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David Wahl : « Les déchets trahissent notre refus de la mort »
David Wahl est dramaturge, écrivain et interprète. ; Le Sale Discours ou géographie des déchets pour tenter de distinguer au mieux ce qui est propre de ce qui ne l’est pas, de David Wahl, éditions Premier Parallèle, janvier 2018, 84 p., 10 €.
Article mis en ligne le 13 février 2018

Qu’est-ce qui est sale ? Qu’est-ce qui est propre ? Dans son dernier ouvrage, « Le Sale discours », l’essayiste et comédien David Wahl s’amuse de cette fausse opposition et met en récit les « grands problèmes environnementaux ».

Reporterre — Comment est né le projet du « Sale discours » ?
David Wahl — Je m’étais déjà penché sur les questions environnementales, un sujet qui me préoccupe grandement, avec La Visite curieuse et secrète, qui questionne notre rapport ambivalent à la mer. Au fur et à mesure de mes ouvrages, les scientifiques s’intéressent de plus en plus à mes méthodes de travail et, d’eux-mêmes, me proposent des sujets de réflexion.

Ça a été le cas de l’Andra [l’Agence nationale pour les déchets radioactifs], qui m’a proposé il y a deux ans de parler de son projet Cigéo à Bure [l’Andra projette d’y construire un centre de stockage des déchets radioactifs de haute activité à vie longue]. À l’époque, ce n’était pas encore très connu. Mais quand j’ai appris l’existence de ces trois cents kilomètres de galeries souterraines destinées à accueillir des déchets nucléaires pendant 300.000 ans, j’ai trouvé dingue le potentiel narratif de cette installation !

C’est la question nucléaire qui a déclenché mon envie de parler des déchets. Je me suis alors lancé dans une série d’immersions, comme à Cigéo, et au bout de toutes ces expériences, m’est venue la question qui guide le livre : pourquoi, si l’homme est de plus en plus propre, le monde est-il de plus en plus sale ?

Au bout de votre enquête, qu’avez-vous appris des déchets ?

On apprend beaucoup des poubelles ! C’est par exemple grâce à ses déchets qu’on connaît mieux la société romaine, industrielle, que la société gauloise, moins pollueuse.

Avec Le Sale discours, j’ai voulu raconter une facette de l’homme. C’est le récit de l’homme qui envisage sa survie au prix de l’environnement. Je pense profondément que les déchets disent quelque chose de notre rapport au monde. Ils trahissent notre refus de la mort — plus que de sa peur.

C’est plus que jamais le cas, notamment avec l’émergence du transhumanisme. Nos sociétés ne peuvent se rêver immortelles qu’en tyrannisant l’environnement, via la pollution. Nos déchets signifient que nous reportons le problème à plus tard. « Après moi le déluge ! » pourrait être l’adage de notre temps. (...)

Prochaines représentations du Sale discours à la Maison de la poésie, à Paris, les ,26 et 27 février à 20h.