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Lionel de Cahors
COSTA CONCORDIA, LE "TITANIC" DU XXIe siècle ?
P’tit Billet 02-12le mardi 17 janvier 2012 (dessin de Patrick Mignard)
Article mis en ligne le 19 janvier 2012

Dans la nuit du 14 avril 1912 vers 23h40 le RMS * Titanic heurte un iceberg sur tribord avant par 41°46’ N de latitude - 50°14’ W de longitude, et coule en moins de trois heures. Environ 1500 personnes vont périr en mer et seulement 700 personnes seront rescapées.
Personne ne sait exactement ce qu’est devenu le capitaine Edward Smith, considéré comme disparu dans ce naufrage le 15 avril 1912, et les hypothèses les plus farfelues ont couru sur le commodore de la White Star Line.

Cependant une chose est certaine, c’est qu’à 2 h 10, le commandant Smith relève les deux opérateurs radio de leur fonction. À 2 h 17 il retourne sur la passerelle, l’orchestre s’arrête de jouer juste avant la chute d’une cheminée. Peu après, la grande verrière se brise en entraînant la destruction de l’escalier d’honneur. À 2 h 18, les lumières du Titanic clignotent une dernière fois puis s’éteignent. Un instant plus tard, le paquebot se brise en deux entre la troisième et la quatrième cheminée.
À son époque, le naufrage du Titanic considéré comme le plus grand désastre maritime en temps de paix, a été un choc pour le monde entier. Les commissions d’enquête menées après cette catastrophe ont servi à améliorer la sécurité maritime, notamment grâce à de nouvelles réglementations.

Un siècle après le naufrage du Titanic, le paquebot Costa Concordia, appartenant à la société Costa Croisière du groupe leader mondial des croisières la Carnival corporation & PLC, s’est échoué le vendredi 13 janvier vers 21h45 à proximité de l’île de Giglio en Toscane, après avoir heurté un récif. L’imposant paquebot de 290 m de long, large de 36 m, 114 500 tonneaux et 8 mètres de tirant d’eau, effectuait une croisière de sept jours en Méditerranée au départ de Savone, avec des escales prévues à Marseille, Barcelone, Palma de Majorque, Cagliari, Palerme, Civitavecchia et Savone, avec à son bord un peu plus de 4200 personnes, dont 3000 passagers et 1200 membres d’équipage. Déjà plus d’une dizaine de personnes ont perdu la vie et on dénombre une centaine de blessés.

Seulement, la comparaison s’arrête là, car pour ce qui est du commandant du Concordia, Francesco Schettino, il ressemble davantage au commandant Chaumareys, le naufrageur de La Méduse, qu’à celui du Titanic.
Le commandant du paquebot italien "s’est approché de manière très maladroite de l’île du Giglio, a heurté un rocher qui s’est encastré dans son flanc gauche, faisant incliner le navire et embarquer énormément d’eau en l’espace de deux, trois minutes", a indiqué le procureur Francesco Verusio, du parquet de Grossetto. La traditionnelle "parade" qui consiste à venir saluer certains ports des îles, en est certainement la cause. Le quotidien italien La Stampa a retrouvé du reste, un courrier émanant d’élus de l’île de Giglio remerciant la direction de la compagnie Costa après que le Concordia se soit approché du port, tous feux allumés, où s’étaient rassemblés la population et de nombreux touristes, en août dernier.

Après avoir quitté le port de Civitavecchia (escale de Rome), le paquebot a mis le cap sur l’île du Giglio. Les informations délivrées par le Système d’identification automatique (connu sous le sigle anglais AIS) montrent en effet le paquebot en route sur l’île, à la vitesse d’environ 15 nœuds. Puis, le Concordia s’est rapproché du rivage, en modifiant son cap au point de ne passer seulement à quelques centaines de mètres de Porto Giglio. Ce vendredi 13 janvier au soir, alors que la plupart des passagers étaient au restaurant pour le dîner, le navire est venu heurter un récif vers 21h30. Il a commencé immédiatement à prendre de la gîte sur bâbord (côté gauche). Le commandant a vraisemblablement réduit sa vitesse, déjà freinée par le récif, et mis la barre à droite. Le paquebot va alors éviter sur tribord et gîter maintenant sur l’autre bord.
L’analyse d’une photo publiée sur internet, montre le Concordia reposant sur son flanc tribord, avec une importante gîte qui permet de découvrir ainsi tout le côté bâbord, avec l’impressionnante brèche sur la partie arrière du paquebot. On peut remarquer immédiatement que toute la partie avant et centrale de la coque sont intactes, ainsi que l’aileron stabilisateur bâbord toujours sorti. Il semble donc que le Concordia, ait heurté le récif en évitant, barre à droite. La giration a pu faire chasser la poupe venue alors s’encastrer dans le récif. La dernière information transmise par l’AIS montre le navire pratiquement à l’arrêt, au nord de Porto Giglio. Pour arriver dans sa position d’échouement, il a donc fallu que le paquebot continue de venir à droite pour faire quasiment demi-tour afin de se rapprocher du port. L’analyse de la "boîte noire", appelée Voyage Data Recorder (VDR), enregistreurs de données du voyage, révèlera les circonstances exactes de ce naufrage.
Dans une telle situation aussi, il est nécessaire tenter d’échouer le bateau, si possible sur du sable, pour éviter qu’il ne sombre en mer. Sans cette ultime manœuvre que le commandant de Concordia a vraisemblablement réalisé, cet accident aurait alors été bien plus dramatique pour les passagers, comme pour l’équipage.

Bien d’autres questions se posent aussi sur : le suivi du trafic maritime par les autorités italiennes, le respect de procédures nautiques et d’évacuation, la non-présence des brassières sur les ponts, le gigantisme de ces paquebots avec toujours plus de passagers à bord, ou les difficultés de compréhension entre des membres d’équipage ne parlant pas la même langue, et beaucoup d’autres questions auxquelles il faudra maintenant apporter des réponses.

Mais il y a plus grave encore. Interrogé pour savoir précisément si le commandant Francesco Schettino, arrêté samedi pour homicide multiple, naufrage et abandon de navire, avait "quitté le navire bien avant que tous les passagers soient évacués", le procureur a répondu : "Malheureusement, je dois confirmer cette circonstance" ! Comment ce commandant a-t-il pu quitter son navire avant la fin des opérations d’évacuation ? Les coast-guards italiens lui ont demandé de retourner à bord pour aider à l’évacuation des passagers, mais il a refusé. En dehors du commandant et de son second Ciro Ambrosio, d’autres marins du Costa Concordia ont quitté rapidement le bord, même si la totalité du personnel n’est pas mobilisé à bord jusqu’à la fin des opérations de sauvetage, surtout en pleine mer. Il faut en effet des officiers et des marins pour conduire les embarcations de secours, rassurer et s’occuper des passagers. S’il n’est écrit nulle part que le commandant est le seul maître après dieu, cependant, l’article 84 du Code Disciplinaire et Pénale de la Marine Marchande pour la France, impose au commandant d’organiser le sauvetage de tous ses passagers et membres d’équipage, y compris s’il est forcé d’abandonner son navire, de rester à bord le dernier. L’abandon de navire est une faute professionnelle très grave, un délit puni d’une peine de prison pour le capitaine, mais c’est aussi et surtout, un geste d’une méprisable ignominie.

(...)

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