
Depuis plus d’une décennie, plusieurs émissions de télévision et grands médias français se font l’écho d’une petite musique en provenance d’outre-Atlantique selon laquelle Julian Assange aurait « du sang sur les mains ». Toutefois, de nombreux éléments apportés ces dernières années mettent à mal ces accusations. Les autorités étasuniennes concèdent elles-mêmes n’avoir à ce jour identifié aucune victime à dédommager suite aux publications du célèbre journaliste australien.
Plus de huit ans après avoir rencontré Julian Assange dans l’ambassade de l’Equateur à Londres (pour un entretien diffusé le 05 février 2016 sur France Inter), le journaliste français Patrick Cohen a récemment nourri sur France 5 la rhétorique consistant à dénoncer un supposé manque de professionnalisme du fondateur de WikiLeaks, qu’il accuse implicitement d’être responsable de la mort d’autrui.
C à vous contre Assange ? (...)
Contactée pour obtenir des exemples précis où la responsabilité de Julian Assange serait directement reconnue dans les pertes humaines évoquées, l’équipe de C à vous n’a pour l’heure pas répondu à la sollicitation d’Off Investigation. Au regard de cette récente séquence télévisuelle, rappelons que de nombreux éléments apportés ces dernières années dans le cadre de procédures juridiques ont mis à mal cette campagne de nature à discréditer Julian Assange, qui a commencé il y a presque une quinzaine d’années et selon laquelle WikiLeaks, l’organisation du journaliste australien, aurait « du sang sur les mains » (l’expression fut utilisée pour la première fois le 29 juillet 2010, lors d’une intervention conjointe du secrétaire à la Défense des États-Unis et du président de l’état-major interarmées de l’époque).
Washington assure n’avoir identifié aucune victime liée aux diffusions de WikiLeaks (...)
En 2013 déjà, l’armée la plus puissante du monde avait échoué à faire un lien entre la disparition de certains de ses informateurs et la divulgation par WikiLeaks de documents qu’avait fait fuités la lanceuse d’alerte Chelsea Manning. (...)
Lors d’une audience en 2020 liée aux procédures britanniques portant sur l’extradition de Julian Assange, James Lewis, l’avocat représentant l’administration Trump, a lui aussi été amené à concéder que « les États-Unis ne pouvaient pas prouver à ce stade que la disparition [de certains informateurs] était le résultat d’une révélation par WikiLeaks » (Antiwar, le 25 février 2020).
La rigueur d’Assange défendue par des journalistes d’investigation
Lors des audiences de fin 2020 à la Woolwich Crown Court (toujours dans le cadre des procédures britanniques sur l’extradition de Julian Assange), plusieurs journalistes ayant travaillé en partenariat avec WikiLeaks, témoignèrent quant à eux des précautions prises par l’organisation en matière de publication (...)
Dans son livre « L’affaire WikiLeaks : médias indépendants, censure et crimes d’État », paru fin 2023 en français aux éditions Agone, la journaliste italienne Stefania Maurizi revient pour sa part en détails sur le professionnalisme et la rigueur de WikiLeaks en matière d’expurgation, et décortique plusieurs accusations malveillantes à ce sujet.
En outre, comme nous l’écrivions déjà en février 2024, les calomnies répétées faisant de Julian Assange un personnage peu scrupuleux en matière de protection de vies humaines, sont contredites par certains contenus offrant un aperçu des précautions qu’il a prises à ce sujet : en témoigne par exemple la tentative d’Assange de sensibiliser l’administration étasunienne sur des fuites dangereuses n’étant pas de son fait, dans une séquence du documentaire Risk, paru en 2016 ; ou encore un échange téléphonique entre le journaliste australien et le secrétariat d’Hillary Clinton, datant de 2011.
Pour celles et ceux qui souhaitent approfondir le sujet, l’histoire des méthodes de publication de WikiLeaks est rigoureusement abordée dans le deuxième épisode que la chaîne YouTube Lex imperi a consacré à Julian Assange cette année.
Assange enfin libre (...)
A l’occasion de l’anniversaire du fondateur de WikiLeaks, qui a soufflé le 3 juillet sa 53ème bougie, le comité français de soutien à Julian Assange a mis en ligne un article revenant sur les points majeurs qui ont été abordés au tribunal de Saipan, le 26 juin, par la justice étasunienne et le journaliste australien. Article dont nous vous recommandons la lecture afin de comprendre en détails les enjeux de ce « plaidoyer négocié » historique. (...)