Vicky est arrivée en France en 2008 avec sa fille de deux ans, Rayana. Elle est alors enceinte de quatre mois et a fait un voyage épuisant (terre et bateau). Sa deuxième fille, Sabrina, naît en France en mars 2009.

Vicky venait de Libye où son mari, commerçant soudanais, l’avait laissée ; elle n’avait pas anticipé cet abandon qu’elle n’envisageait même pas. Réputée érythréenne par son père, Vicky a toujours vécu en Ethiopie d’où sa mère était originaire.

En 1999, pendant la guerre entre ces deux pays, la famille de Vicky a été déportée d’Ethiopie dans un camp du sud de l’Erythrée. Ils ont été séparés de la mère dont on n’a plus de nouvelles. Le père meurt de chagrin en 2000. Le frère et la soeur aînés sont enrôlés dans l’armée érythréenne : plus de nouvelles non plus.

En 2000, Vicky, alors âgée de dix-huit ans, s’enfuit accompagnée d’un autre jeune pour échapper à la conscription ; celui-ci a été repris : il est mort sous la torture dans une prison érythréenne.

Vicky avait recréé une vie sociale au Soudan, toujours en situation irrégulière. Elle y travaillait, s’y était mariée religieusement et y avait eu sa première fille, Rayana, en septembre 2006.

Aujourd’hui l’Ethiopie ne reconnaît pas Vicky, le Soudan non plus. Aller vivre en Erythrée avec ses deux filles, Rayana et Sabrina, sans mari, sans aucune famille ? Qu’est-ce qui l’attend ? La prison, la rue, l’excision pour ses filles ? (...)
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