont pas concernés par cette injonction des autorités.

Les Syriens qui ne sont pas du tout enregistrés seront, eux, expulsés hors de Turquie.

L’annonce de ce report de la date d’échéance est tombée après plusieurs semaines d’une campagne ardue menée contre les Syriens, à grand renfort de contrôles d’identités accrus dans les stations de métro, gares routières et quartiers à forte concentration de Syriens d’Istanbul. Depuis le 12 juillet, les autorités turques ont arrêté en masse des étrangers installés, selon elles, de manière "irrégulière" dans la métropole, où l’on dénombre près de 548 000 réfugiés syriens en situation régulière. (...)

Si, officiellement, ce sont les personnes en situation irrégulière qui sont menacées d’expulsion, migrants et associatifs rapportent des reconduites à la frontière de personnes disposant d’un titre de séjour valide. (...)

Du côté des officiels turcs, en lieu et place d’expulsions, on assure que ces renvois constituent des exemples de "retours volontaires". (...)

Une position qui a fait bondir un groupement d’ONG syriennes qui a alerté sur le fait que "plus de 600 Syriens", pour la plupart titulaires de "cartes de protection temporaires" délivrées par d’autres provinces turques, avaient été arrêtés la semaine dernière à Istanbul et renvoyés en Syrie. (...)

Cette virulente campagne contre les Syriens survient alors qu’un sentiment anti-migrants grandit au sein de la population en Turquie. Dans ce pays, qui accueille plus de 3,5 millions de Syriens, la part des citoyens mécontents de la présence des Syriens est passée de 54,5% en 2017 à 67,7% en 2019, selon une étude publiée début juillet par l’Université Kadir Has à Istanbul. Preuve de ce ras-le-bol, pendant la campagne pour les élections municipales cette année, le discours hostile aux Syriens s’est déchaîné sur les réseaux sociaux, avec le mot-dièse #LesSyriensDehors. En réaction, le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan, jusque-là enclin à accueillir des Syriens au nom de la "solidarité musulmane", veut désormais montrer un visage de fermeté.

Illustration de cette dureté, les autorités d’Ankara ont prévenu les migrants, sans ménagement : "ayez vos documents sur vous, à tout moment". (...)