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Orient XXI
Islamophobie. La fabrique d’un soupçon
#islamophobie
Article mis en ligne le 29 mai 2025
dernière modification le 25 mai 2025

L’ouvrage de Hamza Esmili, érudit et percutant, offre une réponse rare et salutaire à la stigmatisation des musulmans en France. Face à l’actualité marquée par une offensive islamophobe du pouvoir contre le prétendu « entrisme » des Frères musulmans, sa réflexion est essentielle.

Hamza Esmili, chercheur à l’Université libre de Bruxelles, s’intéresse dans ses travaux scientifiques au réinvestissement de la tradition islamique par les immigrés et leurs enfants en France. Dans La cité des musulmans publié ce printemps, il fait un léger pas de côté et se penche sur les formes de discriminations subies par les musulmans et sur la mise en place, à travers des politiques publiques et des discours, de l’islamophobie en France.

À travers une approche d’abord chronologique, l’auteur présente les mécanismes d’élaboration des discours discriminants à l’égard d’une pratique religieuse considérée comme indésirable. Il pointe notamment la convergence entre la stigmatisation des populations issues de l’immigration post-coloniale et un rapport défiant à la piété et à certaines formes de solidarité qui s’est structurée au fil de l’histoire. (...)

Hamza Esmili conceptualise ce qu’il désigne comme une « collision historique se figurant en problème musulman », soit entre « une invitation à la piété » portée par des musulmans d’une part, et d’autre part, « une société globale » française rétive à la perpétuation ou la réinvention de « liens de filiation » perçus comme communautaires. Le propos s’appuie sur une subtile réflexion philosophique et fait appel à la succession de débats, lois et décisions, jusqu’à celle récente sur le « séparatisme islamiste » en 2020-2021 qui sert à étendre toujours plus les pratiques d’exclusion. Nulle doute que les termes du débat lancé en mai 2025 avec la publication d’un rapport sur les Frères musulmans en France donnent du crédit à la thèse défendue par l’ouvrage.

Pile, je gagne, face tu perds

Les rengaines et obsessions du ministre Bruno Retailleau, de la chercheuse Florence Bergeaud-Blackler ou du polémiste Éric Zemmour, leurs mensonges, excès et raccourcis, s’inscrivent dans une démarche qui s’est patiemment construite depuis les années 1980, et qui se reconfigure à chaque fois en mobilisant de nouveaux mots et concepts. À propos du « séparatisme » qui a un temps fait florès, l’auteur relève avec une grande justesse combien celui-ci construit une thèse qui confine au complotisme :

La condition collective des immigrés et de leurs enfants en cité est constituée en sécession territoriale, tandis que le procès d’intégration sociale en leur sein est traduit en entrisme.

Pile, je gagne, face tu perds !