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« Aujourd’hui, c’est le grand jour car je vais me brûler à Pôle emploi » Djamal Chaar est mort. Il s’est immolé par le feu mercredi 13 février 2013 face à un Pôle Emploi, à Nantes.
15 avril 2013
Article mis en ligne le 11 novembre 2019

« Les règles ont été appliquées avec l’humanité qui convient. » Telle a été la réponse du ministre du Travail Michel Sapin après l’immolation de Djamal Chaar, mi-février, devant une agence Pôle emploi de Nantes. Les régulières tentatives de suicides devant un Pôle emploi ou une Caisse d’allocations familiales sont encore considérées comme « un drame personnel » par les institutions. Ce que contestent les collectifs de chômeurs et précaires.

Djamal Chaar est mort. Il s’est immolé par le feu mercredi 13 février
2013 face à un Pôle Emploi, à Nantes. Deux jours après, un autre chômeur
tentait de se donner publiquement la mort à Saint-Ouen (93), et un autre encore quelques jours plus tard dans un Pôle emploi de Bois-Colombes. Déjà, l’été précédent, un homme était mort après s’être immolé à la CAF (Caisse d’allocations familiales) de Mantes-la-Jolie. À l’époque, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, avait « fait part de sa profonde émotion face à cet acte désespéré d’une personne que les difficultés de la vie ont manifestement conduit à un geste tragique ». La ministre déléguée chargée de la lutte contre l’exclusion avait ajouté qu’« en première ligne face à ces difficultés sociales, le personnel de la CAF a rempli sa mission avec sérieux et
compétence » (lire notre article sur la CAF). (...)

La veille de son immolation, Djamal Chaar écrit : « J’ai travaillé 720h et
la loi, c’est 610h. Et Pôle emploi a refusé mon dossier ». Le ministre du
Travail et du Dialogue social répondra : « Les règles ont été appliquées
avec l’humanité qui convient, avec les explications nécessaires, mais il y
a parfois des moments où on est dans une telle situation, qu’on ne
comprend plus les explications. »

L’humanité qui convient. Quiconque a affaire à Pôle emploi ou à la CAF
sait ce dont il s’agit. C’est l’État qui remet à un agent le soin de
décider des moyens de subsistance d’un autre humain. Ce sont des calculs
comptables qui font oublier les vies derrière les chiffres. (...)

La contrainte ou la culpabilité

L’humanité qui convient, c’est nous culpabiliser de n’avoir pas d’emploi
dans cette société-là et nous forcer à jouer le jeu. C’est une logique qui
transpire partout. Elle s’impose aussi à nous dans l’entreprise où chacun
est contraint à grand coups de management de s’impliquer personnellement,
de se réaliser en tant que capital humain, de faire corps avec son travail
aussi indésirable soit-il.

Djamal Chaar a décidé de ne pas faire le grand saut dans le noir en
silence. Nous ne pouvons accepter comme un « accident de parcours » l’acte
d’un homme qui a décidé de mourir en accusant. S’obliger à parler. Dire
que l’institution tue. Dire qu’il ne s’agit pas de « drames personnels ». (...)