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Des micro-organismes OGM bientôt disséminés dans l’environnement ?
#OGM #microorganismes
Article mis en ligne le 9 décembre 2023
dernière modification le 8 décembre 2023

Des bactéries, levures et, pourquoi pas, des virus génétiquement modifiés disséminés dans l’environnement sans aucun encadrement règlementaire ? C’est ce que des entreprises suggèrent fortement à la Commission européenne. Des documents obtenus par l’association Corporate Europe Observatory (CEO) montrent un intense lobby des entreprises afin que la déréglementation proposée pour les végétaux OGM/NTG s’applique aux micro-organismes génétiquement modifiés.

Le 14 juin 2022, la Commission européenne rencontrait l’entreprise PivotBio. Cette entreprise étasunienne commercialise des micro-organismes génétiquement modifiés (MGM) pour « convertir l’azote atmosphérique et l’apporter aux cultures ». Lors du rendez-vous, PivotBio a expliqué que ces micro-organismes sont modifiés « par mutagénèse conventionnelle ou par édition du génome ». Mais elle ne souhaite pas les commercialiser en Europe « puisqu’ils seraient considérés comme OGM soumis à la réglementation actuelle ». Le jour du rendez-vous, la Commission européenne travaillait encore à sa proposition de dérèglementation des seuls végétaux OGM/NTG, qu’elle présentera le 5 juillet 2023. Mais elle s’intéressait déjà aux MGM : elle a en effet répondu à l’entreprise avoir « initié un travail de collecte d’informations sur les NTG appliquées aux micro-organismes ».

Cet échange illustre les projets industriels existant pour disséminer dans l’environnement des bactéries, champignons, voire virus génétiquement modifiés. Un secteur industriel qui aimerait bien que la dérèglementation des végétaux OGM concerne, à terme, les MGM.

Des MGM disséminés dans l’environnement sans encadrement ? (...)

Pour ce qui est de dissémination concrète, les Amis de la Terre États-Unis ont recensé 128 autorisations délivrées par le ministère étasunien de protection de l’environnement pour des expérimentations de MGM dans l’environnement. La majorité de ces autorisation ont été obtenues par des universités. Face aux projets commerciaux des entreprises, les Amis de la Terre États-Unis s’inquiètent des risques associés à leurs disséminations dans l’environnement (dissémination de très grande ampleur, transfert non contrôlé de gènes, modification du microbiome existant, résistance aux antibiotiques, apparition potentielle de nouveaux pathogènes…).

Le lobbying européen en place (...)

Les MGM en tant que tels sont des OGM réglementés par l’Union européenne. Si le législateur a exonéré les molécules produites par des MGM en fermenteurs [3], il n’en est rien pour ces MGM, qui seraient disséminés tel quel dans l’environnement. (...)

Une future dérèglementation des MGM ?

Dès juillet 2022, EuropaBio ainsi que l’Association des fabricants et formulateurs de produits enzymatiques (Amfep) et l’Association européenne des producteurs et livreurs d’ingrédients et leurs mélanges en nutrition animale (Fefana) considéraient que toutes actions politiques sur les plantes obtenues par de nouvelles techniques impacteraient également les micro-organismes. Ces trois organisations écrivaient alors à la Commission européenne pour faire valoir que les connaissances et expériences avec les micro-organismes pourraient et devraient contribuer aux actions politiques concernant tout organisme, qu’il s’agisse de plantes ou de micro-organismes.

Cette position fut réaffirmée en novembre 2022, au Forum européen des industries de biotechnologies et de bioéconomie, à Vilnius [4]. Pour les entreprises réunies en Lituanie, « de nombreuses techniques d’ingénierie génétique […] sont déjà activement utilisées de manière confinée ». Cette industrie demande donc au législateur européen d’adopter « une approche cohérente inter-secteur » et que « les connaissances sur les micro-organismes [soient] reconnues et prises en considération lorsque des actions politiques pour les plantes obtenues par des NTG sont développées ».

Pour la Commission, la porte est ouverte (...)

En 2020, le Réseau Européen de Laboratoires sur les OGM (ENGL) a reçu un mandat pour travailler sur la question de la détection des MGM dans l’alimentation humaine et animale [5]. Mais ce mandat ne concerne que les MGM utilisés en milieu confiné pour produire des molécules. Pour ce qui est des MGM disséminés dans l’environnement, les experts ayant travaillé au rapport sur la détection des plantes modifiées par de « nouvelles techniques de mutagénèse » ont récemment « modifié leur mandat pour y inclure les micro-organismes et animaux ». Ils sont « toujours en train d’évaluer si le rapport [sur les plantes] peut être étendu pour les couvrir également » (...)