
L’AfD pratique une rhétorique anti-migrants virulente et radicale. Pourtant, an vue des élections législatives anticipées du 23 février, le parti d’extrême-droite parvient à convaincre des lecteurs issus de l’immigration.
L’Alternative pour l’Allemagne (AfD) n’entretient aucune ambiguité sur l’immigration. Dans son programme, le parti explique qu’il "considère l’idéologie du multiculturalisme comme une menace sérieuse pour la paix sociale et pour la pérennité de la nation en tant qu’entité culturelle".
Dans le même temps, alors que l’Allemagne vit une campagne électorale éclair après l’implosion du gouvernement et la convocation d’élection anticipées pour le 23 février, l’extrême-droite s’emploie à courtiser les électeurs issus de l’immigration, non sans succès.
A l’image d’Ismet Var, 55 ans. Il est né en Turquie et vit en Allemagne depuis son enfance. Il est citoyen allemand depuis 1994 et soutient l’AfD depuis la création du parti en 2013. (...)
"Désormais, ils expulsent des gens", explique Ismet Var autour d’un café dans le quartier de Kreuzberg à Berlin. Le nombre d’expulsions a en effet augmenté l’an dernier sous l’actuel gouvernement de centre-gauche du chancelier Olaf Scholz. (...)
En 2023, environ 12 % de l’électorat allemand était issu de l’immigration, soit 7,1 millions de personnes, selon les statistiques officielles.
En 2016, quelque 40 % de cet électorat votait encore pour les sociaux-démocrates du SPD, le parti du chancelier Olaf Scholz, et 28 % pour les conservateurs de l’Union chrétienne-démocrate (CDU). Mais cette loyauté envers les partis traditionnels semble s’être érodée.
Selon le Centre allemand d’étude des migrations et de l’intégration (DeZIM), qui publie fin janvier une étude sur les habitudes de vote, le fait d’être issu de l’immigration n’entraîne plus un comportement de vote différent du reste des électeurs.
Jusqu’aux élections générales de 2017, 35 % des électeurs d’origine turque ont voté pour les socio-démocrates du SPD. L’AfD était alors honnie. Aujourd’hui, selon le DeZIM, les électeurs issus de l’immigration votent quasiment autant pour l’AfD que les autres. (...)
Özgür Özvatan pense que cela fait partie de la stratégie plus large de l’AfD qui cherche à élargir sa base d’électeurs. "Le nombre d’électeurs potentiels dans le paysage des non-immigrés est évidemment limité, mais s’ils veulent atteindre les 30-35 % ils doivent élargir leur électorat, ce qui implique de créer des programmes et de promettre des politiques pour les communautés d’immigrés".
"Les personnes qui sont arrivées avant en Allemagne ne sont pas automatiquement en faveur de l’immigration", précise l’auteur.