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Libération
Fake news climatiques : « Les mensonges prennent l’ascenseur et la vérité emprunte l’escalier »
#fakenews #climat #algorithmes
Article mis en ligne le 22 mai 2025
dernière modification le 18 mai 2025

Les algorithmes façonnent notre perception du monde par des mécanismes dont nous ne maîtrisons ni les codes ni les intentions. Première victime : le climat. Le journaliste Thomas Huchon et l’influenceur Vinz Kanté reviennent sur les nouveaux enjeux de l’information environnementale.

Cette convergence préoccupante témoigne d’une transformation profonde de notre paysage informationnel. Comment naviguer dans cet océan de données où le vrai et le faux se confondent ? À qui faire confiance ? Thomas Huchon, journaliste d’investigation a fait de la traque des manipulations de l’information son combat quotidien ; et Vinz Kanté, ancien animateur radio reconverti en influenceur – 55 000 abonnés sur Instagram et 140 000 sur YouTube – avec son média en ligne Limit qui vulgarise les enjeux climatiques reviennent sur ce qu’ils nomment « l’algocratie » : une nouvelle gouvernance invisible où les algorithmes déterminent insidieusement notre rapport à la réalité

Dans votre livre Résister aux fake news (First Editions), vous explorez les mécanismes de la désinformation. Quelles sont selon vous les théories climatosceptiques les plus dangereuses aujourd’hui ?

Thomas Huchon : La plus pernicieuse consiste à présenter le réchauffement climatique comme une construction des partis écologistes visant à manipuler l’opinion publique. (...)

. Il s’agit souvent des mêmes individus qui s’opposaient au pass sanitaire et à la vaccination. Leur motivation principale n’est pas tant la conviction intellectuelle que le refus de modifier leur mode de vie. Cette posture du « touche pas à mon mode de vie » se traduit par une résistance à toute remise en question des habitudes de consommation. (...)

Nous sommes confrontés à une jungle informationnelle où des sources trompeuses se parent des attributs de la crédibilité. Le problème n’est pas seulement la multiplication des émetteurs, mais leur capacité à imiter les codes de la fiabilité sans en respecter l’éthique. (...)

90 % des fake news sur le climat émanent directement de think tanks financés par ces mêmes industries. (...)

Ce qui m’effraie vraiment pour l’avenir, c’est la marginalisation algorithmique progressive des contenus écologiques. (...)

Le défi fondamental de notre espace numérique contemporain n’est autre que la dictature algorithmique qui favorise une forme de technofascisme informationnel. (...)

Un constat révélateur émerge des études récentes : les pays où le climatoscepticisme est le plus répandu correspondent précisément aux nations productrices d’énergies fossiles (Australie, Pologne, Emirats, Russie, Etats-Unis, Belgique). Cette corrélation suggère l’existence d’un terreau de désinformation entretenu par des intérêts économiques et politiques. (...)

Dans un écosystème informationnel où chacun peut consommer, diffuser et produire librement du contenu, l’exonération d’une formation minimale à l’esprit critique devient intenable. Un point crucial cependant : cette exigence doit émaner des influenceurs eux-mêmes pour être légitime et efficace (...)

T.H. : J’ajouterais trois stratégies complémentaires : premièrement, diversifier systématiquement ses sources d’information, en alternant entre journaux, livres, conférences et publications scientifiques. Deuxièmement, cultiver une méfiance constructive envers nos propres biais cognitifs, particulièrement vis-à-vis des informations qui confortent trop facilement nos convictions préétablies. Enfin, reconnaître que si nous sommes à l’origine du problème par notre réceptivité aux fake news, nous constituons également, par notre vigilance critique, le fondement de la solution