
Un tribunal fédéral a reconnu, mardi, CACI International, une entreprise privée sous-traitante de l’armée américaine, coupable de "tortures, traitements cruels, inhumains ou dégradants" sur trois Irakiens à la prison d’Abou Ghraib, près de Bagdad. Elle doit verser 42 millions de dollars aux anciens détenus.
Il s’agit d’un directeur d’école, d’un marchand de fruits et du journaliste Salah al-Ejaili – qui vit actuellement en Suède –, arrêtés à la suite de l’invasion américaine de l’Irak en 2003 et détenus à Abou Ghraib, à l’ouest de la capitale, Bagdad.
"Aujourd’hui est un grand jour pour moi et pour la justice", a réagi ce dernier, cité dans un communiqué du Center for Constitutional Rights (CCR, Centre pour les droits constitutionnels), qui représentait les trois plaignants. "J’ai attendu longtemps pour voir ce jour. Ce n’est pas seulement la victoire des trois plaignants dans cette affaire contre une entreprise." (...)
"Nos clients se sont courageusement battus pendant 16 ans pour obtenir réparation des horreurs qu’ils ont subies à Abou Ghraib, contre tous les obstacles que cet énorme sous-traitant privé de l’armée a mis sur leur chemin", a souligné le directeur juridique du CCR, Baher Azmy, cité dans le texte.
Des soldats sous les ordres des interrogateurs privés
En 2014, après des années de procédure et la condamnation en cour martiale à des peines de prison de onze soldats de 2004 à 2006, une cour d’appel fédérale avait autorisé les poursuites judiciaires contre CACI International. (...)
Les plaignants ont invoqué l’Alien Tort Statute (ATS), une loi fédérale de 1789 qui autorise les étrangers victimes de violations du droit international à être entendus devant les tribunaux américains.
Ils affirmaient que, dans leurs cas, les soldats étaient de facto sous les ordres des interrogateurs privés. L’entreprise faisait au contraire valoir que l’armée américaine exerçait un contrôle total sur ces interrogatoires, et notamment les techniques utilisées. (...)
La diffusion en 2004 de photos montrant des détenus d’Abou Ghraib humiliés et maltraités par des militaires américains avait déclenché une indignation mondiale, fragilisant encore plus la position de l’administration de George W. Bush, déjà très critiquée pour sa décision d’envahir l’Irak.