
La proposition de loi portée par la droite sénatoriale et qui visait à « assouplir » les objectifs jugés trop contraignants du « ZAN » a été adoptée à une écrasante majorité, y compris les communistes. Les Écologistes dénoncent un « permis de bétonniser ».
Que restera-t-il du « zéro artificialisation » édicté dans la loi « climat et résilience » de 2021 ? Quatre ans après l’adoption de ce texte qui vise à réduire de moitié d’ici à 2030 le rythme d’artificialisation des sols pour parvenir au « zéro artificialisation nette » (ZAN) en 2050, le Sénat vient de procéder à ce qui ressemble bien à son dépeçage en règle.
La proposition de loi adoptée en première relecture au Sénat, mardi 18 mars, à une écrasante majorité (277 voix pour, 17 contre) attaque en effet les principaux piliers de la loi.
Moins de deux ans après une proposition de loi du Sénat qui assouplissait déjà le ZAN, les sénateurs ont voulu planter un nouveau clou dans le cercueil d’une mesure qu’ils jugent irréalisable, en particulier dans la ruralité. (...)
Contre l’avis du gouvernement, qui proposait de décaler l’objectif de baisse de moitié de l’artificialisation de 2030 à 2034, la droite sénatoriale a concrètement fait sauter tout objectif intermédiaire coercitif et l’a remplacé par une « trajectoire nationale de sobriété foncière » sur une base contractuelle, à la main des régions. En clair, si une région ne veut baisser que de 15 % son rythme d’artificialisation, au lieu des 50 % initialement prévus par la loi, elle aura tout loisir de le faire.
« Un permis de bétonniser », selon le groupe écologiste, qui s’est retrouvé un peu seul dans l’hémicycle contre ce texte soutenu à gauche par le groupe communiste au nom de la « confiance redonnée aux élus ». Les socialistes qui, par la voix du sénateur Christian Redon-Sarrazy, ont regretté une proposition de loi « irresponsable » qui consiste à « nier la réalité du changement climatique et notre retard pour y faire face », se sont finalement abstenus. (...)
Étalement urbain hors de contrôle
La droite sénatoriale a fait voter une impressionnante liste de projets qui ne seront plus décomptés dans l’artificialisation des sols. Ainsi des implantations industrielles et des infrastructures permettant leur raccordement électrique, des logements sociaux dans les communes qui ne respectent pas la loi « solidarité et de renouvellement urbain » (SRU) – qui impose 25 % de logements sociaux –, des implantations d’énergies renouvelables, des constructions nécessaires aux services d’eau et d’assainissement…
« Et même les lycées ! », s’est indigné le sénateur écologiste Ronan Dantec, qui a dénoncé « une loi de posture et de surenchère » qui donne une « prime aux mauvais élèves », alors que les collectivités, dans leur grande majorité, ont déjà intégré le ZAN dans leurs documents d’urbanisme.
Le groupe écologiste a insisté sur les contradictions d’une droite qui s’est présentée ces derniers mois comme la grande défenseuse des agriculteurs et qui pourtant propose un texte qui fait sauter toutes les protections des terres agricoles, au risque de remettre en cause la souveraineté alimentaire de la France. (...)
L’Assemblée nationale examinera le texte au mois de juin. À gauche, beaucoup espèrent que les députés redonneront un peu de consistance à l’objectif de sortir de la bétonnisation à tout-va porté par la loi de 2021.