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Mediapart
Pendant sa trêve olympique, Macron gouverne comme si de rien n’était
#electionseuropeennes #electionslegislatives #extremedroite #Macron #dissolution #gauches #FrontPopulaire
Article mis en ligne le 3 août 2024
dernière modification le 1er août 2024

Le camp présidentiel a perdu deux élections en un mois, la France n’a plus de gouvernement de plein exercice, le Parlement est en veille, mais l’exécutif continue de gouverner comme si de rien n’était. Sahara occidental, nominations diplomatiques, mouvements préfectoraux : les décisions se multiplient, les critiques aussi.

En apparence, ce n’est qu’un courrier amical du président de la République au roi du Maroc, à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de son accession au pouvoir. Dans la missive, rendue publique mardi 30 juillet, Emmanuel Macron annonce le soutien de Paris au plan de souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, rompant avec la position tenue par la diplomatie française depuis plus de trente ans.

« Je considère que le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine », écrit le chef de l’État. L’affaire a suscité la condamnation de l’Algérie, qui a annoncé dans la foulée le retrait de son ambassadeur en France, et la colère d’une partie de la gauche, qui invoque le « respect du droit international » et le « droit à l’autodétermination du peuple sahraoui » pour dénoncer une « trahison » présidentielle.

Les critiques ne se sont toutefois pas limitées à la teneur de la position exprimée par Emmanuel Macron. Plusieurs personnalités politiques ont dénoncé le timing et la légitimité d’une telle décision, au vu du contexte politique national. « C’est une décision grave et une erreur historique prise par un seul homme, à la tête d’un État sans gouvernement ni majorité », s’est par exemple indignée Marine Tondelier, secrétaire nationale du parti Les Écologistes. (...)

Le chef de l’État n’avait-il pas lui-même décrété une « trêve olympique et politique », appelant à se concentrer sur la bonne tenue de Paris 2024 ? Au-delà des contingences sportives, la position politique d’Emmanuel Macron ne plaide pas en faveur de grandes révolutions : ses soutiens ont perdu les élections européennes le 9 juin puis les élections législatives le 7 juillet. À l’Assemblée nationale, ses troupes n’ont plus de majorité, ni absolue ni relative. Et le gouvernement de Gabriel Attal a démissionné le 16 juillet, se contentant – en théorie – d’expédier les affaires courantes.

Sans se prononcer sur la légitimité politique d’Emmanuel Macron à agir en ce sens, plusieurs constitutionnalistes soulèvent le débat juridique lié à cette situation. (...)

Avant le Sahara occidental, c’est une autre décision diplomatique qui avait suscité le courroux des oppositions de gauche. Par un courrier adressé le 26 juillet à Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, Emmanuel Macron a acté le soutien de la France au renouvellement de Thierry Breton en tant que commissaire. Un « nouveau coup de force insupportable », a dénoncé sur le réseau social X Manuel Bompard, le coordinateur national de La France insoumise (LFI).

Recasages en série au gouvernement (...)

Les nominations, au cœur des prérogatives de l’exécutif, ont été nombreuses depuis la dissolution de l’Assemblée nationale. Et l’heure est aux recasages, en prévision d’une éventuelle cohabitation. Lors du dernier conseil des ministres, le 16 juillet, ont été actées toute une série d’affectations très politiques. Valérie Delnaud, la directrice de cabinet d’Éric Dupond-Moretti, a été nommée directrice des affaires civiles et du sceau au ministère de la justice – un des postes les plus prestigieux de la Chancellerie.

Brice Huet, directeur de cabinet d’Hervé Berville au secrétariat d’État à la mer et à la biodiversité, est devenu délégué interministériel au développement durable. Olivier Ginez, ancien directeur de cabinet de Sylvie Retailleau au ministère de l’enseignement supérieur, a été nommé directeur général de l’enseignement supérieur et de la recherche. Maëlig Le Bayon, directeur de cabinet de Fadila Khattabi, chargée des personnes handicapées et des personnes âgées, a été nommé directeur national de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
Le PS alerte le Conseil d’État

Une vague de recasages qui a un intérêt double pour le pouvoir. D’une part, remercier des collaborateurs fidèles, dont le contrat de travail prend automatiquement fin avec la démission de leur ministre. D’autre part, s’assurer des relais politiques et loyaux au sein de la haute administration, une denrée précieuse en cas de cohabitation à venir.

Et la moisson devait être plus foisonnante encore. Gérald Darmanin bataille depuis plusieurs semaines pour que son directeur de cabinet, Alexis Brugère, soit nommé directeur général de la police nationale. L’hypothèse, qui a fuité dans la presse, a soulevé une levée de boucliers jusqu’à l’Élysée. Elle est pour l’instant au point mort, comme un certain nombre de mouvements préfectoraux.

La situation a poussé le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, à alerter le Conseil d’État. (...)

La missive du socialiste n’a toutefois aucune chance d’aboutir, ne relevant pas d’un recours formel à la juridiction administrative. Pendant ce temps-là, le gouvernement ne semble pas freiné dans ses ardeurs. Le 26 juillet a ainsi été publiée au Journal officiel la nomination d’un nouvel ambassadeur en Arabie saoudite, Patrick Maisonnave. « L’exécutif veut un profil plus politique » à Riyad, affirmait en mai une source « bien informée » citée par le magazine Challenges.

D’autres postes prestigieux sont encore à pourvoir et surveillés de près à l’Élysée et à Matignon. (...)