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« Les universités jugées wokistes sont mal notées » : la gauche veut supprimer le Hcéres
#universites #evaluations #HCeres
Article mis en ligne le 1er avril 2025
dernière modification le 29 mars 2025

Absence de neutralité, enseignements jugés « wokistes »... La gauche pourrait faire supprimer le Hcéres, qui évalue les universités et les établissements de recherche, grâce à un amendement du député Hendrik Davi.

Le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres) suscite une vague d’indignation croissante dans les universités depuis plusieurs mois. Cette instance est dénoncée par plusieurs syndicats de l’enseignement pour ses évaluations ubuesques, déconnectées de la réalité du terrain et un taux inédit « d’avis défavorables », qui cibleraient particulièrement les sciences sociales et les établissements situés en zones défavorisées.

Hendrik Davi, député du Nouveau Front populaire (NFP) et ancien directeur de recherche en écologie forestière à l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), a obtenu en commission spéciale à l’Assemblée nationale le vote d’un amendement visant à supprimer le Hcéres, dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. Le texte doit être débattu en séance publique à partir du 8 avril.

Hendrik Davi — Cette instance est liée à la volonté de transformer profondément la manière dont fonctionne la recherche. À partir des années 2000, nous sommes passés d’un système de service public, avec des crédits récurrents et des fonctionnaires, à un système où les chercheurs doivent jouer aux entrepreneurs en permanence pour trouver de l’argent, des projets et sont de plus en plus précaires.

L’Agence nationale de la recherche (ANR) s’occupe de financer, et le Hcéres de dire qui sont les bons et mauvais élèves. Par ses normes et ses logiques, il a poussé à une compétition de plus en plus importante entre laboratoires. Il fait du management néolibéral, le même qui avait été mis en place par IBM dans les années 1970, suivi par d’autres entreprises de la tech, avant qu’elles y renoncent en raison du trop grand nombre de suicides [dû à une gestion déshumanisante du travail, comme chez Orange]. (...)

Le Hcéres est un outil utilisé par le gouvernement pour sortir la tronçonneuse et justifier de nouvelles coupes budgétaires. Ce n’est pas un hasard si les unités les plus mal notées sont souvent celles de sociologie et de tout ce qui est pointé du doigt comme étant « wokiste ». Le très bon livre Gouverner la science (éd. Agone, 2022) avait déjà montré que les personnes nommées dans cette instance étaient tout sauf neutres : il s’agit de gens issus de l’appareil d’État, acquis à une vision libérale du monde, aux vertus de la « concurrence libre et non faussée », etc.

« La liberté académique est fondamentale » (...)

L’amendement de suppression du Hcéres a-t-il des chances d’être adopté en séance plénière à l’Assemblée nationale ?

Le rapporteur du projet de loi y est favorable. La gauche est pour et le Rassemblement national également, ainsi qu’une partie du centre. Je pense qu’on aura une majorité pour le vote à l’Assemblée. La discussion doit commencer le 8 avril et le vote doit avoir lieu le 11 avril. (...)

Cette défense mordicus de la liberté académique, qui garantit que la communauté de scientifiques décide de ce qui est vrai ou non dans sa discipline, des orientations de ses recherches, est fondamentale. Sans cette indépendance de la recherche vis-à-vis du pouvoir politique, tout s’effondre, comme aux États-Unis en ce moment.

Le glissement du discours politique est à ce titre inquiétant. (...)

La science est un champ de bataille depuis des siècles. Si l’on casse cette liberté académique, c’est très grave, c’est la fin de la liberté de la recherche.