
Invoquant une loi de 1798 sur les ennemis étrangers, Washington a expulsé, mi-mars, 238 Vénézuéliens vers le Salvador, sans aucun jugement. Le gouvernement américain les accuse d’appartenir à l’organisation criminelle Tren de Aragua. Mais, selon une enquête de la chaîne CBS, la plupart d’entre eux n’ont apparemment pas de casier judiciaire.
(...) Trois semaines après ces faits, l’émission 60 minutes de la chaîne américaine CBS a révélé, dimanche 6 avril, que la plupart de ces prisonniers n’étaient pas des membres de gangs violents. "Le gouvernement a divulgué très peu d’informations sur ces hommes. Cependant, grâce à des documents internes, nous avons obtenu une liste de leurs identités et constaté qu’une grande majorité d’entre eux n’ont apparemment fait l’objet d’aucune condamnation pénale, ni même d’aucune accusation criminelle", explique ainsi ce reportage. "Parmi eux : un maquilleur, un footballeur et un livreur de nourriture, détenus dans un endroit si dur que le ministre de la Justice du Salvador a déclaré un jour que la seule issue était un cercueil." (...)
accusé par les autorités américaines de faire partie du gang Tren de Aragua, en raison de deux tatouages représentant des couronnes, mais qui sont en réalité des témoignages d’affection envers ses parents. (...)
Pour justifier la déportation d’un autre migrant vénézuélien, Jerce Reyes Barrios, l’administration Trump s’est aussi appuyée sur l’un de ses tatouages représentant également une couronne. Mais selon son avocat, celui-ci rend hommage à son équipe préférée le Real Madrid.
Directeur de l’agence responsable du contrôle des frontières et de l’immigration, Tom Homan a expliqué à CBS que "les agents d’immigration avaient passé des heures à effectuer des contrôles rigoureux sur chacun des hommes pour confirmer qu’ils étaient membres du Tren de Aragua, un gang vénézuélien que le président Trump avait pour objectif d’éradiquer". Pourtant, selon la chaîne de télévision, 75 % d’entre eux, soit 179 hommes, n’ont pas de casier judiciaire.
En réponse à ces conclusions, une porte-parole du Département de la Sécurité intérieure a déclaré à 60 Minutes que nombre de personnes sans casier judiciaire "sont en réalité des terroristes, des auteurs de violations des droits de l’Homme, des gangsters, etc. Ils n’ont tout simplement pas de casier judiciaire aux États-Unis". (...)
La justice américaine a cependant admis la semaine dernière une première erreur concernant ces expulsions. Une juge fédérale américaine a ordonné, vendredi 4 avril, le retour aux États-Unis de Kilmar Abrego Garcia, un immigré salvadorien vivant dans le Maryland et marié à une Américaine, qui a fait partie du convoi de personnes expulsées au Salvador le 15 mars.
L’homme a été placé en détention "sans fondement légal" le 12 mars, et expulsé trois jours plus tard "sans aucune justification légale ni processus" judiciaire, a affirmé la juge Paula Xinis, lors d’une audience d’urgence. Elle précise en note que "les ’preuves’ contre Abrego Garcia n’ont consisté en rien de plus qu’en sa casquette des Chicago Bulls et un sweat à capuche, ainsi qu’une vague accusation, non-corroborée (...)
Interrogé dimanche soir sur le sujet par des journalistes à bord d’Air Force One, le président Trump a laissé entendre que l’immigrant expulsé par erreur faisait bien partie d’un gang. "Quelqu’un a dit que c’est un membre de MS-13 et pas Tren de Aragua", un autre gang, a-t-il déclaré. "MS-13 est une organisation très nocive, peut-être aussi nocive d’ailleurs" que Tren de Aragua, a-t-il poursuivi sans mentionner le nom de Kilmar Abrego Garcia.
Alors que la juge Paula Xinis a ordonné aux États-Unis de renvoyer Kilmar Abrego Garcia avant lundi soir, l’administration Trump a demandé à la Cour d’appel du 4e circuit des États-Unis, basée à Richmond, en Virginie, de bloquer cette décision. (...)