Depuis le passage en Jamaïque de l’ouragan Melissa, le pire de son histoire, les villages tentent de se relever, malgré les maisons et les cultures totalement détruites. « Il va falloir tout recommencer à zéro », confient-ils.
Village agricole niché dans les collines centrales de la Jamaïque, Troy compte environ 250 habitants et vit presque exclusivement de l’agriculture. Les familles y cultivent principalement de l’igname (tubercule tropical, proche de la patate douce) et des bananes. Mais depuis le passage du violent ouragan Melissa le 28 octobre, faisant au moins 28 morts, tout est bouleversé : les champs sont dévastés, de nombreuses maisons ont perdu leur toit, les routes sont bloquées par des arbres et des poteaux électriques sont tombés.
Depuis plusieurs jours, la commune est complètement isolée, sans électricité ni réseau téléphonique. Beaucoup d’habitants n’ont pas pu téléphoner à leurs proches pour les rassurer. (...)
Dans la commune voisine de Wilson’s Run, Isreal Calvin, 70 ans, partage son désarroi : « Je n’ai jamais vu ça depuis que je suis né. Mes 250 buttes d’ignames, mes 100 bananiers, tout est perdu. Il faut même que je paie quelqu’un pour couper les arbres tombés. Il va falloir tout recommencer à zéro. »
Une longue reconstruction
Si les agriculteurs essaient de rester positifs, ils savent qu’ils s’apprêtent à vivre plusieurs mois sans revenus. À court terme, la population devra faire face à une hausse des prix des fruits et légumes locaux, comme après l’ouragan Beryl en 2024. Sur le long terme, la situation pourrait se répéter.
Pour Theresa Rodriguez-Moodie, directrice générale de l’ONG Jamaica Environment Trust, la force et la lenteur de Melissa sont « des signes clairs du changement climatique » : « Les tempêtes deviennent plus puissantes, plus humides et plus destructrices. Pour les Caraïbes, cela signifie des périodes de relèvement plus longues et une pression sociale et économique accrue. Si les émissions mondiales ne diminuent pas drastiquement, ce type d’événement risque de devenir la norme. » (...)
Les Jamaïcains pointent aussi l’importance des mangroves, ces forêts côtières qui protègent du vent, des vagues et de l’érosion. Elles ont fortement diminué en Jamaïque ces dernières décennies, perdant plus d’un tiers de leur superficie, souvent abattues pour laisser place à des constructions touristiques. (...)