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Mediapart
Discriminée parce que femme et noire : une ex-salariée fait condamner la Société générale
#discriminations #discriminationIntersectionnelle #SocieteGenerale
Article mis en ligne le 27 octobre 2025
dernière modification le 25 octobre 2025

La cour d’appel de Paris vient de reconnaître la discrimination « en raison de l’origine et du sexe » dont a été victime une ancienne salariée de la banque. Fait rare, cette décision évoque la notion de « discrimination intersectionnelle ».

Pas ou peu d’augmentations individuelles de salaire en dépit d’évaluations positives de sa hiérarchie, une carrière professionnelle bloquée malgré la réussite à des examens en interne : après onze années à la Société générale, Laure* n’a jamais obtenu le statut de cadre mais vu nombre de ses collègues, aux parcours et compétences similaires, lui passer devant et monter en grade.

Laure est une femme, et une femme noire. Ses collègues promus cadres, auxquels elle se compare, sont majoritairement des hommes blancs. Quelques femmes aussi, non racisées. Laure entendait donc faire reconnaître la « discrimination intersectionnelle » dont elle se disait victime, en raison de son genre mais aussi du fait qu’elle est noire.

La cour d’appel de Paris lui donné raison dans une décision rendue en septembre 2025 et que Mediapart a consultée. Elle condamne la Société générale pour « discrimination en raison de l’origine et du sexe » mais aussi pour « harcèlement moral discriminatoire », et octroie à Laure 15 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice de carrière, assortis de 5 000 euros en réparation du préjudice moral. (...)

La Société générale peut encore se pourvoir en cassation. (...)

Selon Clara Gandin, la discrimination intersectionnelle est « l’interaction de plusieurs motifs discriminatoires, à ne pas confondre avec des discriminations qui s’additionnent ». Elle précise encore : « On peut parler de discrimination au carré. » (...)

Pour la cour d’appel, l’ex-salariée prouve d’ailleurs que la dégradation de son état de santé fait suite à « la promotion d’une autre salariée comme directrice d’agence » en 2019, au moment même où la Société générale demande à Laure de faire preuve de patience. Les juges estiment qu’elle a « subi un harcèlement moral discriminatoire », reconnaissant au passage qu’elle a fourni « tous les efforts exigés par l’employeur pour évoluer et que ses compétences ont été reconnues ».

Clara Gandin, son avocate, applaudit : « Le harcèlement discriminatoire – spécifiquement lié aux motifs discriminatoires et qui en amplifie l’effet – est une notion encore méconnue de certains juges mais la cour d’appel de Paris l’emploie sans difficulté, c’est vraiment à souligner. »

Outre le blocage de carrière, Laure déplorait n’avoir jamais, en onze ans, obtenu de hausse de salaire individuelle « au mérite ». Là encore, la cour lui donne en partie raison et considère « que la très grande majorité des augmentations salariales de [la salariée] ont été automatiques et qu’elle n’a connu aucune augmentation en 2015 et de 2017 à 2018, en dépit d’évaluations satisfaisantes, voire très satisfaisantes ».

Laure, qui a obtenu 20 000 euros de dommages et intérêt, regrette une compensation financière « un peu décevante ». Un sentiment partagé par son avocate, Clara Gandin (...)