
L’Office fédéral de protection de la Constitution a classé vendredi l’ensemble du parti Alternative pour l’Allemagne, arrivé en seconde position des législatives de février, comme un mouvement « extrémiste de droite avéré », ce qui doit permettre son placement sous surveillance intensive.
Les « ennemis de la démocratie » doivent être « combattus avec tous les moyens politiques et juridiques disponibles jusqu’à ce que le danger pour notre démocratie libérale soit écarté », a ainsi réagi le député social-démocrate Ralf Stegner auprès du journal Handelsblatt. (...)
« Propagation de préjugés »
Le BfV travaillait depuis plusieurs mois sur sa décision. Selon les informations du Spiegel, l’autorité a terminé cette semaine la réévaluation du parti et l’a soumise au ministère de l’intérieur, à la tête duquel le conservateur Alexander Dobrindt (CSU) devrait succéder à Nancy Faeser mardi 6 mai. Le rapport, pas encore publié, compterait plus de 1 100 pages et contiendrait de nombreux éléments de preuve qui étayent la nature anticonstitutionnelle du parti d’extrême droite. (...)
Selon le BfV, « la conception du peuple fondée sur l’origine ethnique » qui prévaut au sein du parti est « incompatible avec l’ordre fondamental démocratique et libéral ». L’Office fédéral souligne en particulier « l’attitude globalement hostile aux migrants et aux musulmans du parti » dans son ensemble. « L’agitation continue contre les réfugiés ou les migrants favorise la propagation et l’approfondissement de préjugés, ressentiments et peurs envers ce groupe de personnes », estime encore le service de renseignement. (...)
Un parti toujours plus extrême (...)
Lors de la campagne des législatives, la candidate à la chancellerie Alice Weidel a employé le terme de « remigration », qui désigne un concept d’expulsion massive de personnes étrangères ou d’origine étrangère, et a affirmé qu’Adolf Hitler était un communiste. Pendant le carnaval, des responsables du mouvement se sont déguisés en « pilotes de déportation » et ont distribué aux enfants des bonbons de gélatine en forme d’avion.
Le slogan de campagne « Alice für Deutschland » (« Alice pour l’Allemagne ») évoquait lui-même la devise de la Sturmabteilung (SA), organisation paramilitaire du Parti national-socialiste des travailleurs allemands, « Alles für Deutschland » (« Tout pour l’Allemagne »). L’AfD le sait parfaitement, puisque l’une de ses figures, Björn Höcke, a été condamnée en mai 2024 pour l’avoir utilisé lors d’un meeting.
Mais rien de tout cela n’a empêché l’AfD de réaliser une percée aux élections du 23 février, où la formation est arrivée pour la première fois en seconde position du scrutin fédéral, avec 20,8 % des voix. 152 député·es d’extrême droite siègent désormais au Bundestag, soit quasiment le double de leur nombre au cours de la législature précédente. (...)
Des enquêtes judiciaires ont aussi mis en lumière les liens du parti avec l’extrémisme de droite violent. En novembre, le procureur général fédéral a arrêté huit hommes accusés d’avoir formé la cellule terroriste des « Séparatistes saxons ». Trois d’entre eux étaient membres de l’AfD. Une ancienne députée au Bundestag, Birgit Malsack-Winkemann, est par ailleurs en détention depuis plus de deux ans, accusée d’avoir planifié un coup d’État avec le groupe des « citoyens du Reich ».