
Si Espagnols et Portugais viennent de vivre une mégapanne électrique inédite, des black-out frappent régulièrement l’Asie du Sud, à cause des vagues de chaleur record que subit la région depuis mi-avril.
À Lisbonne (Portugal), coupure d’Internet oblige, les habitant·es se sont rué·es vers les boutiques tenues par les communautés immigrées indiennes, pakistanaises ou népalaises, afin d’acheter des transistors à piles, la seule source d’information en plein black-out étant la radio publique portugaise.
Victimes depuis plusieurs mois d’attaques virulentes de la part de l’extrême droite portugaise et de descentes de police dans les rues où ils et elles tiennent leurs échoppes, les Indien·nes, les Pakistanais·es ou les Népalais·es de Lisbonne ont grâce à leurs petits commerces, comme en a témoigné le comédien et humoriste lisboète Diogo Faro, « été essentiels pour fournir des radios ou encore pour faire crédit aux gens qui ne pouvaient pas acheter à manger, car ils n’avaient pas de liquide sur eux ». (...)
Ce geste de solidarité des communautés exilées durant le black-out rappelle que cette expérience de la mégapanne électrique n’est pas l’apanage de la péninsule Ibérique.
Canicules hors norme
Du 14 au 15 avril, dans certaines régions du Pakistan, le mercure a grimpé jusqu’à 49 °C. Et New Delhi, en Inde, a dépassé les 40 °C à plusieurs reprises en avril, soit jusqu’à 5 °C de plus que la moyenne saisonnière. (...)
« les anomalies de température ont atteint jusqu’à + 12 °C » au Pakistan et en Inde.
Cette vague de chaleur exceptionnelle s’est aussi abattue le 26 avril, à Bassora, métropole irakienne de 2 millions d’habitant·es, où 46,1 °C ont été enregistrés. Le lendemain, Dammam, en Arabie saoudite, étouffait avec une température de 47,6 °C, de même que le nord des Émirats arabes unis, avec 46,6 °C mesurés.
Les scientifiques de ClimaMeter avancent que cette canicule « met à rude épreuve les limites humaines, repoussant les seuils de survie », et touche de manière « disproportionnée » les femmes enceintes et les enfants.
Un rapport de l’Unicef d’août 2023 a calculé qu’en Asie du Sud, trois enfants sur quatre sont exposés à des températures extrêmement élevées, contre un enfant sur trois à l’échelle mondiale. Et cette même année, trois chercheuses américaines ont publié une étude démontrant que le nombre de mariages forcés d’enfants augmente à la suite d’aléas climatiques, notamment en Inde ou au Pakistan.
Ces canicules hors norme sont attisées par la combustion des énergies fossiles, qui composent encore 80 % du mix énergétique mondial. Car derrière ces événements climatiques extrêmes qui frappent les habitant·es du Sud global se cache l’addiction encore gigantesque des pays du Nord au charbon, au pétrole et au gaz. (...)
Le 9 avril, Donald Trump a signé un ensemble de décrets destinés à « doper » l’extraction de charbon aux États-Unis, afin de stimuler la production d’électricité nécessaire au boom de l’intelligence artificielle. Première source du réchauffement planétaire, la combustion de charbon pour produire de l’électricité engendre plus de 40 % des émissions mondiales de CO2. Et selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie publié le 10 avril, la consommation électrique des centres de données va être multipliée par deux d’ici à 2030, entraînant des émissions annuelles en 2035 qui pourraient être équivalentes à celles de la France.
De même, la Commission européenne et le Parlement européen ont débuté le détricotage de textes clés du plan climat de l’Union européenne, qui vise une baisse des émissions de 55 % d’ici à 2030. Quant à la France, elle marque déjà ses premiers signes de ralentissement dans la lutte contre le changement climatique, avec une baisse de ses émissions de 1,8 % en 2024, alors qu’elles avaient diminué de 5,8 % l’an dernier. (...)
les impacts de nos modes de vie insoutenables comme de notre inaction climatique n’ont pas de frontières.