
Des personnes en situation de handicap s’estiment exclues des luttes écologistes. De la difficulté de participer aux actions à la contradiction entre leurs convictions et leurs besoins, elles veulent faire entendre leurs voix.
(...) « Les personnes “handies” sont parmi les premières victimes du dérèglement climatique. Elles subissent de manière disproportionnée les impacts des catastrophes naturelles », rappelle un texte de Ahmed Hammad, militant antivalidiste d’Handi-Social, lu au public par Sophie Lombard, également membre de l’association.
Le handicap, angle mort de la transition (...)
Face à l’urgence climatique, les mouvements écologistes appellent à repenser nos modes de vie et à privilégier la sobriété. Mais cette transition indispensable laisse souvent de côté les personnes en situation de handicap, estiment plusieurs collectifs. (...)
« Si certains collectifs militants, notamment d’extrême gauche, développent une sensibilité croissante sur ces enjeux, la plupart des espaces écologistes reproduisent malgré eux les mêmes logiques d’exclusion que le reste de la société », s’attriste aussi Odile Maurin. (...)
Des mobilisations écologistes difficilement accessibles (...)
À la zad de Notre-Dame-des-Landes, par exemple, les infrastructures improvisées ont laissé de côté les besoins des personnes en situation de handicap. (...)
Ces obstacles physiques ne traduisent pas nécessairement un manque de volonté des militants, mais révèlent une absence d’anticipation et d’intégration des besoins spécifiques dès la conception des actions. Résultat : les personnes handicapées physiques, se retrouvent contraintes de rester en marge des mobilisations. Ce phénomène renforce leur invisibilisation au sein des mouvements écologistes et souligne l’urgence de repenser les formes d’engagement pour les rendre véritablement inclusives.
Des infrastructures écologiques inadaptées
Les politiques de transition écologique misent sur des transports et des aménagements urbains plus durables. Pourtant, ces infrastructures négligent aussi souvent les besoins des personnes handicapées. Les trains, par exemple, sont présentés comme des alternatives à la voiture individuelle, mais restent inaccessibles pour une partie de la population. (...)
Une piétonnisation excluante
La piétonnisation des centre-villes, largement soutenue par les militants écologistes, illustre également ce paradoxe. (...)
Pour Odile Maurin, la glorification de l’autonomie est largement incompatible avec sa réalité : « J’ai quelqu’un qui m’accompagne matin et soir pour m’aider au quotidien. »
Réduire l’usage des appareils électroménagers, par exemple, est présenté comme un geste écologique évident. Pourtant, ces équipements sont souvent essentiels pour alléger des tâches physiques et préserver l’autonomie de nombreuses personnes (...)
Vers un militantisme plus inclusif
Pourtant, des pistes existent. Reconnaître la valeur du militantisme numérique, par exemple, permettrait à ceux qui ne peuvent pas se déplacer de participer activement aux luttes. (...)
Pour anticiper au mieux les besoins spécifiques, « il est essentiel d’intégrer des militants handicapés dans les équipes de planification et de sensibiliser aux enjeux d’accessibilité », estime Odile Maurin. La création de comités dédiés à ces questions au sein des collectifs écologistes peut garantir que l’inclusion devienne un réflexe. Selon Charlotte Puiseux, « il est temps de faire de cette lutte un combat pour tous ».
Dans son texte, Ahmed Hammad souligne que « la valorisation de la productivité [par le capitalisme] marginalise les personnes considérées comme “non conformes”, tout en exacerbant les inégalités climatiques ». Les luttes écologistes et antivalidistes s’attaquent donc au même adversaire : un système capitaliste qui privilégie la rentabilité au détriment des vies humaines et de l’environnement.