
“Il a dit qu’il était là pour tuer tous les Arabes.” Maryam*, 46 ans, est encore sous le choc, trois semaines après les faits. Ce 13 mai 2025, un homme s’en est pris à sa fille, et à celle de sa voisine, Fanny*, devant leurs maisons. (...)
Ce soir de la mi-mai, un intrus approche les fillettes. “Un jeune, pas plus de 25 ans”, précise Fanny. Les quatre adultes ne l’aperçoivent pas immédiatement. Léna, la fille de Fanny, est la première à alerter. “Elle est rentrée en courant, choquée. Je l’ai vue toute blanche… Elle nous a dit qu’elle était en danger”, affirme la mère de famille. (...)
Dans le dépôt de plainte que nous avons pu consulter, les deux fillettes racontent ce qu’elles ont vécu avec leurs mots. “En fait, il y a un monsieur qui voulait nous tuer”, déclare Noura, la petite de Maryam. “J’ai vu le monsieur qui avait un couteau dans sa poche. Il a demandé si j’étais arabe, et Lena aussi.” Cette dernière répond alors “moitié-moitié” ; Noura répond simplement “oui”. (...)
“Moi je suis rentrée et ma copine est restée dehors”, explique ensuite Lena. “Le monsieur a voulu la prendre et l’emmener sur un banc mais elle a pas voulu. Elle est rentrée en courant car elle a vu un couteau dans sa poche.” “J’ai couru pour rentrer chez moi et il m’a poussé”, précise de son côté Noura. “J’ai failli tomber (...) Je suis rentrée en pleurant et j’ai dit à mon papa : ‘Viens, il y a un monsieur qui veut te parler’”.
Léna et Noura se souviennent toutes les deux avoir entendu l’homme dire “je vais tuer tous les enfants d’Arabes”. “Ma copine et moi, on a pleuré. On avait peur qu’il nous tue”, souffle la petite Lena. (...)
Une fois les parents alertés, l’agresseur renouvelle ses menaces à leur encontre. “Il disait : ‘Je suis armé, j’ai un couteau’ en montrant sa poche’ puis ‘je veux tuer des enfants arabes et je vais revenir avec une Kalachnikov’ ou encore ‘j’ai pas peur de la police’”, cite Fanny.
Les deux couples contactent les forces de l’ordre tout en lui demandant de partir. Au bout d’un long quart d’heure, il finit par quitter les lieux, non sans promettre aux victimes qu’il allait revenir. Lorsque la gendarmerie arrive, le jeune homme est interpellé alors qu’il retourne justement vers les habitations. Il est effectivement en possession d’un couteau. (...)
Il passe alors deux jours en garde à vue avant d’être libéré sous contrôle judiciaire, selon les informations communiquées par son avocat à Fanny. Les deux familles ont porté plainte et se portent partie civile. Le procès se tiendra en novembre 2025. En attendant, le traumatisme demeure.
“J’ai peur tout le temps. Je ferme les portes et les fenêtres, je n’ouvre à personne. Mon mari m’appelle à chacune de ses pauses, pour savoir si ça va”, expose Maryam, mère au foyer. “Est-ce que c’est une vie ça ?” Le conjoint de Fanny s’est retrouvé en arrêt de travail pendant trois semaines suite à cet événement. “Je ne pouvais pas le laisser partir tellement j’étais terrifiée”, relate la maman (...)
Les deux petites filles et leurs mamans ont chacune rendez-vous chez le psychologue.
Une commune supposément tranquille
Les deux familles ont choisi de vivre dans cette commune du Nord, “pour la tranquillité”. Fanny ne compte pas partir de Thumeries : “On le voit dans l’actualité, ça se passe aussi dans les grandes villes.” Maryam, elle, veut déménager dès que possible. Déjà auparavant, elle ne se sentait pas à l’aise, affirmant subir “des regards de travers”, de la part d’habitants, car elle porte le foulard. “On a des voisins qui disent à leurs enfants de ne pas jouer avec les Arabes…” (...)
La municipalité n’a pour le moment pas prévu de se porter partie civile. (...)
“Si un jeune homme d’origine étrangère avait fait la même chose, on aurait qualifié ça de terrorisme. Il faut que ce soit puni, même si c’est un Français.” (...)
Injures, provocations, diffamations… En France, en 2024, plus de 16 000 atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux ont été enregistrées. Une augmentation de 11% des crimes et délits de cette nature par rapport à 2023.