Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Mediapart
Procès Sarkozy-Kadhafi : le parquet requiert sept ans de prison ferme contre l’ancien président
#Sarkozy #Libye #procesSarkozy
Article mis en ligne le 28 mars 2025

C’est une première dans l’histoire pénale et politique française : jamais une telle peine n’avait été requise pour un ancien président de la République, décrit par les procureurs comme le « commanditaire » d’un pacte de corruption avec la dictature libyenne.

Le procureur a estimé que l’affaire des financements libyens a dessiné « le tableau très sombre d’une partie de la République ». « Un tableau marqué par une corruption de haute intensité, attisée par l’ambition, la soif de pouvoir, la cupidité et qui a tissé sa toile jusqu’aux plus hautes sphères de l’État. »

Le PNF, qui a mis en lumière depuis le 25 mars l’impressionnante charpente de l’accusation, a également demandé des peines de prison ferme à l’encontre de ses deux principaux lieutenants politiques, Claude Guéant, qui fut son plus proche collaborateur pendant dix ans, et Brice Hortefeux, intime parmi les intimes, tous deux ayant la particularité d’avoir été ministres de l’intérieur de Sarkozy : six ans et 100 000 euros d’amende contre Claude Guéant et trois ans et 150 000 euros d’amende contre Brice Hortefeux.

Les deux hommes étaient absents, Claude Guéant pour des raisons médicales et Brice Hortefeux pour des raisons liées à un deuil récent.

Le parquet a également requis trois ans de prison et 150 000 euros d’amende à l’encontre de l’affairiste Thierry Gaubert, un autre proche de Nicolas Sarkozy dont il fut le collaborateur à la mairie de Neuilly-sur-Seine puis au sein du gouvernement Balladur (1993-1995). Gaubert avait notamment perçu en février 2006 sur un compte aux Bahamas près d’un demi-million d’euros d’argent libyen, inscrivant dans une note d’agenda quelques jours avant de recevoir les fonds la mention « Ns-Campagne ».

Une peine d’un an de prison aménageable (le maximum encouru pour un financement illicite de campagne) a été réclamée contre Éric Woerth, trésorier de la campagne présidentielle de 2007, soupçonné d’avoir laissé circuler des espèces en grosses coupures durant l’élection.

Le procureur a estimé que les faits reprochés aux prévenus « fissurent la confiance dans nos institutions et contribuent au sentiment de désarroi démocratique », affirmant que seule une réponse pénale « dissuasive » serait susceptible d’être porteuse de « lendemains meilleurs » avec l’objectif de « combattre avec force l’impunité dans le domaine des atteintes à la probité ».

Les deux agents de corruption présumés du dossier, Ziad Takieddine et Alexandre Djouhri, dont le procès a montré combien ils avaient pu pénétrer de manière inédite l’intimité des cercles du pouvoir sarkozyste en dépit de leur toxicité notoire, n’échappent pas au scalpel du PNF : six ans et 3 millions d’euros d’amende contre Ziad Takieddine ; 5 ans et 4 millions d’euros d’amende contre Alexandre Djouhri.

Le PNF a en outre requis une peine de six ans de prison et 4 millions d’euros d’amende contre l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi, Bachir Saleh, qui est en fuite.
Une montagne d’éléments objectifs

À partir de la semaine prochaine, il reviendra aux avocats de la défense – il y a douze personnes au total sur le banc des prévenus, qui démentent tous les faits – de répondre à la charge du PNF. Les avocats de Nicolas Sarkozy, défendu par le cabinet Darrois, ont prévu de plaider en toute fin de procès, le 8 avril.

En dépit d’une communication médiatique, qui consiste à dénoncer un dossier « vide » construit sur le sable d’un « complot » monté de toutes pièces par des kadhafistes revanchards après la guerre de Libye en 2011, les avocats de Nicolas Sarkozy et de ses proches n’ignorent pas, en réalité, que la pente est raide. (...)

Lire aussi :

 (France24/AFP)
Financement libyen : sept ans de prison et 300 000 euros d’amende requis contre Nicolas Sarkozy

Cinq ans d’inéligibilité ont également été requis contre Nicolas Sarkozy, qui a accueilli ces réquisitions la mine pétrifiée. L’ancien président de la république a réagi dans la foulée en publiant sur les réseaux sociaux un communiqué dénonçant "l’outrance de la peine réclamée".

 (Libération)
Procès du financement libyen de la campagne Sarkozy : « Les transactions examinées constituent un véritable manuel de la corruption et du blanchiment »

(...) Cinq ans d’inéligibilité ont également été requis contre Nicolas Sarkozy, qui a accueilli ces réquisitions la mine pétrifiée. L’ancien président de la république a réagit dans la foulée en publiant sur les réseaux sociaux un communiqué dénonçant "l’outrance de la peine réclamée". (...)

Nicolas Sarkozy a "contesté les faits" et "ne semble pas prendre la mesure de la gravité des atteintes à la probité" qui lui sont reprochées, a ajouté le magistrat, rappelant qu’il a déjà été condamné. C’est son cinquième procès en cinq ans.(...)

Mardi et mercredi, les procureurs ont dépeint Nicolas Sarkozy en "véritable décisionnaire" et "commanditaire" d’un pacte de corruption "inconcevable, inouï, indécent", noué avec l’ex-dictateur libyen Mouammar Kadhafi pour qu’il finance sa campagne présidentielle de 2007.

Ils ont aussi détaillé les "contreparties" diplomatiques, juridiques et économiques promises selon eux au régime libyen et ont affirmé que des "traces" d’argent liquide dans la campagne victorieuse alimentaient le "faisceau d’indices" du dossier.

Pour les procureurs, tous les délits pour lesquels il est jugé depuis le 6 janvier sont constitués : ils ont demandé au tribunal de le reconnaître coupable de corruption, recel de détournement de fonds publics, financement illégal de campagne et association de malfaiteurs.(...)

Les plaidoiries de la défense attendues le 8 avril (...)

Réunies pour la première fois dans une affaire pénale, les ONG Sherpa, Anticor, et Transparency ont témoigné lundi 24 mars au tribunal de Paris en tant que parties civiles (...)

« Ce procès chimiquement pur, clair comme de l’eau de roche, c’est la caverne d’Ali Bava », déclare Vincent Brengarth, avocat de l’ONG Sherpa, omniprésent au cours des deux mois de débats au fond.

A l’audience, le président de la section française de Transparency, Patrick Lefas, avait résumé l’enjeu du procès en cours. « En matière de corruption, la preuve parfaite et absolue n’existe pas. Mais les transactions examinées constituent un véritable manuel de la corruption et du blanchiment : omniprésence d’intermédiaires aux rôles et missions opaques, enchevêtrement de comptes bancaires ouverts dans des juridictions non-coopératives, flux financiers sans la moindre activité économique légale, prête-noms, sociétés écrans, achat de biens immobiliers et objets d’arts… »

Par la voix de Me Claire Josserand-Schmidt, l’association Anticor, également partie civile, se concentre plus sur la forme que sur le fond : « On nous dit qu’il n’y a pas de victimes de la corruption, comme un meurtre sans corps. Mais c’est le corps social dans son ensemble qui est victime. » (...)