
À la suite d’un signalement pour violences sexistes et sexuelles, le lycée autogéré de Paris a été visé par une enquête administrative de l’inspection générale. L’établissement se retrouve dans la tourmente et voit ses piliers remis en cause. (...)
Alors que l’établissement est menacé par une énième attaque, l’inquiétude est réelle. « On a déjà bataillé pour rester ce que nous sommes. Mais là, ce n’est pas pareil. Il y a plus d’inquiétude », souligne Fox, élève en terminale. (...)
En juin 2022, le nouveau recteur de Paris, Christophe Kerrero a refusé de renouveler la convention de deux ans, convention qui réglemente depuis dix ans l’établissement public créé en 1982. « Le LAP repose sur trois piliers : l’autogestion, la cooptation et la libre fréquentation. Le rectorat les remet en cause, notamment ce dernier, explique Samuel, professeur d’histoire. Ce principe est un accord passé entre l’établissement, les élèves et leurs familles, et repose sur la présence volontaire de l’élève. » (...)
inquiétudes des élèves et des enseignants quant au devenir du lycée autogéré. (...)
La rentrée a par ailleurs été marquée par une enquête diligentée par l’inspection générale de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (IGESR), ravivant l’inquiétude de la communauté éducative et des élèves. Si les conclusions ont normalement été rendues au ministre de l’Éducation en décembre 2023, aucune annonce n’a été faite. « Ce lycée a sauvé bien des élèves, dont ma fille, il ne faut pas qu’il ferme », s’indigne Marie, mère d’élève. (...)
Cette enquête de l’IGESR a été déclenchée à la suite de plusieurs rapports et courriers émanant des professeurs, des d’élèves et des parents. Tous alertaient sur le climat émaillé de tensions, voire de violences, qui s’était installé au lycée. (...)
Propos sexistes et « gestes déplacés » d’un enseignant (...)
signalement au rectorat. « À ce moment, on s’était dit que l’on avait fait ce qu’il fallait : alerter l’équipe pour qu’une décision soit prise », estime Gaëlle. L’enseignant concerné, alerté par certains de ses collègues, est mis en arrêt. À ce jour, il n’est pas revenu au LAP. Mais, la semaine suivante, le 17 janvier, la réunion d’équipe annonce que le signalement est « humainement impossible ». (...)
les témoignages visent « un enseignant historique du LAP ». « Le réflexe des collègues est de se protéger. Cela démontre une vraie problématique autour de l’intégration des VSS dans l’autogestion. » (...)
Face à ce revirement, « on a eu le sentiment d’être trahis, et les victimes d’être abandonnées », raconte Fox. Les lycéens se mobilisent et organisent une seconde AG à huis clos, le 24 janvier. La majorité des 120 participants se prononce en faveur d’un signalement au rectorat. Le même vote est soumis aux professeurs lors d’une réunion d’équipe, le surlendemain. Mais là, le résultat est plus complexe : 6 pour et 6 contre. Les enseignants ayant voté contre proposent de mettre en place une justice transformatrice et d’alerter les parents des victimes. (...)
Ceux ayant voté pour restent sur leur position : « En tant que professeurs d’un lycée public, il est de notre devoir de faire un signalement lorsque l’on constate ce genre d’infraction », expliquent-ils. Le 29 janvier, le RIMS est envoyé au rectorat par 7 enseignants sur 24, et la communauté éducative se divise. Face à un climat qui se détériore, quatre des enseignants ayant signé le rapport déposent un signalement au registre de santé et de sécurité au travail pour injures et menaces. (...)
Un quatrième pilier
La mobilisation des élèves persiste. Le 11 avril, plusieurs lycéens arrivent avec un tee-shirt « Lycée des Agresseurs Protégés » et ce slogan apparaît aussi sur les tags des murs. Moins d’un mois plus tard, un blocus est organisé. Les participants demandent que l’enseignant concerné ne revienne pas, mais aussi une « restructuration du LAP pour plus de pouvoir aux élèves, plus de démocratie et moins de hiérarchie ». Durant cette fin d’année scolaire, « de nombreux élèves et enseignants ont laissé des plumes », souligne Fox. Finalement, le 7 juillet, l’IGESR se voit confier la mission d’enquêter sur le LAP au motif de « situation préoccupante en termes de sécurisation des élèves et de certains enseignants ». (...)
Au-delà des divisions, ce qui inquiète enseignants, parents et élèves, c’est que les conflits internes soient instrumentalisés pour faire fermer le LAP. (...)