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Libération
Vidéo : comment Mohamed Bendriss est mort à Marseille alors qu’il ne représentait aucun danger pour les policiers du Raid
#Nahel #violencespolicieres #emeutes #Alhoussein #MohamedBendriss
Article mis en ligne le 2 décembre 2023
dernière modification le 30 novembre 2023

La vidéo, qui ne dure que vingt-six secondes, est une pièce capitale dans l’enquête sur la mort de Mohamed Bendriss, décédé à Marseille dans la nuit du 1er au 2 juillet 2023 après avoir croisé des policiers du Raid. Libération et Mediapart dévoilent en exclusivité ce document, filmé par une témoin, sans lequel les investigations n’auraient peut-être jamais abouti à des poursuites. Il montre l’ahurissante interaction entre les fonctionnaires et le jeune père de famille ; entre une colonne de véhicules dont descendent des hommes en noir, armés et casqués, et un conducteur de scooter qui les évite pour s’enfuir. Mise en perspective avec d’autres images inédites – vidéosurveillance de la ville, caméra embarquée par le véhicule blindé des policiers –, cette séquence révèle que la victime a été la cible de plusieurs tirs de LBD et de beanbags (des sachets de billes de plomb), alors qu’elle ne présentait aucun danger pour les agents.

Ce soir-là, Marseille est secoué par une nouvelle nuit d’émeutes après la mort de Nahel Merzouk, tué par un policier à Nanterre (Hauts-de-Seine) le 27 juin. Pour la troisième nuit consécutive, le Raid, une unité d’intervention normalement chargée de la lutte contre les criminels armés, est déployé. En parallèle, Mohamed Bendriss, Algérien de 27 ans qui habite Marseille depuis plusieurs années, circule à scooter, principalement dans le centre. Peu après 1 heure du matin, le jeune homme s’effondre en bas du cours Lieutaud, devant l’appartement de sa mère. (...)

Curieux serment

Aujourd’hui, trois policiers du Raid sont mis en examen pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Alexandre P. et Jérémy P., qui estiment tous les deux que leurs tirs étaient proportionnés et justifiés pour arrêter le scooter. Ils occupaient respectivement la tourelle du véhicule blindé, et une place à l’arrière du van en deuxième position dans le convoi. Et Sylvain S., présent dans la troisième voiture qui, lui, ne reconnaît pas son tir.

Dans son audition, l’autrice de la vidéo décisive fait aussi un curieux serment : « Conformément à vos instructions, je m’engage à ne pas diffuser ce film à qui que ce soit ou à le montrer. » Les enquêteurs de l’IGPN ont donc enjoint cette témoin à ne pas ébruiter l’implication du Raid dans l’affaire. Ils vont encore plus loin, et mettent un coup de pression flirtant avec le mensonge, puisque cette riveraine déclare aussi dans son audition : « Je prends acte qu’en cas de diffusion, je pourrais être poursuivie par la justice. J’ai compris ce que vous me dites, je m’engage à respecter la loi. » Celle-ci n’interdit pourtant pas de filmer des policiers dans l’exercice de leurs fonctions, ni de diffuser de telles images. Même si celles-ci constituent la pièce capitale d’une enquête. (...)