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"J’ai réalisé que ma vie n’était pas finie" : À Saint-Denis, l’association Ikambere ramène à la vie des femmes exilées atteintes du VIH
#migrantes #immigration #exilees #femmes #sante #VIH
Article mis en ligne le 18 mai 2025
dernière modification le 16 mai 2025

L’association Ikambere accueille depuis près de 30 ans des femmes séropositives, en majorité migrantes et en grande précarité. Ce lieu, qui propose des ateliers collectifs ainsi qu’un suivi social et thérapeutique, est devenu un refuge pour beaucoup d’entre elles. Elles y tentent petit à petit de se reconnecter à leur corps et leur cœur. Reportage.

à Ikambere, les femmes accueillies partagent un point commun : elles sont toutes porteuses du VIH.

Quand elle est diagnostiquée de la maladie, en 2015, Odile voit son monde s’écrouler. "J’étais comme morte", confie-t-elle. Elle part alors pour la France pour se faire soigner car "les traitements pour le VIH ne sont pas bons au Cameroun". Elle obtient une carte de séjour puis une place dans un logement social en Île-de-France. Encore aujourd’hui, seuls ses enfants sont au courant de son état de santé. (...)

"Je n’avais pas honte de la maladie, mais de moi-même. Quand je suis arrivée en France, c’était très dur. J’étais seule, épuisée, je ne savais pas si j’allais survivre. Puis, l’année dernière, mon docteur m’a parlé d’Ikambere. Ça a changé mon histoire. Ma tension a baissé, ma condition physique s’est améliorée… Aujourd’hui, je n’ai pas d’argent, je n’ai presque rien, mais ici, j’ai gagné au cœur", souffle-t-elle.

"Ressusciter des femmes mortes dans leur corps et leur esprit"

Fondée en 1997, en plein pendant "les années sida", la maison accueillante d’Ikambere accompagne chaque année environ 500 femmes séropositives, pour la plupart migrantes et en situation de grande précarité, vers l’autonomie.

"Souvent, ce sont des femmes broyées par la vie. Elles arrivent ici complètement déconnectées d’elles-mêmes, car elles cumulent les vulnérabilités : elles sont infectées par le VIH, elles sont migrantes, ont subi de la stigmatisation, sont isolées, rejetées à cause du virus…", explique Rose Nguekeng, conseillère en santé sexuelle au sein de l’association. "Face à ça, Ikambere est un lieu de vie qui tente de ressusciter ces femmes mortes dans leur corps et leur esprit." (...)

Discrète, cette cinquantenaire originaire de Guinée-Bissau porte, comme beaucoup d’autres, les traces d’une stigmatisation intériorisée sur sa maladie. "D’où je viens, le VIH est très mal vu. Les gens pensent que les séropositifs sont ’souillés’. Quand j’ai appris que j’étais infectée en 2005, ma cousine chez qui je vivais m’a jetée à la rue. À part elle, je ne l’ai dit qu’à ma mère tellement j’avais honte. Pour moi, la vie s’est arrêtée. J’ai fait plusieurs tentatives de suicide", raconte-t-elle, le regard dans le vague.

Son cas est loin d’être isolé. "Ces femmes migrantes, notamment originaires d’Afrique subsaharienne, ont grandi dans un environnement où la personne infectée par le VIH est étiquetée comme étant une personne de mauvaise vie, une prostituée. Donc quand une femme se rend compte qu’elle est positive au VIH, elle se dit que si elle en parle, elle sera rejetée. Alors elle vit dans le silence. Mais c’est un silence qui tue", pointe Rose Nguekeng. (...)

beaucoup sont parties en exil pour fuir le poids de la marginalisation et le regard des autres. (...)