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Mediapart
Yaël Braun-Pivet réélue présidente de l’Assemblée nationale grâce à un deal avec LR
#electionslegislatives #AssembléeNationale
Article mis en ligne le 19 juillet 2024

Devancée par la gauche au premier puis au deuxième tour, la candidate du camp présidentiel a profité du ralliement de la droite LR et du groupe Liot pour se faire réélire au perchoir. Le Nouveau Front populaire a dénoncé un « vote volé » par une « alliance contre-nature ». Pour la gauche, c’est Matignon qui s’éloigne.

Décrivant son « immense émotion » à l’annonce des résultats, l’intéressée a exhorté la représentation nationale à « apporter de nouvelles solutions » et de « nouvelles méthodes » à un pays « inquiet et fracturé ». Sa réélection donne pourtant un signal inattendu de continuité après des élections perdues par son camp. « Sur le plan démocratique, ça serait quand même bizarre de revenir d’une défaite avec la même présidente de l’Assemblée, non ? », glissait un ministre quelques jours avant le scrutin. Ni l’Élysée ni Matignon ne débordaient par ailleurs d’enthousiasme à l’idée de voir l’ancienne avocate reconduite à son poste.

Comme souvent lors de la précédente mandature, c’est la droite LR qui est venue au secours des macronistes (...)

Entre Macron et LR, un deal jusqu’à Matignon ?

Malgré la défiance mutuelle qu’ils se portent, la victoire de Yaël Braun-Pivet est aussi – et surtout ? – celle d’Emmanuel Macron. Le chef de l’État peut se frotter les mains : en scellant, même à l’occasion d’un scrutin interne, l’alliance avec LR dont il rêve depuis le 7 juillet, le camp présidentiel écarte l’hypothèse d’un gouvernement du Nouveau Front populaire (NFP) et se place en pole position pour conserver les manettes de l’exécutif.

La réélection de la députée des Yvelines au perchoir ne change rien au résultat du second tour des élections législatives lors desquelles le NFP est arrivé en tête. Mais, profitant des atermoiements de la gauche, le président de la République misait sur le scrutin de jeudi pour démontrer l’incapacité de la gauche à rallier une majorité et sa propre aptitude à trouver des accords avec la droite traditionnelle. Sur LCP, le député Renaissance Antoine Armand a raillé les « mauvais perdants » d’une gauche qui n’aurait « pas compris » qu’elle n’avait « pas gagné les législatives ». (...)

Pour le NFP, conscient qu’il lui fallait emporter le perchoir pour espérer être nommé à Matignon, c’est peu dire que les perspectives s’assombrissent. Très en colère, le candidat défait André Chassaigne a parlé d’un « vote [qui] a été volé » par des « combinaisons » et une « alliance contre-nature ». La députée communiste des Hauts-de-Seine Elsa Faucillon confiait quant à elle son « écœurement ». « Et je pense que c’est ce qui domine chez beaucoup de Français », ajoutait-elle. (...)

Le « ni-ni » de l’extrême droite

Le RN, lui, peut se frotter les mains. La perspective d’une victoire d’André Chassaigne inquiétait le parti de Marine Le Pen, après que le NFP eut annoncé sa volonté de le priver de postes à responsabilité. Yaël Braun-Pivet a pour sa part toujours défendu sa ligne, même si elle est minoritaire dans son groupe : tout le monde doit être représenté au bureau de l’Assemblée, explique-t-elle à l’envi, même l’extrême droite.

Bien que bénéficiaire du résultat du jour, le RN aura finalement renoncé à y contribuer. Le comportement des 143 élu·es d’extrême droite était pourtant observé de près, surtout depuis la révélation dans la presse de discussions entre Yaël Braun-Pivet et Sébastien Chenu, le candidat du RN. À en croire les résultats de ce dernier (qui a successivement engrangé 142, 143 et 141 voix), les troupes de Marine Le Pen ont suivi en bloc la stratégie de leur cheffe de file.

À défaut des voix du RN, Yaël Braun-Pivet a été réélue avec les voix des dix-sept ministres-député·es : des membres du gouvernement démissionnaire, toujours chargé des affaires courantes, qui siègent en parallèle à l’Assemblée nationale.

Une situation qui a fait hurler nombre de constitutionnalistes et de personnalités politiques, au premier rang desquelles Jean-Louis Debré, ancien président de droite du Conseil constitutionnel. « Vous ne pouvez pas être à la fois au gouvernement et à l’Assemblée nationale, a-t-il tonné sur BFMTV. On est dans un régime de séparation des pouvoirs. Ce n’est pas correct. »

Lire aussi

 (Huffington Post)
Manon Aubry embrasse Ursula von der Leyen et s’attire les critiques du RN, elle répond

Manon Aubry contre-attaque. Critiquée par le Rassemblement national pour son accolade avec la présidente de la Commission européenne tout juste réélue Ursula von der Leyen, l’eurodéputée de la France insoumise a répondu vertement à Jordan Bardella et Marine le Pen ce jeudi 18 juillet.

Comme vous pouvez le voir sur la vidéo ci-dessous, on voit Manon Aubry rire et prendre Ursula von der Leyen dans ses bras pour la congratuler. « Sans commentaire… », a réagi la députée RN Marine Le Pen. « Vous comprenez pourquoi Emmanuel Macron aime autant la France si soumise ? », a renchéri le président du parti Jordan Bardella (...)

Quelques heures plus tard, Manon Aubry leur a répondu. D’abord à Marine Le Pen, répondant : « C’est sûr que Bardella avec ses 21 amendements déposés lors du mandat précédent s’est vachement opposé à Von Der Leyen. J’ai voté contre sa reconduction. Mais la différence entre votre poulain et moi c’est que je vais continuer à batailler dans les 5 ans à venir ! » (...)

Puis Manon Aubry a répondu à Jordan Bardella en étayant ses propos. « Il y a ceux qui préfèrent serrer la main à des dictateurs. Et il y a ceux qui saluent l’élection de leur opposante, ce qui est un usage républicain et institutionnel quand on est Présidente de groupe. Mais cela, vous l’ignorez sûrement », débute ainsi celle qui est effectivement à la tête du groupe La Gauche au Parlement européen.

Et poursuit : « Il faut dire qu’on ne vous a pas beaucoup vu ces 5 dernières années vous opposer dans ce Parlement à la politique d’Ursula von der Leyen. Ce ne sont pas vos 21 amendements en un mandat entier qui l’ont faite trembler. » Une attaque que Manon Aubry a souvent faite pendant la campagne des européennes au printemps, surnommant d’ailleurs Bardella « Barde-Pas-Là ».

« Au contraire, votre alignement sur son soutien inconditionnel à Benjamin Netanyahou l’a confortée », tacle-t-elle encore. Et conclut : « Je ne vote pas seulement contre elle et sa politique. J’agis. »

 (Contre-Attaque)
Braun-Pivet reste au perchoir : Démocratie en PLS

Les macronistes ont été triplement battus dans les urnes. En 2022, Macron n’a été élu que grâce au vote barrage, puis il n’a pas obtenu la majorité à l’Assemblée. Ils ont aussi été lourdement battus aux Européennes. Puis, trois semaines plus tard, à nouveau battus lors des législatives provoquées par Macron lui même. Pourtant, ils comptent bien se maintenir au pouvoir par tous les moyens. (...)

17 ministres démissionnaires ont voté en tant que député, ce qui est interdit par la Constitution. Un ministre – c’est à dire le pouvoir exécutif – ne peut pas voter en tant que député au Parlement – le pouvoir législatif. La séparation des pouvoirs est un principe de base en République, que les macronistes ont allègrement piétiné. Du jamais vu.

Après sa victoire, Braun-Pivet a fait applaudir son ami le député d’extrême droite Sébastien Chenu, à qui elle va probablement redonner le poste de vice-président, niant ainsi totalement la victoire du Front Populaire.

C’est cette double opération qui permet aux macronistes de garder le contrôle de l’Assemblée, en dépit du vote des français. C’est probablement avec la même tactique qu’ils comptent imposer leur Premier Ministre, en violation totale du vote du 7 juillet.

Yaël Braun Pivet n’est pas n’importe qui. C’est la branche lepéniste du macronisme. D’abord parce qu’elle et ses amis ont gouverné sans les députés et ont aboli, de fait, le régime parlementaire depuis 2022, en imposant, à 23 reprises en à peine plus d’un an, le 49.3. Un record absolu sous la Cinquième République.

Ce n’est pas tout, en tant que présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet a été la plus répressive de l’histoire contre les députés : elle a prononcé 106 sanctions entre juin 2022 et mai 2024, contre 39 dans toute l’histoire de la Ve République, en 60 ans. (...)

C’est aussi Yaël Braun-Pivet qui a crié son soutien « inconditionnel » à Israël au moment du lancement de l’opération génocidaire à Gaza, puis qui s’est rendue avec le député d’extrême droite Meyer Habib en Israël pour asséner : « rien ne doit empêcher Israël de se défendre ».

En 2023 Yaël Braun-Pivet hurlait depuis le perchoir de l’Assemblée contre une députée insoumise qui rappelait qu’elle avait caché dans sa déclaration d’intérêt une partie de ses biens spéculatifs, en l’occurrence, 40.000€ d’actions chez Total qui auraient été « oubliées ». L’ancienne présidente de l’Assemblée possède aussi 1,5 million d’euros d’actions chez L’Oréal. Surprise, son mari est justement cadre chez L’Oréal…