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Mission de Frontex en Bulgarie : l’aide aux retours volontaires en question
#UE #Frontex #migrants #immigration #Bulgarie
Article mis en ligne le 31 janvier 2025
dernière modification le 29 janvier 2025

En mars 2023, la Commission européenne et les autorités bulgares ont lancé un projet pilote d’aide aux retours volontaires depuis ce pays, récemment entré dans l’espace Schengen. Mis en place à partir de mars 2024, le projet suscite l’inquiétude de nombreux observateurs en raison des violations de droits fondamentaux observées en Bulgarie.

C’est un pays souvent décrit comme un enfer par les migrants qui y sont passés, en raison de la violence policière, des vols ou des refoulements subis. Pourtant, la Bulgarie a été choisie en mars 2023, avec la Roumanie, par la Commission européenne pour le lancement d’un projet pilote de retours volontaires à destination des migrants.

Ces deux pays sont pleinement entrés dans l’espace Schengen le 1er janvier 2025, après y avoir mis mis un premier pied en mars 2024. Ils sont donc aujourd’hui des portes d’entrée de l’espace de libre circulation européenne. Mais, dans un rapport de l’organisation Statewatch publié le 13 janvier dernier, plusieurs observateurs des politiques migratoires européennes s’alarment de la mise en place de ce projet de retours volontaires dans un pays ne respectant pas les droits fondamentaux des exilés.

Le projet de retours volontaires depuis la Bulgarie et la Roumanie repose sur le déploiement d’agents de "conseillers en retour" de Frontex. Depuis 2019, le rôle et les missions de l’agence européenne de surveillance des frontières ont été élargis et comprennent désormais le conseil pour les retours volontaires.

"Agents d’escorte" et "spécialistes du retour " (...)

Concrètement, un retour dit volontaire consiste à inciter une personne à rentrer dans son pays en échange d’une somme d’argent censée lui permettre de se réintégrer. Le programme de retours volontaires depuis la Bulgarie prévoit ainsi de fournir aux personnes concernées des sommes "pouvant aller jusqu’à 900 euros", détaille Statewatch. "L’aide à la réintégration - contribution en nature destinée à soutenir la réintégration d’une personne après son retour - a également été augmentée, passant de 1 000 euros à un maximum de 3 000 euros, et pour les familles, de 2 000 euros à un maximum de 7 000 euros", ajoute l’organisation dans son rapport.

Test du Pacte asile et migration (...)

Alors que c’est généralement l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) qui est en charge des retours volontaires de migrants, la Commission européenne a chargé Frontex de cette mission dans le Pacte asile et migration signé en 2024.

Marie-Laure Basilien-Gainche, professeure de droit à l’université Jean Moulin Lyon 3 et chercheuse à l’Institut Convergences Migrations remarque que le projet pilote de retours volontaires mis en place en Bulgarie ressemble fort au contenu du texte européen. "Le Pacte européen sur l’asile et la migration doit être mis en œuvre avant juin 2026 et on peut estimer qu’il a été essayé sur les terrains bulgare et roumain. La Commission européenne a pu l’imposer à ces deux États parce qu’ils allaient entrer dans l’espace Schengen", analyse la chercheuse interrogée par InfoMigrants. (...)
Des retours vraiment volontaires ?

Mais les retours volontaires depuis la Bulgarie portent-ils bien leur nom ? Frontex a indiqué à InfoMigrants que ses agents spécialisés en retours en Bulgarie travaillaient "principalement en centres de détention".

De quoi empêcher tout caractère réellement volontaire du retour, selon Reinhard Schweitzer, professeur de recherche sur les migrations à l’université Abat Oliba CEU de Barcelone, interrogé par Statewatch.

"En supposant qu’il y ait quelque chose que l’on puisse appeler le caractère volontaire, il reposerait au moins sur trois éléments. Le plus évident est l’absence de coercition... La décision [du retour] doit également être fondée sur des informations impartiales et fiables, qui inspirent confiance […] Le troisième élément est la disponibilité d’alternatives acceptables", affirme le chercheur. (...)

Non respect des droits fondamentaux

Le choix de la Bulgarie pour lancer le projet pilote de retour volontaires pose également question. Dans ce pays des Balkans, frontaliers de la Turquie, les cas de refoulements de migrants et violences policières sont légion. InfoMigrants a recueilli de très nombreux témoignages d’exilés violentés dans le pays ou refoulés à la frontière. Une pratique pourtant illégale au regard du "principe de non-refoulement" consacré par l’article 33 de la Convention de Genève sur le droit des réfugiés. (...)