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Mediapart
Depuis l’Égypte, l’envoi d’aide humanitaire vers Gaza bondit
#israel #palestine #Hamas #Cisjordanie #Gaza
Article mis en ligne le 20 janvier 2025

Plus de 600 camions chargés de denrées de première nécessité ont passé les contrôles israéliens dimanche 19 janvier afin de se rendre à Gaza, selon les Nations unies. En Égypte, le sort du point de passage de Rafah avec l’enclave reste toutefois incertain.

Près du point de passage de Rafah (Égypte).– Les mouvements reprennent enfin avec un peu plus d’ampleur, du côté égyptien de la frontière avec Gaza. Quelque 330 camions chargés d’aide humanitaire, dont 20 chargés de fuel et de gaz, ont pu quitter leur site de stationnement, face au point de passage de Rafah.

Les véhicules ont passé dimanche 19 janvier les contrôles israéliens aux postes frontaliers de Kerem Abou Salem (ou Kerem Shalom) et Al Owga-Nitzana, à une quarantaine de kilomètres plus au sud, pour pouvoir se rendre dans l’enclave palestinienne.

Plusieurs camions de produits destinés au commerce par le secteur privé, par exemple des denrées alimentaires et des équipements de nettoyage, ont également pris le même chemin, selon des témoignages récoltés par Mediapart. Leur nombre n’a pas été confirmé par les autorités égyptiennes, ni pour l’instant par le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) qui assure un suivi. (...)

Le nombre total de camions entrés dans Gaza a même grimpé jusqu’à 630 tous postes-frontières confondus, parmi lesquels 300 ont pu gagner le nord de l’enclave. Ce décompte pourrait inclure d’autres points de passage plus au nord entre Israël et Gaza. Le minimum fixé dans l’accord de trêve, 600 camions d’aide par jour dont 50 de carburant selon les autorités égyptiennes, a ainsi été dépassé.

Pénuries

Pour les centaines de chauffeurs qui patientent du côté égyptien de la frontière, c’est un soulagement. (...)

Les autorités ont tenu à marquer le coup, affrétant pour l’occasion des bus depuis Le Caire pour près de 150 journalistes, eux-mêmes filmés en train de couvrir l’événement pour les grandes chaînes nationales. « Des délégations de médias arabes et étrangers arrivent au point de passage de Rafah pour surveiller l’entrée de l’aide humanitaire en provenance d’Égypte », titrait sur l’une de ses vidéos la chaîne Al-Qahera News, proche des services de renseignement égyptiens.

À titre de comparaison, les entrées de camions dans Gaza n’avaient jamais dépassé quotidiennement les 200 camions, avec des conséquences désastreuses pour la population dépendante de ces aides. Entre début novembre et mi-décembre 2024, sur un total de 565 sites de déplacé·es analysés par des agences de l’ONU et des organisations internationales, 75 % n’avaient reçu aucune aide humanitaire. Dans 87 % de ces sites, personne ou quelques personnes seulement avaient par ailleurs eu accès à suffisamment de nourriture. Et dans 51 % de ces lieux, personne ou peu de personnes avaient à leur disposition suffisamment d’eau.

« La destruction des systèmes alimentaires locaux et des fermes a rendu la population complètement dépendante des aides venant de la frontière », commentait en octobre Antoine Renard, le directeur pour la Palestine du Programme alimentaire mondial (PAM). L’agence de l’ONU déclarait par ailleurs le 6 janvier qu’elle ne serait plus en mesure d’assurer de distributions alimentaires au cours du mois faute de stocks.

La crise du fuel à Gaza continue par ailleurs de « menacer les services de santé essentiels comme les respirateurs artificiels en soins intensifs ou les générateurs d’hémodialyse », alerte l’OCHA dans son dernier rapport sur la situation à Gaza mi-janvier. Plus largement, cette pénurie menace de stopper les services d’eau, d’assainissement et d’hygiène.

Si une hausse des aides distribuées pourrait faire évoluer la situation sur le terrain à Gaza, aucune information officielle précise n’a en revanche été communiquée concernant la reprise des évacuations de blessé·es et malades. (...)

Une réouverture à négocier

Avant la fermeture du point de passage de Rafah en mai 2024, plus de 2 000 blessé·es et malades, en plus de leurs accompagnateurs, avaient été évacués via l’Égypte selon les autorités du Caire. Moins de 450 personnes ont été évacuées de l’enclave depuis.

Des milliers d’autres habitant·es de Gaza avaient par ailleurs pu quitter l’enclave grâce à la détention d’un passeport étranger. Ou, pour les autres, moyennant le règlement de sommes colossales à une entreprise de voyage appartement à l’homme d’affaires Ibrahim al-Organi, un proche du pouvoir au Caire, également responsable via une autre de ses sociétés d’une grande partie du transport d’aide humanitaire vers le territoire palestinien.

Le point de passage de Rafah, traditionnellement utilisé pour les mouvements de personnes, en plus du passage de marchandises, était toujours fermé dimanche 19. Sa réouverture ne pourra avoir lieu qu’« après le retrait complet de l’armée israélienne du poste côté palestinien et du corridor [de Philadelphie, une zone tampon avec l’Égypte le long de la frontière, côté palestinien – ndlr] », a déclaré le ministre des affaires étrangères égyptien lors d’une interview samedi sur une chaîne télévisée locale. (...)

Le mode de gestion du poste-frontière n’a enfin toujours pas officiellement été arrêté. Une délégation de l’Union européenne devait se rendre en Égypte en début de semaine pour discuter d’une éventuelle réactivation de sa mission civile d’assistance à l’Autorité palestinienne mise en place en 2005, avec l’accord d’Israël. Cette organisation n’avait tenu qu’un an et demi avant la prise de contrôle du point de passage par le Hamas.