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Mediapart
L’angoisse des salariés du « Parisien » face aux rumeurs de vente de leur journal à Bolloré
#journaux #Bollore #LeParisien
Article mis en ligne le 12 septembre 2025

Au cours d’une rencontre jeudi avec les syndicats, le PDG du groupe Les Échos-Le Parisien n’a pas souhaité commenter les rumeurs de vente au milliardaire d’extrême droite, assurant ne pas avoir été mandaté pour être le « porte-parole du groupe là-dessus ».

Après plusieurs jours à craindre le pire, l’anxiété des salarié·es du Parisien est partie pour durer encore quelques jours. Après des semaines passées à raser les murs, la direction du quotidien francilien a finalement accepté de recevoir jeudi en fin d’après-midi les organisations syndicales pour évoquer le sujet qui angoisse tant les salarié·es : l’insistante rumeur de cession de leur titre au milliardaire d’extrême droite Vincent Bolloré.

Au cours de cette réunion, Pierre Louette, le PDG du groupe Les Échos-Le Parisien s’est refusé à faire tout commentaire sur l’éventualité d’une vente du titre. Lui-même annoncé sur le départ, le patron du pôle presse détenu par Bernard Arnault a semblé être autant dans le flou que les salariés eux-mêmes. « Je ne suis pas mandaté pour être le porte-parole du groupe là-dessus », a-t-il balayé. Relancé sur sa déclaration de juillet dernier, où il avait formellement démenti la rumeur d’une cession, il a répondu : « J’en reste à ce démenti. » (...)

Plus tôt dans la journée, la quasi-totalité des salarié·es s’étaient réuni·es en AG pour partager leur désarroi et plancher sur un mode d’action. À l’unanimité, ils et elles ont adopté une motion mandatant les syndicats à exprimer à la direction leur « opposition au projet de vente du Parisien au groupe Bolloré, [leur] attachement à la préservation d’un titre de presse d’information nationale et locale composé de journalistes indépendants, à la liberté d’informer et d’être informé ».

Pour l’instant, l’hypothèse d’une grève, bien qu’évoquée, a été écartée mais pourrait de nouveau être remise sur la table mercredi, lors de la prochaine AG. (...)

Toujours est-il que certains services, déjà à l’os, vont devoir continuer à fonctionner de manière incomplète et avec des effectifs considérablement réduits. C’est le cas de l’antenne locale du Parisien dans le Val-d’Oise, délestée de quatre journalistes par le plan d’économies. Lundi, ils ne seront plus que trois pour faire tourner l’édition départementale.

Il en va de même du service vidéo, pierre angulaire du projet de restructuration, qui a récemment perdu quatre journalistes, toujours pas remplacés. Au pôle news, lui aussi stratégique pour accroître les audiences digitales du Parisien, des embauches devaient être effectuées avant l’été. La direction vient d’annoncer qu’il n’y aurait pas de CDI, pas maintenant à tout le moins.

Un courrier, resté sans réponse, avait été envoyé cet été à la direction du journal pour s’inquiéter du retard pris dans les embauches. « Tout ça semble préparer le terrain à une vente, constate une représentante syndicale. LVMH déplume la rédaction pour donner des gages à l’acheteur et lui montrer qu’il va s’y retrouver d’un point de vue de la masse salariale. »

L’hypothèse d’une vente à Vincent Bolloré s’est encore accélérée cette semaine. Le récit par Le Nouvel Obs de la rencontre estivale entre les deux milliardaires sous les dorures de Saint-Tropez, où l’avenir du Parisien-Aujourd’hui en France aurait été évoqué, a encore amplifié la panique des salarié·es. Et la dernière prise de parole publique de Pierre Louette, PDG du groupe Les Échos-Le Parisien, ne les a pas davantage rassuré·es. (...)

Jeudi matin encore, la DRH du journal a justifié auprès des syndicats le retard pris dans la mise en œuvre du plan de restructuration par ces mots sibyllins : « Le contexte a changé. » Suffisant pour convaincre certain·es salarié·es de l’imminence d’un rachat. « Les indices nous conduisent à considérer qu’au minimum des discussions sont en cours, analyse froidement une journaliste de la rédaction. Notre objectif, en dehors d’obtenir une réponse claire de la direction, c’est que chacun se projette et mesure les conséquences si cette hypothèse se confirmait, y compris notre actionnaire. » (...)

Vendre l’héritage éditorial [du “Parisien”] au groupe Bolloré reviendrait à livrer à une idéologie militante d’extrême droite un des grands quotidiens du pays.

La SDJ et les syndicats du « Parisien »

(...)

Dans une lettre ouverte adressée mardi à Bernard Arnault, les représentants syndicaux du Parisien lui ont expressément demandé de « renoncer » à tout projet de cession au milliardaire breton. (...)

« Nous demandons à Bernard Arnault, si son projet est bien de vendre Le Parisien, de le faire avec responsabilité, défend une briscarde de la rédaction. Quand on vend sa maison, et qu’on sait que l’acquéreur souhaite en faire une usine de produits toxiques qui va empoisonner tout le voisinage, on se sent forcément responsable, même si ça ne nous appartient plus. » (...)