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Le coût environnemental de l’IA
#IA #eau
Article mis en ligne le 7 avril 2025
dernière modification le 2 avril 2025

Comment l’intelligence artificielle et ses data centers s’accaparent l’eau

La consommation d’eau de l’intelligence artificielle est souvent oubliée des discussions sur l’impact de cette technologie. Pourtant, les centres de données consomment chaque année des milliards de mètres cubes d’eau – et cela risque d’empirer.

Google a soif. En 2023, les centres de données et les bureaux de la multinationale du numérique ont à eux seuls englouti 24 milliards de litres d’eau – dont la grande majorité utilisée par les data centers. C’est l’équivalent de la consommation d’eau annuelle d’environ 453 000 Français. La question des besoins en eau est l’un des grands enjeux environnementaux du numérique. Il est amplifié par le développement rapide et incontrôlé de l’intelligence artificielle (IA).

Chaque année, les grandes entreprises de la tech augmentent de dizaines de pourcents leur consommation d’eau. (...)

Des centres de données géants dans des régions en proie à la sécheresse

Les ressources en eau globales sont déjà mises en danger par le réchauffement climatique. De nombreuses régions du monde sont en stress hydrique (...)

Le développement et la massification de l’utilisation de l’intelligence artificielle entraînent les entreprises dans une course effrénée à la construction de centres de données, sans considérer les conséquences écologiques et sociales. Selon une étude menée par des chercheurs et chercheuses de l’Université de Cornell, aux États-Unis, en 2023, « la demande mondiale en IA devrait représenter 4,2 à 6,6 milliards de mètres cubes d’eau en 2027, soit plus que le prélèvement annuel total d’eau de quatre à six Danemark ou de la moitié du Royaume-Uni ».

 L’IA générative a le potentiel de détruire la planète (mais pas comme vous le pensez)

Le risque premier avec l’intelligence artificielle n’est pas qu’elle s’attaque aux humains comme dans un scénario de science-fiction. Mais plutôt qu’elle participe à détruire notre environnement en contribuant au réchauffement climatique. (...)

Des deux côtés de l’Atlantique, ces centaines de milliards seront principalement investis dans la construction de nouveaux centres de données pour entraîner puis faire fonctionner les outils d’intelligence artificielle. Pourtant, les impacts environnementaux de ces « data centers », mis de côté dans ce sprint à l’IA, présentent un danger réel pour notre planète.

« Plus grand est le modèle, mieux c’est » (...)

Avec leurs dizaines voire centaines de milliards de paramètres et des terabytes de données pour les alimenter, faire tourner les systèmes d’IA générative demande beaucoup de puissance de calcul de serveurs, situés dans des centres de données. Donc beaucoup d’électricité.

Ces chiffres ne font qu’augmenter à mesure que les modèles se perfectionnent. (...)

Selon une étude, début 2023, une requête ChatGPT consommait environ 2,9 Wh d’électricité, soit presque dix fois plus qu’une simple recherche Google (0,3 Wh). D’autres études estiment l’impact carbone d’une requête à ChatGPT autour de 4 à 5 grammes d’équivalent CO2. (...)

Produire une image, c’est pire. (...)

Pour donner un ordre d’idée, générer 1000 images correspondrait à conduire environ 7 kilomètres avec une voiture essence. En comparaison, 1000 textes générés équivalent à moins d’un 1 mètre parcouru avec un même véhicule. Mais leur utilisation massive rend cet impact non négligeable. Selon le PDG d’OpenAI Sam Altman,, à la fin de l’année 2024, plus d’un milliard de requêtes étaient envoyées à ChatGPT par jour.

En janvier 2023, soit quelques mois après qu’elle a été rendue accessible au public, ChatGPT avait accumulé 100 millions d’utilisateurs. Selon une estimation de Data for Good, rien que ce mois-là, l’utilisation de ChatGPT aurait pollué à hauteur de 10 113 tonnes équivalent CO2 – soit environ 5700 allers-retours en avion entre Paris et New (...)

Une explosion de la consommation d’électricité (...)

Une autre étude de l’ONG Beyond Fossils Fuels est encore plus alarmiste : « Au cours des six prochaines années, l’explosion de la demande en énergie des centres de données dans l’UE [Union européenne] pourrait entraîner une hausse de 121 millions de tonnes des émissions de CO2, soit presque l’équivalent des émissions totales de toutes les centrales électriques au gaz d’Italie, d’Allemagne et du Royaume-Uni en 2024 combinées » écrit l’ONG en février 2025. (...)

Les grandes entreprises de la tech cherchent à faire oublier leurs promesses écologiques. Selon le Financial Times, dans un article d’août 2024, les Gafam tentent de remettre en cause les règles de « zéro carbone net » qui leur permettent de compenser leurs émissions de CO2 par le financement d’énergies renouvelables (des règles déjà critiquées pour leur mode de calcul qui dissimule une grande partie de l’impact carbone réel de leurs consommation d’électricité). (...)

Des investissements massifs aux dépens des populations

Les chefs d’État des États-Unis comme de la France ont pourtant annoncé des investissements massifs dans l’IA pour les années à venir. L’Union européenne, par la voix d’Ursula von der Leyen, a également annoncé un investissement de 200 milliards en partenariat avec de grands groupes.

Dans les trois cas, ces centaines de milliards d’euros sur la table serviront majoritairement à construire des centres de données pour permettre l’entraînement puis l’utilisation de ces technologies (...)

 [« Si une seule IA est utilisée, on va se retrouver à tous penser et parler comme ChatGPT »->https://basta.media/Avec-une-seule-IA-on-va-se-retrouver-a-penser-et-parler-comme-ChatGPT

L’utilisation de l’intelligence artificielle peut-elle être responsable et éthique ? Face aux risques environnementaux, sociétaux et humains de l’IA, la spécialiste Amélie Cordier avance des pistes de solutions. Entretien.

Accessible au grand public depuis fin 2022, ChatGPT est devenu l’un des sites les plus visités au monde. Écrire un mail professionnel, poser une question pratique, traduire un message ou résumer un long texte, l’outil d’intelligence artificielle (IA) générative a pris une place centrale dans la vie de nombreuses personnes. Une utilisation croissante, qui laisse poindre des inquiétudes : si nous ne repensons pas nos usages, l’IA pourrait bien mettre en danger le climat, nos sociétés, et nous-mêmes.

Amélie Cordier est fondatrice et dirigeante de Graine d’IA, une entreprise de conseil et d’accompagnement à un usage responsable de l’IA. Docteure en intelligence artificielle, elle a été maîtresse de conférence à l’Université de Lyon. Selon elle, il est indispensable de comprendre ce qu’est l’intelligence artificielle pour bien utiliser cet outil dans le respect de la société et l’environnement. (...)

avec les IA génératives, on entre dans une dimension de problèmes vraiment différente de ce que l’on a connu jusque-là. Aujourd’hui, les intelligences artificielles génératives sont capables d’aborder des problèmes de tous types, dans n’importe quel domaine de la vie courante. On peut demander à la même IA des conseils pour aller pêcher la truite dans le lac du coin, comme des explications sur la différence entre la tumeur X et la tumeur Y. Cette application de l’IA donne l’illusion qu’elle peut répondre à tout et n’importe quoi. L’humain le perçoit comme une sorte de menace parce que c’est la première fois qu’on arrive à automatiser des tâches qui étaient jusqu’à présent des tâches intellectuelles, que l’on pensait l’apanage de l’être humain conscient. (...)

Que ce soient moi, les plus grands penseurs, des philosophes comme Yuval Noah Harari, ou bien Elon Musk et Donald Trump, on a tous des intérêts différents, mais on a un point commun : nous sommes incapables de maîtriser l’ampleur et l’ensemble des conséquences du développement massif de l’IA. Les gens vont se l’approprier et créer des usages qu’on ne peut pas anticiper. À l’époque où Tim Berners-Lee a créé le web, il avait une vague idée utopiste de ce que cela pourrait devenir, mais il n’avait pas pensé au quart des usages du web que l’on fait aujourd’hui.

Pourquoi avoir créé Graine d’IA ?

Je pense qu’interdire ne fonctionnera pas. Légiférer, c’est bien, mais ça ne fonctionnera que partiellement et de toute façon trop tard. La seule barrière qui reste pour limiter la bêtise humaine, c’est l’acculturation (...)

Aujourd’hui, pour conduire une voiture, il faut passer le code de la route et le permis. À quoi sert de passer le code de la route et le permis ? On apprend les règles de fonctionnement et on prend conscience des risques de conduire une voiture dans l’environnement dans lequel on vit. Avec l’intelligence artificielle, ça devrait être pareil. On devrait passer le code de la route de l’IA et avoir un permis d’utiliser l’IA. (...)

il est vraiment crucial de faire comprendre aux gens qu’il existe des alternatives. Même si elles sont moins bonnes, il faut continuer à les utiliser. Sinon, ces alternatives vont disparaître et on va se retrouver dans une situation monopolistique où il y aura une IA qui gouvernera toutes les autres, qui sera la seule utilisée dans toutes les entreprises. Il ne faut pas oublier que ces modèles sont des modèles statistiques, avec un nivellement par le centre de tout ce que l’on doit se dire, connaître, penser, savoir. Ce qu’il va se passer, c’est que si on n’encourage pas le développement d’alternatives, on va se retrouver à tous penser et parler comme ChatGPT.