
Farid a été condamné pour terrorisme en 2017, libéré en 2019. Il dit tout faire depuis pour se réinsérer. Mais il a été déchu de sa nationalité en 2022. Et placé « à titre préventif » dans un centre de rétention le temps des épreuves à Nice, alors qu’il n’est pas expulsable.
C’est un désaveu pour la préfecture des Alpes-Maritimes : la cour d’appel d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), dans une ordonnance rendue le 21 juin, a confirmé la décision du juge des libertés et de la détention (JLD), qui avait décidé de libérer un homme placé pour la deuxième fois en centre de rétention administrative (CRA), en rappelant qu’il avait déjà été retenu quatre-vingt-dix jours quelques mois plus tôt, sans pouvoir être expulsé. Pour la cour d’appel, la rétention a été décidée « à titre préventif », « pour préserver le passage serein de la flamme olympique dans la ville de Nice ».
« Ces deux décisions disent que les autorités ne peuvent pas utiliser les centres de rétention comme outil sécuritaire. C’est un détournement du droit des étrangers » (...)
Le cabinet du préfet se justifie en affirmant que l’homme était « suspecté de préparer une attaque de nature terroriste » sur le sol français et ajoute qu’il aurait été « interpellé » depuis, « le 6 août », et « placé en garde à vue » dans ce cadre. (...)
Problème, le Parquet national antiterroriste (Pnat) dément cette dernière information auprès de Mediapart, tout comme le parquet de Nice. L’avocate de l’intéressé n’en a aucune trace non plus. (...)
Sollicité, le ministère de l’intérieur n’a pour l’heure pas répondu à nos questions. Questionnée à propos du démenti du Pnat sur la garde à vue, la préfecture des Alpes-Maritimes n’a pas donné d’explications. (...)
Avenir incertain
À l’audience, peut-on lire dans la décision de la cour d’appel, Farid s’est défendu en disant « avoir toujours respecté l’assignation à résidence ». « On m’a dit qu’on me plaçait en rétention à cause de la flamme olympique. Je ne peux pas être tributaire des événements sportifs de Nice. Je signe mon pointage à 15 h 30 tous les jours, je m’entends bien avec la police de la PAF [police aux frontières]. J’essaie de vivre ma vie. Il y a une affaire qui date de onze ans. Je veux reprendre ma vie. »
Devant le JLD, il répondait aux accusations peu détaillées dont il fait l’objet aujourd’hui : « Je ne suis pas un trouble à l’ordre public. Il n’y a aucune preuve depuis 2019, je ne peux pas prouver que je ne suis pas une menace. Je ferai tout ce que je peux pour les recours. Ma vie est ici, je ne connais pas le Maroc et je n’y ai pas d’attaches. À quel moment on va arrêter de me reprocher ça ? »
Pour la cour d’appel, pas de doutes. L’arrêté de placement en rétention de la préfecture des Alpes-Maritimes est « irrégulier ». (...)
Au cabinet de Me Dosé, on estime que la préfecture comme le ministère « tentent d’effacer le principe d’amendement et de rédemption » après la condamnation pénale dont il a fait l’objet. « Il y a une forme de persécution à l’égard de mon client », pointe l’avocate. (...)