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Mediapart
Le youtubeur ExperimentBoy condamné à deux ans de prison avec sursis pour corruption de mineurs
#enfants #agressionssexuelles
Article mis en ligne le 30 octobre 2024

Mardi 15 octobre, Baptiste Mortier-Dumont a été condamné à 24 mois de prison avec sursis pour corruption de mineurs, sur trois victimes. C’est la première fois qu’un youtubeur français influent est condamné pour de tels faits. Il compte faire appel.

(...) Ce jugement s’accompagne d’une interdiction de prise de contact avec les victimes pendant trois ans, interdiction d’exercer toute activité en lien avec des mineurs à vie et une inscription au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes.

C’est la première fois qu’une figure aussi influente de l’écosystème YouTube est condamnée par la justice pour ce genre de faits. (...)

Sept témoignages, trois victimes retenues

Bien que beaucoup d’adultes ne le connaissent pas, ExperimentBoy est un youtubeur français célèbre. En 2020, sa chaîne était suivie par plus de un million d’abonné·es, réparti·es très largement dans la tranche des « 13-24 ans ».

Quentin, seule victime à avoir témoigné lors du procès, a relaté devant le tribunal comment le youtubeur, à l’époque âgé de 23 ans, l’a abordé sur Twitter, alors qu’il était très jeune. « À cet âge-là, on a encore une sexualité inexistante… À 13 ans, on est juste en train de se construire. Au début, la discussion était amicale, mais en vingt-quatre heures, c’est parti sur du sexuel. » Pendant près d’un an, Baptiste Mortier-Dumont lui aurait enjoint de se masturber simultanément avec lui en vidéo, « une à deux fois par semaine ».

Deux autres victimes étaient citées au procès, l’une dénonçant des faits de corruption sur mineur de moins de 15 ans, l’autre, de plus de 15 ans. Le dossier dont disposait la justice comptait cependant davantage de cas individuels.

En juin 2020, Romuald, un ancien fan du youtubeur, a compilé une demi-douzaine de témoignages dénonçant des faits d’une gravité inédite dans le monde du YouTube français. Ils accusaient le vidéaste d’avoir profité de sa notoriété pour solliciter des échanges à caractère sexuel à distance, d’avoir demandé des photos intimes à des mineurs et d’en avoir envoyé en retour.

Une enquête de Numerama, publiée dans la foulée, fin août 2020, a retracé les récits d’au moins cinq victimes mineures au moment des faits, s’étendant entre 2013 et 2019. (...)

À l’issue d’une demi-journée d’échanges devant le tribunal de Val-de-Briey, le ministère public avait fini par demander dix mois de prison avec sursis simple assorti d’une obligation de soins, d’une inscription au registre des auteurs des infractions sexuelles et de l’interdiction d’exercer une profession en lien avec des mineurs pendant cinq ans (...)

Pas de perquisition, aucune garde à vue

« Mon client a été auditionné une seule fois, pendant une heure et demie, en quatre ans », avait quant à lui martelé Bruno Bourchenin, l’avocat d’ExperimentBoy, qui avait axé sa ligne de défense sur une procédure qu’il considère comme bâclée. « On n’a fait aucune expertise sur le matériel informatique, pas d’exploitation du téléphone portable. Il fallait le faire depuis le début ! Il y en avait, pourtant, des choses à vérifier ! Ce choix procédural n’est aucunement imputable à la défense », avait-il avancé à l’audience.

Baptiste Mortier-Dumont n’a en effet été entendu qu’une seule fois, en octobre 2022, soit plus de deux ans après l’ouverture de l’enquête par le parquet de Lyon. Il n’a pas fait l’objet d’une garde à vue. Bien que les victimes et témoins fassent mention de nombreux documents, photos, vidéos et échanges écrits produits sur plusieurs messageries en ligne, aucune perquisition n’a été faite au domicile du youtubeur, qui a déménagé de chez sa mère dans le sud de la France pour aller s’installer dans le Grand Est.

Pour justifier ce délai, le tribunal de Val-de-Briey avait évoqué des « témoins éparpillés aux quatre coins de la France » ainsi que « l’engorgement » de services de police, sur fond d’une pandémie de Covid-19 qui aurait ralenti les procédures.