
(...) Même si le candidat de la gauche a de bonnes chances d’être élu le 6 mai, il n’aura pas beaucoup de marges de manoeuvre. A la fois en raison de la situation économique et financière dont la dégradation pourrait très vite doucher les espoirs soulevés par le retour de la gauche au pouvoir, et parce qu’un pays dans lequel quasiment un cinquième des électeurs vote à l’élection majeure pour la candidate du Front national ne se gouverne pas si facilement. On se souvient de la deuxième place obtenue en 2002 par Jean-Marie Le Pen et de la chape de plomb que cela avait contribué à recouvrir la vie politique française. Mais le vote FN était à l’époque moins important en voix et surtout moins profondément enraciné dans l’ensemble du pays qu’aujourd’hui. Le score lepéniste, surtout si on le compare à celui des autres "grands" candidats (Jean-Luc Mélenchon et François Bayrou) qui ont soulevé la question de la forme et du degré nécessaire de "changement", pose deux questions en forme d’hypothèques pour le quinquennat qui vient.
La première est celle de la place et du rôle de la France dans la mondialisation et surtout en Europe.
La première est celle de la place et du rôle de la France dans la mondialisation et surtout en Europe (...)
La seconde question, que le score de Le Pen comparé à celui de Mélenchon met à jour, tient à l’importance de l’insécurité dite culturelle dans cette élection. Inséparable dans son appréhension, en particulier dans les catégories populaires, de la dimension économique et sociale, elle s’en distingue tout de même. (...)
L’identité, l’immigration, le droit de vote des étrangers, la laïcité, le sens de ce que l’on appelle généralement la République sont des thèmes qui se sont installés subrepticement au coeur du débat ces dernières années et dans cette campagne ; souvent de manière détournée, souvent à mi-mot, jamais clairement. Le prochain président de la République, surtout s’il est issu de la gauche, devra pourtant les considérer à l’égal des questions économiques et sociales même si c’est, bien évidemment, à rebours des manipulations et des usages sarkozystes, sous peine de voir monter encore le score lepéniste.
Il est en effet à craindre qu’un débat trop simpliste entre un Sarkozy candidat de l’insécurité culturelle contre un Hollande candidat de l’insécurité économique et sociale n’épuise pas le sujet.